10 novembre 2021 3 10 /11 /novembre /2021 15:49

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Événements poétiques | Justice pour elles ! | Poésies féministes & N° 10 | Célébrations | Réflexions féministes sur l'actualité | Actions en faveur des femmes & personnes LGBTQIA

 

 

 

 

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Pour défaire les violences faites

 

 

aux femmes & personnes LGBT+ 

 

 

dans les milieux poétiques :

 

#MeTooPoetry*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Crédit photo : Pierre Jean Van der Ouderaa, "La tristesse", image Commons, domaine public. 

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La poésie a toujours été du côté des femmes et même bien au-delà des espérances des hommes. La poésie a toujours dénoncé les souffrances des femmes (accouchements, viols, meurtres, enlèvements...) et les difficultés d'être l'autre. Même si des écrits poétiques violents et méprisants à l'égard des femmes existent depuis l'antiquité.

La poésie issue des élégies, éloges et hymnes des femmes pour des entités surnaturelles mais surtout symboliques est la plus ancienne création poétique connue des humains. Cependant, des injustices, des oublis, des disparités entre les situations et conditions des femmes, des hommes et autres genres en poésie et dans ses milieux existent encore et causent des torts aux femmes et personnes dites LGBTQIA en empêchant leurs créations et présences de compter à leur juste valeur culturelle et universelle.

 

Lucide sur le passé, lucide aussi sur la situation actuelle des femmes et personnes dites LGBTQIA dans les univers poétiques et littéraires (publics, privés et autres), lucide sur la nécessité de défaire constamment et sans relâche les préjugés, les idées incongrues ou irrationnelles, les stéréotypes sexistes et autres sur les femmes et les minorités déjà citées dans les différentes sphères poétiques privées, publiques et entre les deux (festivals, médias, maisons de poésie, sites Web, maisons d'édition, académies, sociétés, fondations, fédérations, musées, associations, maisons de poètes, marchés, salons, récitals, Prix de poésie, bibliothèques, librairies, laboratoires et/ou centres de recherche, centres culturels, etc.) pour continuer d'œuvrer à l'amélioration des conditions, situations et capacités d'agir des individus indépendamment de leurs appartenances et spécificités en poésie, la fondatrice de ce périodique ne souhaite pas fermer les yeux sur les travers et les déboires des univers poétiques faisant partie intégrante de nos sociétés et ne pouvant qu'être contaminés et perpétués (in)consciemment des violences et/ou discriminations dans leurs sillages.

Consciente également de la difficulté des femmes à se faire entendre et d'être réellement écoutées dans ces sphères feutrées qui sont censées se distinguer des autres par leurs forces de sublimation et de résilience éthique, la fondatrice de cette revue propose de questionner les milieux de la poésie qui ne sont absolument pas détachés des autres sphères culturelles de nos sociétés contemporaines touchées et troublées par la gravité et le poids des violences sexuelles & sexists faites aux femmes, aux minorités du genre et aux personnes dites en situation de handicap à travers le hashtag #MeTooPoetry.

D'emblée, Dina Sahyouni considère que les sphères poétiques (publiques, privées et autres) contiennent, elles-mêmes à leur échelle, des formes de violences (physiques, psychiques, sexuelles, économiques, etc.) envers des personnes pour leurs genres, aspects physiques, origines, handicaps… et elle nous prie donc de lancer le hashtag #MeTooPoetry / #MeTooPoésie ou #MoiAussiPoésie pour permettre aux personnes concernées par ces violences de s'exprimer, d'être visibles par les médias et les instances juridiques et surtout pour donner un élan public à leurs voix qui pourrait défaire ces violences et leurs conséquences.

Suivant la même démarche du numéro traitant des violences sexuelles faites aux femmes sous la direction de Camille Aubaude (Tant de Philomèles en ce monde !), le lancement de notre hashtag peut, nous l'espérons sincèrement, contribuer à diminuer, voire en stopper les formes les plus graves), les violences infligées aux femmes et minorités citées. L'association SIÉFÉGP et ses autres périodiques soutiennent cette initiative utile.

 

LE PAN POÉTIQUE DES MUSES conseille cependant de témoigner dans le respect des lois en vigueur de son pays et remercie chaleureusement toute personne qui témoigne.

 

 

 

*#MeTooPoetry existe depuis peu de temps sur le Web. Nous l'avons remarqué. Certains témoignages reçus par messagerie confirment aussi des comportements sexistes & discriminatoires.

 

 

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Pour citer ce texte féministe & militant ​​​​​​

 

LE PAN POÉTIQUE DES MUSES, « Pour défaire les violences faites aux femmes et personnes LGBT+ dans les milieux poétiques : #MeTooPoetry », Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N° 10 | Automne 2021 « Célébrations » & Événements poétiques | Insurrection poétique 2021 « Justice pour elles ! », mis en ligne le 10 novembre 2021. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no10/metoopoetry

 

 

 

 

 

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13 septembre 2021 1 13 /09 /septembre /2021 14:00

 

N°10 | Célébrations | Annonces diverses

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Avis de parution de 

 

 

 

Vi♀lence(s)

 

 

 

 

 

​​​​​​© Crédits photos : Première de couverture du livre & Paule Andrau, images fournies par les éditions Maurice Nadeau.

 

 

Mon roman, Vi♀lence(s), n’est ni une « autofiction » parmi d’autres, ni un « essai » ni un « témoignage ». Il est un hommage aux femmes : comme le ferait une “partition” musicale, il  orchestre des histoires morcelées qui émeuvent, indignent et révoltent, il cherche à ébranler la conscience sociale qui, de façon générale, nie et méconnaît la condition féminine. 

Il a longtemps mûri dans ma pensée, accumulant toutes ces blessures faites aux femmes dont elles ne parlent pas, ces « bris de femmes », comme des sédiments qui ont fini par venir au jour au fil d’un long processus : ces éléments qui semblaient disparates ont pris sens de leur confrontation même, en un kaléidoscope incomplet et mouvant, c’est devenu une création littéraire et artistique qui se revendique pour telle.

Camus fait dire à Caligula, son « héros de l’absurde », « Les hommes meurent et ils ne sont pas heureux ». Il est temps de dire pour les femmes d’aujourd’hui et celles de demain : « Les femmes meurent et elles ne sont pas heureuses ». 

© Paule Andrau

 

 

© Françoise Urban-Menninger, «  Interview à propos de "Vi♀️lence(s)" de Paule Andrau » texte inédit, photographie par Gilles Nadeau, ****&&&&Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N° 10 | Automne 2021 « Célébrations », mis en ligne le 30 août 2021. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no10/fum-entretien-pauleandrau

 

Contact : 06 81 72 53 46 / editions.mauricenadeau@orange.fr / www.maurice-nadeau.net https://www.instagram.com/edmauricenadeau/ https://www.youtube.com/channel/UCa0qhIM8ZydjNXXb7y6VyZQ

 

Source de l'information : le communiqué de presse de la romancière.

 

 

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Pour citer cet avis de parution

 

LE PAN POÉTIQUE DES MUSES« Avis de parution de "Vi♀lence(s)​​​" » texte inédit, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N° 10 | Automne 2021 « Célébrations », mis en ligne le 13 septembre 2021. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no10/pa-violences

 

 

 

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30 août 2021 1 30 /08 /août /2021 09:35

 

N° 10 | Célébrations | Entretiens poétiques, artistiques & féministes 

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Interview à propos de

 

 

 

« Vi♀lence(s) »

 

 

 

de Paule Andrau

 

 

 

 

Propos recueillis par

 

Françoise Urban-Menninger

 

Blog officiel : L'heure du poème

 

Photographie par

 

Gilles Nadeau

 

 

 

 

​​​​​​© Crédit photo : "Paule Andrau", Juin 2021, cette photographie inédite a été prise par Gilles Nadeau. 

 

 

À lire aussi :

 

 

LE PAN POÉTIQUE DES MUSES A RENCONTRÉ PAULE ANDRAU :

 

 

 

 

1 Comment l'humanité en est arrivée à ces « Violence(s) » faites aux femmes ? Si l'on en croit Olivia Gazalé dans son ouvrage « Le mythe de la virilité », c'est ce mythe qui est devenu le fondement de l'ordre social et par conséquent l'une des raisons essentielles des violences infligées aux femmes…

 

 

Paule Andrau – La violence semble liée intrinsèquement à l’humain : les récits des origines fondent la vie sur la violence – Caïn tue son frère Abel, Chronos dévore ses enfants, Romulus tue Rémus en fondant Rome. Vie et violence sont liées de façon immémoriale : notre langue, par son enracinement grec et latin, en témoigne : même racine grecque pour ο βιος (masculin) la vie, et η βια (féminin) la force ; le « biologique » est à la fois expression de la vie et témoignage d’une violence  – celle qui intervient dès la naissance avec cette « violence » qui nous est faite pour entrer dans le monde des vivants. En latin, même racine entre vis, la force, vita, la vie et… vir l’homme, le masculin : quand on sait que dans la genèse des langues anciennes, r et s sont interchangeables (phénomène de rhotacisme qui peut s’inverser), cela fait réfléchir.

Jeter un regard sur l’Histoire amène à percevoir que la femme est par nature l’objet et le lieu de la violence, qu’elle soit familiale, conjugale, sociale. Dans Masculin, Féminin. La pensée de la différence, Françoise Héritier, grande anthropologue, cherche à comprendre la hiérarchisation des sexes à partir des « systèmes de parenté » et elle souligne l’inégalité des relations intrafamiliales selon que l’individu est masculin ou féminin. Cette relégation des femmes au second plan constitue une « différence » qui organise le devenir des femmes. Olivia Gazalé choisit d’étudier « le mythe de la virilité »  et de le déconstruire, dans son essai éponyme et, face au pessimisme de Françoise Héritier qui considère que les sociétés s’érigent sur des invariants, elle souligne les avancées que la réflexion sur la place des femmes a connu depuis l’époque du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir. 

Mon roman Vi♀lence(s) n’est ni une analyse ni une étude - les travaux précités se suffisent à eux-mêmes. Il restitue les paroles des femmes qui ont trouvé un écho en moi, bien avant le phénomène déclenché par #Metoo. En ce sens, il est un cri jeté à la face des silences qui engloutissent et effacent tant de destins féminins ignorés, il est une protestation contre l’indifférence, le mépris, l’ignorance. Mon roman tresse, en toile de fond, les paroles de trois femmes, 1, 2, 3, qui n’ont pas le même âge, le même statut social, le même vécu et qui pourtant, illustrent, en écho, la réalité des femmes : menstruations, sexualité, maternité, charge mentale, ménopause, incommunicabilité, vieillesse, solitude et abandon.  On comprend au cours de leurs énoncés parcellaires que le roman juxtapose et construit – mais on sent bien qu’ils pourraient être simultanés comme chez Michel Vinaver – qu’elles sont dans un lieu commun, pour des raisons différentes, un de ces couloirs d’hôpital, pas vraiment salle d’attente, où se trouvent répertoriés souffrants et accompagnants dans un ordre seul connu des administratifs ou des urgenciers. Leur plongée dans ce qu’elles ont été est une tentative dérisoire contre la défection de tout l’être que produit toujours la proximité de la mort – de soi ou de l’autre. Dans leur dérive viennent s’inscrire les paroles d’autres femmes, tout aussi niées que les leurs, celles qu’on voit passer sur les brancards, objet d’interrogations ou de commentaires et qui se trouvent là aussi dans une nouvelle forme de l’antichambre de l’enfer.

 


 

2 – Y aurait-il d'après vous un inconscient collectif qui s'est forgé au fil du temps concernant ces violences ?

 

 

Paule Andrau – Les femmes taisent leurs sentiments profonds parce que, même quand elles pourraient parler, elles s’autocensurent : elles ont été façonnées par des millénaires d’oppression tacite qui est le fruit des conventions. Pendant des générations, les femmes ont intégré à leur vie les diktats des pères et d’une éducation qu’on a commencé à remettre en cause, en Occident, dans la deuxième moitié du XXe siècle. Mais pour un grand nombre de femmes dans le monde, la violence qu’elles subissent est un fait de société incontestable : selon un rapport de l’ONU, 47% des femmes dans les pays non occidentaux n’ont pas la libre disposition de leur corps. Le dernier forum de « l’ONU femmes » a qualifié la violence qui leur est faite de « pandémie de l’ombre ». Ce terme rappelle à quel point, jusque dans la postulation de leur liberté, les femmes sont entravées par les modèles intimement inscrits en elles, dès l’enfance, par la société ; même si leur expérience personnelle est différente, les femmes se retrouvent sur des thématiques communes : leur rapport au corps, au sexe, au couple, à l’enfant, à la famille.

Mais quel que soit leur statut social, toutes les femmes, même si elles ne l’ont pas éprouvée dans leur être, connaissent ce qu’on appelle aujourd’hui la « culture du viol ». Aussi, dans la trame des paroles inaudibles que restitue mon roman Vi♀lence(s) s’insèrent les paroles des femmes dont le sort a fait la une des journaux, inscrites dans la mémoire collective des femmes. Si le romancier est comme le disait Marguerite Duras une « chambre d’échos », mon roman amplifie et renvoie à son lecteur la parole confisquée de celles qu’on ne peut effacer : la femme ménopausée au bord du délire, la paria indoue – historique – apôtre des désespérés, la mère meurtrière d’un fils drogué, la fille victime de l’inceste paternel, la brillante élève découvrant son excision, les trois assassinées après leur viol, la déportée devenue juste, la cancéreuse au bord de la mort, la mariée de force,  la mater dolorosa, la femme devenue lesbienne… Toutes inaudibles, anonymes, « héroïnes » malgré elles de faits divers violents, de faits de société passés sous silence. 

Pour Simone de Beauvoir – Le Deuxième sexe –, il n’existait pas de « condition féminine » – par référence à des catégories qui avaient cours à l’époque comme la « condition ouvrière », la « condition paysanne », le monde bourgeois, l’intelligentsia – parce que la femme était le prolongement d’un homme et partageait le statut de celui-ci. Mais les mouvements féministes successifs, l’activisme pragmatique de Gisèle Halimi créant Choisir la cause des femmes, ont fait émerger un « continent » jusque-là occulté. Les paroles des personnages de Vi♀lence(s)  construisent peu à peu la réalité d’une condition féminine qui est celle de l’« expérience du ventre ». Où qu’elles se situent dans la société et quelle que soit leur génération, les femmes ont éprouvé ou connaissent, par proximité – avec d’autres femmes –, par ouï-dire – à travers ce qu’elles lisent –, ce qui découle de leur statut de femme :  la sexualité avec l’indétermination qui commence enfin à être levée sur le consentement, le viol, l’inceste ; la différence entre érotisme et pornographie ; les règles, l’endométriose, la ménopause ; la grossesse,  la contraception et l’avortement ; la maternité choisie, le couple, la charge mentale, le divorce ; la question de « genre »… La réalité des femmes qui est si étroitement liée à leur condition biologique commence seulement à être questionnée, à être reconnue : la même solitude, le même malentendu – affectif, familial, social – malgré les fausses libertés et la plénitude de façade que tous les médias s’accordent à leur conférer. Contre un inconscient collectif victimaire et résigné, les femmes, depuis cinquante ans, ont construit une conscience,  elles deviennent membres du « peuple de la fente » : le vécu féminin est étroitement lié, chez elles, à l’intime.

 

 

 

3 – Quel est votre avis sur les religions, l'éducation, la littérature, les médias quant aux problématiques liées aux violences faites aux femmes ?

 

 

Paule Andrau – Pierre Bourdieu, dans son ouvrage La Domination masculine, établit que celle-ci est produite par « un travail incessant (donc historique) de reproduction auquel contribuent des agents singuliers (dont les hommes avec des armes comme la violence physique et la violence symbolique) et des institutions, familles, Église, État, Écoles ». Il souligne que ce processus pérennise des rapports et des structures de domination que les femmes intériorisent. 

Aussi, dans le roman Vi♀lence(s), cette mémoire collective des femmes s’exprime à travers les douze femmes désignées par des lettres : le roman s’ouvre sur l’expression de X. qui se sent investie d’une mission, celle de collecter et de rapporter  ce qu’elle imagine être le discours intérieur des femmes 1., 2., 3. ; ensuite onze autres femmes prennent la relève : elles consignent les interdits qu’elles ont transgressés et  les atteintes qu’elles ont subies. 

Tout dans la littérature et sur les écrans parle aux femmes : les adaptations cinématographiques ou télévisuelles charrient ces destins sacrifiés, celui de la Gervaise de L’Assommoir, de la Jeanne d'une Vie et tant d’autres – destins conçus par des hommes. Surtout l’actualité avec son lot quotidien de féminicides et d’agressions forge une conscience collective qui s’exprime aujourd’hui chez les femmes par les mouvements du refus et une littérature féministe de combat. 

Rapportées par les médias, racontées par des femmes à d’autres femmes, transportées par l’Histoire et la littérature, ces « récits » parcellaires construisent une conscience féminine polyphonique.

Depuis quarante ans des ouvrages ont brisé les interdits : en 1986, la voix d’Eva Thomas dévoile l’horreur de l’inceste dans Le Viol du silence, elle témoigne à visage découvert dans l'émission, Les Dossiers de l'écran, seule femme face à une dizaine de « spécialistes » de la question, tous masculins. Et en 1992, elle questionne, dans Le Sang des mots, une justice qui condamne pour diffamation les femmes abusées qui ont dénoncé leurs abuseurs. On ne peut pas dire qu’« on ne savait pas ». Dès  1993, Dorothée Dussy, anthropologue et chercheuse au CNRS, publie avec Le Berceau des dominations, Anthropologie de l’inceste, le début de ses travaux qui trouvent leur achèvement en 2013 : son ouvrage est réédité en avril 2021.

Aujourd’hui la parole et la pensée s’émancipent des vieux tabous et les femmes luttent partout pour la reconnaissance : au sein des médias – le témoignage d’une journaliste sportive, « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste », l’affaire Weinstein –, au sein des entreprises, des administrations, cher les « puissants » – Enquête Epstein et Maxwell. 

 

 

 

© Crédit photo : Première de ouverture du livre, image fournie par les éditions Maurice Nadeau. 

 

 

 

 

4 La société devenant de plus en plus violente, les femmes en sont bien souvent les premières victimes, comment combattre ce fléau ?

 

 

Paule Andrau – Dans les sociétés occidentales comme dans les sociétés patriarcales, les femmes restent des sacrifiées, et ce roman, Vi♀lence(s), tente de saisir ces femmes « en éclats » à travers leurs paroles non dites, bruits intérieurs, silences par lesquels elles deviennent invisibles aux autres. 

La solution se trouve dans l’évolution de la loi. 

La loi de 1980 qui a criminalisé le viol en le rendant passible des Assises et en le définissant a été une avancée considérable, la loi Schiappa de 2018 sur les violences sexistes et sexuelles a permis de réfléchir sur l’âge du consentement et de réprimer les formes de harcèlement. Mais il reste encore à prendre en compte la parole des femmes dans les cas de violences conjugales ou sexuelles par une meilleure formation des services concernés et par des moyens. L’Espagne dans ce domaine, fait figure de précurseur : la loi de protection de 2004 et les moyens qui l’accompagnent – tribunaux spécialisés dans les violences faites aux femmes, moyens financiers investis chaque année pour des plateformes de suivi, des hébergements dédiés, des mesures d’accompagnement – ont été renforcés par un plan  « Pacte d’État » en 2017 – 700 millions d’euros par an. Le mouvement de défense des femmes dans la société civile espagnole a été si puissant que le procès en appel de violeurs en groupe – s’appelant  la « Meute » – a débouché sur une condamnation de ceux-ci à quinze ans de prison (2019). 

Il existe bien des « débuts » de solutions mais elles sont inégales en Europe.

 

 

 

5 – N'est-ce pas par les femmes elles-mêmes que l'on pourra endiguer la violence faite aux femmes ? Votre livre en est une avancée essentielle à l'instar du témoignage bouleversant de Marguerite Binoix « Battue » paru il y a quelques années…

 

 

Paule Andrau – Peut-être qu’il est difficile d’accepter les paroles des femmes qui se taisent sur elles-mêmes, qui inscrivent dans leur conscience blessée les injustices faites aux autres femmes, qui ajoutent à leur propre souffrance celles qu’étalent parfois complaisamment les faits divers, les émissions de toutes sortes. Ces femmes qui restent murées dans leurs silences sont partout, invisibles aux autres. Elles continuent à vivre leur vie quotidienne sans que personne ne perçoive leur “parole de dessous”. Elles n’ont pas de nom. Parfois un article de journal, une enquête médiatique met en évidence un cas monstrueux qu’on croit sporadique et exemplaire. Mais chaque femme vit une forme de violence. 

Les témoignages comme ceux d’Eva Thomas, de Marguerite Binoix, de Valérie Bacot – Tout le monde savait – sont essentiels comme leur diffusion et leur réception par la société civile : la parole des victimes, quand elle est entendue « remet le monde à l’endroit » dit Eva Thomas. Le roman Vi♀lence(s) tente de faire exister les voix des femmes tues, bâillonnées par la nécessité de maintenir la famille malgré les violences, la difficulté à vivre hors du conjoint quand elles ne travaillent pas, leur volonté parfois de s’aveugler sur leur réalité.

Pourtant des femmes s’engagent : outre celles que j’ai citées, une spécialiste comme Muriel Salmona, en créant l’association Mémoire traumatique et victimologie, offre aux femmes victimes et à leurs accompagnants informations et formation. Elle a fait émerger des concepts nouveaux propres aux situations d’emprise et de violence sexuelle : ses travaux  donnent des pistes pour reconnaître et protéger les victimes, lutter contre la culture du déni ; ses campagnes d’opinion Et pourtant c’était un viol (2014), Stop au déni (2015) – Les Sans-Voix – ont permis de mettre en évidence les effets physiques et psychologiques des violences faites dans l’enfance. Elle participe ainsi à faire évoluer les mentalités et à mobiliser les politiques – interventions devant le Sénat et l’Assemblée Nationale.

 

 

 

6 – N'hésitez pas à ajouter des réflexions à propos de votre ouvrage, l'idée même de sa conception, vos objectifs...

 

 

Paule Andrau – Mon roman, Vi♀lence(s), n’est ni une « autofiction » parmi d’autres, ni un « essai » ni un « témoignage ». Il est un hommage aux femmes : comme le ferait une “partition” musicale, il  orchestre des histoires morcelées qui émeuvent, indignent et révoltent, il cherche à ébranler la conscience sociale qui, de façon générale, nie et méconnaît la condition féminine. 

Il a longtemps mûri dans ma pensée, accumulant toutes ces blessures faites aux femmes dont elles ne parlent pas, ces « bris de femmes », comme des sédiments qui ont fini par venir au jour au fil d’un long processus : ces éléments qui semblaient disparates ont pris sens de leur confrontation même, en un kaléidoscope incomplet et mouvant, c’est devenu une création littéraire et artistique qui se revendique pour telle.

Camus fait dire à Caligula, son « héros de l’absurde », « Les hommes meurent et ils ne sont pas heureux ». Il est temps de dire pour les femmes d’aujourd’hui et celles de demain : « Les femmes meurent et elles ne sont pas heureuses ». 




 

 

Biographie de la romancière :

 

Paule ANDRAU est agrégée de lettres classiques et professeure de chaire supérieure, elle a longtemps enseigné la littérature avant d'écrire «  le temps venu » et de prêter sa voix à toutes les femmes qui sont entrées dans sa vie « – femmes du réel, des livres, de l'Histoire, des faits-divers, des films, des rêves – et qui n'en sont jamais ressorties ».

 

 

 

©F. Urban-Menninger

 

 

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Pour citer cet entretien féministe 

 

Françoise Urban-Menninger«  Interview à propos de "Vilence(s)" de Paule Andrau » texte inédit, photographie par Gilles Nadeau, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N° 10 | Automne 2021 « Célébrations », mis en ligne le 30 août 2021. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no10/fum-entretien-pauleandrau

 

 

 

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26 mai 2021 3 26 /05 /mai /2021 14:03

 

Événements poétiques | Megalesia 2021 & N° 10| Célébrations | Critique & réception | Biopoépolitique | Voies/voix de la sororité

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Violence(s) 

 

 

de Paule Andrau, un livre choc qui 

 

 

paraîtra le 10 septembre aux

 

 

Éditions Maurice Nadeau

 

 

 

 

 

 

Françoise Urban-Menninger

 

Blog officiel : L'heure du poème

 

 

 

 

 

© Crédit photo : Première de ouverture du livre, fournie par les éditions Maurice Nadeau. 

 

 

 

Agrégée de lettres classiques et professeure de chaire supérieure, Paule Andrau a longtemps enseigné la littérature avant d'écrire «  le temps venu » et de prêter sa voix à toutes les femmes qui sont entrées dans sa vie « – femmes du réel, des livres, de l'Histoire, des faits-divers, des films, des rêves – et qui n'en sont jamais ressorties ».

 

 

© Crédit photo : Image de Paule Andrau, fournie par la critique F. Urban-Menninger. 

 

 

 

 

Ces femmes ont toutes en commun leurs désillusions dans un monde fait par et pour les hommes. Dès la naissance, les femmes appartiennent « au peuple de la fente », ce qui leur vaut d'être de l'autre côté des mots, à savoir celui de l'indicible et de l'inaudible.

C'est justement cet « indicible » que Paule Andrau nous donne à entendre à travers des bribes de destins qui brisent le miroir des apparences et de la trop confortable bien-pensance.

Sans fausse pudeur, l'auteure aborde le tabou des « menstrues » et revient sur les années 50 ou 60 où les serviettes jetables n'existaient pas. Ces dernières en tissu, retenues par une ceinture, marquaient avec les saignements le passage obligé pour devenir une vraie femme avec tout ce que cela incombait et incombe encore aujourd'hui. Le mariage, les enfants, les relations sexuelles qui finissent par devenir « un devoir conjugal » quand la routine a remplacé le plaisir… Quant à celle qui a réussi, souvent elle cumule son emploi et les charges familiales et domestiques ! Arrivée à la cinquantaine, la femme usée se retrouve « pauvre, vieille et laide » alors que l'homme peut tout recommencer !

Ces femmes dont les destins se fondent dans celui d'une « matrice universelle » partagent une douleur ancestrale, intemporelle. Car que reste-t-il aux femmes qui ont tout donné ? À celles qui ont abandonné leur emploi pour se consacrer aux tâches ménagères, à leurs enfants, leur mari ? L'envie de partir et de tourner la page leur semble impossible.

Alors l'une d'entre elles sombre dans l'alcoolisme pour noyer sa désespérance, une autre tente de mettre fin à ses jours en traversant une verrière…

Une autre encore nous parle d'outre-tombe après avoir été violée et massacrée avec deux de ses amies par « deux brutes épaisses ». « Oui je suis morte mais je hurle » et plus loin « je hurle pour moi et pour elles, pour nous qu'on a retrouvées au bout de huit jours, mal enterrées dans un bunker de la côte abandonné aux sans-abris ».

Ce hurlement de l'au-delà, Paule Andrau nous le restitue à travers le sang des mots qui coule entre les lignes. Ce sang, c'est celui aussi de cette enfant de quinze ans violée quotidiennement par son employeur et qui finit par le tuer en provoquant un accident.

Ce sang, c'est celui encore de cette jeune Malienne qui découvre un jour qu'elle a été excisée « Mutilée, je suis mutilée, je suis une autre », crie-t-elle.

C'est aussi l'évocation du procès d'un père violeur au cours duquel la question lapidaire posée par l'avocate ne peut laisser le lecteur indemne, le livre refermé : « Que faire contre le sceptre turgescent du père ? »

 

Nul doute que Violence(s) de Paule Andrau est un livre-cri qui fulgure dans le silence encore et toujours assourdissant qui accompagne les violences faites aux femmes. Car même si l'on parle aujourd'hui de ce sujet trop longtemps tu, cela reste « un sujet » qui fluctue au fil de l'actualité, un fait-divers chassant l'autre, égrenant à l'infini la kyrielle des violences ordinaires infligées aux femmes car elles sont femmes !

 

Seule une femme pouvait écrire ce livre lumineux car c'est dans son propre corps que l'auteure a su écouter les voix de toutes ces femmes qu'elle porte en elle. Elle en a accouché sur la feuille blanche et s'est jointe à leur chœur en affirmant fièrement « Et c'est ça notre force, notre irréductible pouvoir de vivre : la conscience de porter en nous les origines de tout. La conscience d'être la vie ».

 

 

Notice supplémentaire 

 

À l'heure où je viens de clore cet article, j'apprends que deux jeunes femmes viennent d'être assassinées par leurs compagnons, l'une a été poignardée, l'autre a succombé sous des coups de marteau….

Les commentaires sont inutiles si ce n'est le conseil réitéré de lire « Violence(s) » de Paule Andrau, un ouvrage majeur dans la compréhension de ce « continent sinistré » où les femmes n'ont plus de nom.

 



©F. Urban-Menninger

 

 

À lire aussi  :

 

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Pour citer cette critique 

 

Françoise Urban-Menninger, « Violence(s) de Paule Andrau, un livre choc qui paraîtra le 10 septembre aux Éditions Maurice Nadeau » texte inédit, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique|Megalesia 2021 & N° 10 | Automne 2021 « Célébrations », mis en ligne le 26 mai 2021. Url : 

http://www.pandesmuses.fr/megalesia21/fum-livre-violences

 

 

 

Mise en page par Aude Simon

 

Dernière modification : 30 août 2021 (ajouts du no 10 & du lien de l'interview avec la romancière) 

 

 

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15 mars 2021 1 15 /03 /mars /2021 10:29

 

Événements poétiques | Megalesia 2021 | S'indigner soutenir, lettres  ouvertes, hommages

 

 

 

 

 

Lettre ouverte : 

 

 

libérez immédiatement

 

 

Rania Amdouni. 

 

 

 

Décidément, Mars 2021 est bien chargé pour les féministes, après le meurtre insoutenable de l'adolescente Alisha par deux adolescents, on découvre grâce à Hejer Charf et le média L'importante (voir les liens ci-dessous) que la féministe tunisienne et militante queer de la cause LGBTQ Rania Amdouni "a été condamnée" à passer six mois en prison pour un prétendu outrage aux mœurs et à un agent public. On apprend également qu'elle est harcelée, humiliée et menacée de viol et de mort.

 

Résumé de l'affaire en citations du texte de Hejer Charf publié le 8 mars 2021 :

 

« Le 4 mars 2021, Rania Amdouni, Tunisienne, 26 ans, comédienne, queer et militante LGBTQ a été condamnée à six mois de prison ferme avec incarcération immédiate pour atteinte publique aux mœurs et outrage à un agent public.

Elle a été arrêtée au commissariat où elle allait déposer une plainte pour harcèlement par des policiers. [*]

[...] Les accusations pour atteinte aux mœurs, au sacré, deviennent récurrentes en Tunisie. La condamnation de Rania Amdouni est honteuse et arbitraire. Un jugement fourre-tout pour châtier une jeune-fille queer et lui signifier qu’elle est une citoyenne de seconde zone, coupable de ne pas obéir au patriarcat hétéronormatif. L'article 230 du Code pénal condamne l’homosexualité jusqu’à trois ans de prison [...] Rania Amdouni est victime d’harcèlement incessant, d’une violence sans nom. » (voir le lien ci-dessous)

 

L'association SIÉFÉGP et ses périodiques féministes demandent aux autorités tunisiennes la mise en liberté immédiate de Rania Amdouni injustement jugée à cause de son orientation sexuelle qui dérange des personnes qui ne supportent pas la différence et l'altérité, qui préfèrent utiliser la religion comme argument principal d'une loi répressive de la liberté fondamentale de se disposer de son corps.

 

On prie aussi les autorités françaises et les organismes féministes influents de s'emparer de cette affaire, de protéger activement Rania Amdouni et d'exiger des autorités tunisiennes sa libération dans les brefs délais. Nous n'avons que nos mots pour répondre aux maux du monde : au XXIe siècle, il est inadmissible d'enfermer et de réprimer publiquement une personne par homophobie, transphobie... et, puis affirmer que les droits des humains (autrement dit les droits de l'Homme) sont respectés.

​​

 

SIÉFÉGP, ses périodiques y compris ​​​​​​LE PAN POÉTIQUE DES MUSES

 

* Pour plus d'informations, veuillez lire le texte fort détaillé de la revue "Têtu" sur cela, daté du 15 mars 2021, URL : https://tetu.com/2021/03/15/tunisie-six-mois-de-prison-pour-la-militante-queer-rania-amdouni/.

 

***

 

 

Pour citer ce texte

 

SIÉFÉGP & LE PAN POÉTIQUE DES MUSES, « Lettre ouverte : libérez immédiatement Rania Amdouni. », lettre ouverte contre les violences faites aux femmes et personnes LGBTQ+, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique|Megalesia 2021, mis en ligne le 15 mars 2021. Url :

http://www.pandesmuses.fr/megalesia21/lettreouverte-raniaamdouni 

 

 

 

 

Mise en page par David Simon

Dernière mise à jour le 16 mars 2021 

(ajout du lien vers la revue "Têtu") 

 

 

 

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