Grand prix de poésie de la ville d’Aix-en-Provence,
Session 2017, Concours organisé par
l’Association Artistique et Culturelle H O R I Z O N
sous le haut patronage et avec la participation
de la Ville d’Aix-en-Provence
Mesdames, Messieurs,
Comme chaque année, l’Association Horizon, avec le soutien de la Ville d’Aix en Provence, organise le Grand Prix de Poésie d’Aix en Provence. Catégories : Classique, Néoclassique, Libérée et Jeunes Poètes (16 à 18 ans, 13 à 15 ans, moins de 13 ans). Pas de thème imposé. Date limite des envois, le 1er octobre 2017.
On peut en obtenir le règlement en écrivant à : M. André Rouy, 23 résidence Saint Benoît, 101 avenue Henri Mauriat, 13100 Aix en Provence, en joignant une enveloppe timbrée pour la réponse. On peut aussi consulter le règlement et le copier sur le blog www.aixhorizon.over-blog.com
Pouvez-vous en informer votre public, vos adhérents et vos sympathisants ?
Nous joignons à ce courrier un exemplaire du règlement ; En vous remerciant par avance, nous vous prions de bien vouloir accepter l’expression de nos salutations distinguées.
Le secrétaire de l’Association Horizon
André Rouy
H O R I Z O N
Association Culturelle
Maison des Associations
LUYNES, AIX-EN-PROVENCE
Voir aussi le règlement de ce concours en PDF ci-joint à télécharger
André Rouy pour l'association HORIZON,« Grand prix de poésie de la ville d’Aix-en-Provence, Session 2017, Concours organisé par l’Association Artistique et Culturelle H O R I Z O N sous le haut patronage et avec la participation de la Ville d’Aix-en-Provence», Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n°11, mis en ligne le 15 août 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/2017/8/concours-horizon.html
Figure charismatique de la littérature panaméenne, Diana Morán laisse à la postérité une œuvre littéraire d’envergure. C’est en 2012 lors de la Xème Rencontre Internationale des Femmes Écrivains, présidée par la poète panaméenne Gloria Young (actuellement Ambassadeur du Panama au Maroc), où j’ai été invitée à représenter la France en tant qu’écrivaine, poète et journaliste, que j’ai eu le bonheur de découvrir l’importance et la qualité de l’œuvre de l’écrivaine et de visiter sa maison natale à Cubaya. Ladite rencontre avait pour but de mettre en lumière cette femme d’exception qui fut contrainte à l’exil au Mexique après le coup d’État du Colonel Omar Torrijos au Panama le 11 octobre 1968.
Qui est Diana Morán ?
Poète, enseignante universitaire, chercheuse, philologue et essayiste, Diana Moránest née le 17 novembre 1929 à Cubaya, une ville du Panama où elle enseigna à l’Institut Fermín Naudeau. Elle s’affirme aux côtés du chanteur de dizains et d’ahans, Pille Collado, elle fonde une école primaire à Antón qui porte aujourd'hui la dénomination de Premier Cycle Salomon Ponce Aguilera. Elle s’exile à Mexico en 1969 où elle continue son travail de création littéraire. Jusqu’en 1968 elle était l’une des dirigeantes remarquables de l’Association des Professeures de la République du Panama. Elle s’évertue non seulement à transmettre les savoirs académiques à la jeunesse mais aussi les valeurs indispensables au maintien de l’identité culturelle nationale, chère au peuple panaméen. La même année, elle fonde l’Atelier de Théorie etde Critique littéraire, auquel se joignent des femmes mexicaines et centraméricaines du Collège de Mexico, lesquelles décident de baptiser l’atelier, du nom de « Diana Morán ». En 1993, l’atelier devient un groupe de travail indépendant. En 1979, elle présente sa thèse de doctorat en Lettres hispaniques, intitulée : Cien año de soledad : novela de la desmitificación (« Cent ans de solitude : roman de la démystification »).
L’œuvre de Diana Morán bien qu’empreinte de militantisme, n’est pas dénuée de qualité esthétique. C’est une créatrice qui invite la perfection dans ses écrits. Sa poésie engagée, aux accents révolutionnaires, a été publiée dans plusieurs pays latino-américains et aussi en Espagne. Poète et enseignante, elle était l’incarnation de la justice et de l’équité, aussi plaidait-elle pour une juste et équitable répartition de la richesse nationale. Elle ne se borna pas à l’écriture d’une poésie plate et insipide dictée par les circonstances, donc axée uniquement sur les revendications mais elle avait également le souci de la perfection du point de vue formel et esthétique. Elle cultivait un lyrisme sur fond de revendication nationale. Pour donner du poids à sa lutte, elle alliait sa voix à celles d’autres poètes incontournables comme le Nicaraguayen Ernesto Cardenal, le Salvadorien Roque Dalton et le Dominicain Pedro Miro. Elle avait mille et un tours d’adresse dans ses écrits pour fustiger et dénoncer l’impérialisme américain lors du débarquement des Marines le 9 janvier 1964 au Panama. Elle introduisait même quelques innovations au niveau du registre littéraire de la langue espagnole qu’elle défendait dans le milieu universitaire.
La poésie de Diana Morán est une poésie moderne, formellement transgressive, et éclectique qui se nourrit tant du langage dramatique que du langage narratif et même populaire. À l’instar de Prévert, des surréalistes, elle explore les formules d’assemblage, de collage, en référence aux arts visuels très prisés à son époque. Comme le souligne J. R. Fernández de Cano dans son article en espagnol sur le site MCN. Biografias.com que « Diana Morán pousse à l’extrême limite sa recherche sur de nouvelles voies thématiques et génériques afin de surprendre le lecteur en lui offrant une écriture d’un genre particulier donc difficile à mettre dans les catégories poétiques traditionnelles ». Pour conclure, disons que Diana Morán demeure un cas d’espèce pour être la seule femme poète panaméenne à connaître l’exil après avoir été incarcérée pour ses idées progressistes. Elle restera sur sa terre d’accueil jusqu’à son décès survenu le 10 février 1987 à Mexico où elle mena avec brio et sans désemparer sa carrière littéraire. Nous avons sélectionné et traduit quelques-uns de ses poèmes en français. Notons qu’aucune traduction de ses poèmes n’a été préalablement faite en français.
Une délégation d’écrivains et poètes reçue en 2012 dans la maison de Diana Morán à Cubaya (Panama)
(Extrait de son recueil Gaviotas de Cruz Abierta, 1965)
Traduit de l’espagnol par Maggy DE COSTER
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Ô Homme-Isthme… Adam de boue verte !
O Homme-Isthme… Adam de boue verte !
De tes humides yeux de coriandre
et de ta peau sauvage de menthe verte
germe l'aube de la patrie pure
Pentagramme sensuel de chlorophylle…
Tes notes révolutionnaires forment
– le cœur triomphant du prolétariat –
la symphonie sociale des hommes.
Salomé-guide du myrte ouvrier
j’attends sur les bords de tes lèvres
l’éclairage rouge des sons
qui donnent le contenu à mes pupilles
Laisse-moi…Laisse-moi venir vers toi !
Diana Morán
(Extrait de son recueil Eva Definida, 1957)
Traduit de l’espagnol par Maggy DE COSTER
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Tu dois surgir en moi goutte à goutte
Tu dois surgir en moi goutte à goutte,
je rêve de retour à l’essence charnelle,
de la pluie que le doux feu précipite
en pleurs fécondés à la naissance.
Je dois vivre la courbe dilatée
dans la plénitude d’une sagittaire,
vivante fleur croissante,
tu mûriras en moi
os par os,
jusqu’à ce que des limbes soit extraite ta présence
Je me dédouble...
Tu es...
Nous sommes...
La montée victorieuse d’une pleine lune
embaume la source des seins comme le jasmin.
Diana Morán
(Extrait de son recueil En El Nombre Del Hijo, 1966)
Traduit de l’espagnol par Maggy DE COSTER
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Bibliographie deDiana Morán
– Eva Definida (Ève définie) en collaboration avec Ligia Alcázar, 1959
– Soberana Presencia de la Patria(Souveraine présence de la Patrie), 1964
– Gaviotas de Cruz Abierta (Mouettes en Croix Ouverte), Prix Ricardo Miró en 1965, édité en 1992 aux Éditions Mariano Arosemena, INAC
– En el nombre de Hijo (Au nom du Fils), 1966
– Poesía Joven de Panamá (Jeune Poésie de Panama), (co-auteure de), XXIème siècle Éditions, Mexico, 1971
– Ficción e Historia (Fiction et Histoire) : La Narrativa de José Emilio Pacheco, en collaboration avec Ivette Jiménez de Báez et Edith Negrín
– Reflexiones Junto a tu Piel (Réflexions sur ta peau), poèmes d’exil, Collection Portobelo, Éditions Signos, Mexico. D.F.,1982
– Manual de iniciación literaria (Manuel de d’initiation littéraire), utilisé dans l’enseignement secondaire au Panama, Éditions Librairie Culturelle de Panama, MONFAR et Lemania, 1983
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Pour citer ce texte
Maggy de Coster,« Diana Morán : panaméenne, universitaire et poète de l'exil», Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Premiercolloque international & multilingue de la SIÉFÉGP sur « Ce que les femmes pensent de la poésie : les poéticiennes », mis en ligne le 14 août 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/diana-moran-poete.html
Mokhtar El Amraoui,« Femmes ! »& « Les cris d'une rebelle», Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°8 Supplément sur « La maladie et la vieillesse en poésie » sous la direction de Françoise Urban-Menninger, mis en ligne le 14 août 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/
Les personnes trans sont discriminées par la CPAM 29 : nous appelons à la mobilisation des partenaires locaux et nationaux, associations, collectifs et individu.e.s trans et allié.e.s. afin de dénoncer cet état de fait !
Ouest Trans vient d’apprendre la réponse négative à la procédure de recours entamée par l’un de ses adhérents. Après une rencontre peu satisfaisante ayant eu lieu au printemps avec l’association, la CPAM 29 fait toujours preuve d’un manque de volonté manifeste à améliorer l’accès aux soins des personnes trans et à s’engager contre les discriminations au sein même de leur propre administration et à simplement assurer le respect des droits de leurs assuré.e.s.
La CPAM du Finistère vient en effet de légitimer (en recours) une demande d'entente préalable pour une mammectomie selon une procédure "exceptionnelle" qui n'a aucune existence légale et s'appuie sur un protocole non-officiel établi par le médecin conseil national et l'organisme des tutelles : cette opération n’est en aucun cas soumis à entente préalable par le Code de la Sécurité Sociale.
Déjà alertée par plusieurs témoignages de refus de remboursement concernant des chirurgies de certaines personnes dans le cadre de leurs transitions, Ouest Trans a envoyé le 23 mars une lettre à la CPAM29 afin de débloquer ces situations de manière urgente. Plus d'un mois après, une réponse nous est parvenue afin de fixer un rendez-vous. Cette rencontre a eu lieu le 16 juin à la CPAM de Quimper en présence de deux des membres du bureau de Ouest Trans ainsi que du Directeur de la CPAM 29, M. Joel Quiniou et du Dr Isabelle Caprais, médecin conseil et responsable de l'échelon local du service médical.
Lors de ce rendez-vous, les réponses qui nous ont été faites sont restées vagues et insatisfaisantes, aucun engagement ne nous a été signifié et aucune preuve ne nous a été donnée d’une volonté quelconque de la part de la CPAM 29 de respecter les droits des personnes trans d'un point de vue général, ni même de débloquer les situations individuelles problématiques en cours.
Alors que des rendez-vous similaires avec les CPAM 35 et CPAM 22 avaient permis d'aboutir à un éclaircissement satisfaisant et des échanges constructifs allant dans le sens d'une véritable prise en compte des difficultés rencontrées par les personnes trans, la CPAM 29 est restée fermée au dialogue, et semble être restée sur un point de vue rigide, complètement aveugle aux réalités sociales de ses assuré.e.s.
Le Finistère , une situation « d'exception » préoccupante.
Depuis la création de Ouest Trans, nous avons pu nous rendre plusieurs fois dans le Finistère, notamment pour y tenir des groupes de parole. Nous avons été choqués par plusieurs témoignages de situations catastrophiques que peuvent rencontrer les personnes trans, à un niveau administratif mais surtout au niveau de l'accès au soin. En effet, des signalements de cas de maltraitances médicales nous ont été rapportés, ainsi que, plus globalement, de nombreux obstacles à l’accès aux soins, et à leur remboursement.
Nous rappelons que la situation géographique des personnes trans est souvent un obstacle supplémentaire dans leurs démarches, elle ne fait qu'accentuer des situations de précarité financière et renforce leur isolement, les privant ainsi d'informations sur leurs droits et de soutien communautaire mais aussi quelquefois d'une simple sociabilité sécurisante.
Face à l’urgence de la situation en Finistère, Ouest Trans appelle à une mobilisation collective afin de garantir notre accès aux soins !
Si vous rencontrez vous aussi des difficultés auprès de la CPAM 29 concernant vos droits à remboursement de chirurgies, vous pouvez saisir le défenseur des droits, individuellement ou avec l’aide d'une association de plus de 5 ans d'existence. N'hésitez pas à nous contacter pour que nous aidions dans cette démarche.
Si une demande d'entente préalable vous est demandée pour une mastectomie, n'hésitez pas à faire un recours dans les deux mois après la notification du rejet, puis à aller jusqu'au tribunal administratif si il le faut (procédure non payante).
Voir aussi le document ci-joint à télécharger et à diffuser dans vos réseaux.
Association Ouest Trans MJC La Paillette 2 rue du Pré de Bris 35000 Rennes Contact : ouesttrans@gmail.com ouesttrans.wix.com/ouesttrans
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Pour citer ce texte
L'association Ouest Trans,(texte, logo et PDF) «Ouest Trans appelle à une mobilisation collective afin de garantir notre accès aux soins !», Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n° 11, mis en ligne le 9 août 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/2017/8/lettre-ouest-trans.html
Forme d’expression traditionnelle en Haïti, la peinture décorait les églises dès le XVIIIesiècle. Les riches familles de l’époque coloniale importaient des tableaux d’Europe ou faisaient venir des peintres occidentaux sur place, d’autres envoyaient leurs esclaveslibres en France pour y apprendre la peinture et exploiter leur talent.
Après l’indépendance en 1804, le roi Christophe crée au Cap-Haïtien la première Académie de peinture haïtienne. En 1816, à l’instigation du président Pétion voit le jour une école d’Art à Port-au-Prince où viennent enseigner des peintres français. Entre 1830 et 1860, les sujets historiques liés à l’esclavage, au vodou constituent alors les sujets de prédilection des artistes peintres.
Que dire de l’apport des femmes dans la peinture haïtienne ?
D’après le critique d’art haïtien Michel-Philippe Lerebours, Clara Petit, d’origine louisianaise peintre et pianiste, fut la première femme peintre haïtienne en 1825. À la fin du XIXème siècle c’est Lorvana Pierrot, fille du président haïtien du même nom, qui co-illustra « le Serment des ancêtres », une épopée haïtienne.
Selon Mireille Pérodin Jérôme « sur près de huit cent peintres et sculpteurs recensés, quatre-vingt-dix environ sont des femmes, et seulement une dizaine sont d’origine populaire. » 1
Un autre constat : la plupart des femmes peintres qui ont fait carrière dans la peinture sont issues de la bourgeoisie et de l’aristocratie haïtiennes et ont eu l’heur de fréquenter les meilleures écoles d’art à l’étranger.
Dans les années trente, quelques femmes issues de la bourgeoisie haïtienne investissent le domaine pictural et de façon notoire, il convient de citer : Tamara Baussan, Andrée Naudé, Mme Clainville Bloncourt, Hélène Schomberg.
Par ailleurs, en 1931 et en 1937, Mme Duraciné Vaval, en son domicile privé donnait à voir ses tableaux aux couleurs locales, après avoir exposé à Paris. Jusqu’en 1939 un petit groupe de femmes peintres évoluait au Club Union et au Cercle Port-au-Princien où est convié un public sélect.
Un esprit nouveau va naître avec la création du Centre d’Art. Les femmes, quoique toujours minoritaires, se révèlent de plus en plus performantes et créatives. Cependant le 14 mai 1944, à la création du Centre d’art par l’américain Dewitt Peters, Andrée Malebranche fait figure d’exception. Trois mois plus tard, soit en août 1944, le Centre d’Art accueille le tout premier vernissage de Marie-José Nadal, alors, jeune adolescente de 13 ans et demi, qui fondera plus tard la Galerie Marassa et assurera la promotion du mouvement « Les femmes-peintres » avant de publier en 1986 une anthologie de peinture haïtienne.
De nombreuses jeunes filles comme Hilda et Clara Williams, Elvire Malebranche, Hélène Schomberg vont grossir le nombre de femmes peintres mais certaines finissent par s’arrêter à mi-chemin pour des raisons que nous évoquerons plus loin. Cependant il convient de souligner qu’elles ont tout de même fait preuve d’une grande détermination. Comme dit Edgard La Selve « Pour mériter l’estime, il ne suffit pas d’avoir fait de grandes choses mais il suffit de les avoir tentées. »
Chef de foyer, épouse et mère, la femme n’avait pas toujours eu la possibilité de faire carrière dans l’art pictural ou sculptural. Pilier de la nation haïtienne depuis l’Indépendance en 1804, elle est à la fois mère, épouse et chef de foyer et doit faire face à toute sorte d’obstacles et de préjugés. Hilda Williams, première femme sculptrice, Luce Turnier, Rose-Marie Desruisseau constituent celles que je pourrais appeler les insoumises en ce sens qu’elles infléchissent aux normes et valeurs qui prédisposent les femmes à vivre une vie convenue. Divorcées toutes les trois – deux fois pour Luce Turnier –, elles parviennent toutes les trois et en toute autonomie à réaliser leurs rêves. En effet, il a fallu attendre la fin des années quarante pour que les femmes s’engagent professionnellement dans la peinture en se taillant une part de marché aux côtés des hommes. Peintre avant-gardiste pour l’époque, Marie-Josée Nadal, choquait dans ses représentations.
Chez Andrée Naudé, c’est l’abstraction qui prévaut. Chez Michel Manuel c’est L’observation du milieu ambiant et la transcription des rythmes. Quant à Luce Turnier, peintre singulière, elle finira par s’imposer aux côtés des hommes qui n’ont pas manqué de s’inspirer de sa technique de travail à partir des fibres de coco. Elle utilisait toute une palette d’objets naturels pour vivifier ses toiles où dominent portraits et natures mortes. Au cours d’une interview qu’elle m’avait accordée de son vivant, elle m’a confié : « Ma vie d’artiste n’a pas été aussi facile que celle de mes consœurs du Centre d’Art, Madame Baussan, Madame Naudé. J’ai connu beaucoup d’écueils durant 30 ans, histoire de dire que le grand public était monté contre ce qui se passait au Centre d’Art. Après un long séjour en France, je suis revenue au pays… C’est à ce moment que j’ai trouvé un public plus favorable à ma peinture. Mes débuts, je les ai connus au milieu du mépris général, soit dit sans animosité ; je fais simplement état des faits. Maintenant je suis blindée en ce qui concerne les difficultés économiques et morales. »2
Autre femme peintre de renom. Il s’agit de parler de Rose-Marie Desruisseau. Sa peinture est axée sur la recherche et la rigueur sans pour autant verser dans l’académisme. Peinture historique, culte du terroir, imprégnation du vodou, émanation d’érotisme, usage de symboles justifiés, voilà ce qui se dégage de ses tableaux. Il convient de citer également Michèle Manuel, née en 1935 qui, depuis 1970, n’a de cesse d’exposer en Haïti aux États-Unis, en Amérique du Sud et en Europe après avoir reçu une formation à l’Academia de Dibujo y Pintura à San Juan de Porto Rico. Membre du groupe des femmes peintres, elle a eu l’honneur d’avoir en 1981 un timbre à l’effigie de ses tableaux.
En mars 2000 la ville de Paris, présentait au Musée d’art naïf de la Halle Saint Pierre une importante exposition intitulée « Haïti, anges et démons », plus de 200 œuvres et parmi celles-ci, une cinquantaine de peintures des artistes de Saint-Soleil. À cette occasion, il m’était permis, en tant que journaliste, de découvrir les toiles de Louisiane Saint-Fleurant, la seule femme peintre de Saint-Soleil, une communauté des peintres créée en 1973 à l’instigation de Maud Robard et de Serge Garoute alias Tiga, à Soisson-la-Montagne située à 50 km de Port-au-Prince. Ces peintres produisent une peinture mythique à la gloire des dieux du panthéon vodou, on dirait qu’il s’agit d’une offrande à ces dieux tutélaires.
Ces montagnards qui ne sont guère exposés aux influences de la ville, qui n’ont jamais entendu parler d’une quelconque école picturale ont su donner à admirer une peinture saisissante. Et Malraux lors de sa visite à cette communauté en 1975 parle de « l'expérience la plus saisissante et la seule contrôlable de la peinture magique du XXème siècle. »
Notons que chez cette catégorie d’artistes tout est empirique même si certains effets optiques laissent à penser à une quelconque influence néo-impressionniste. Contrairement à la peinture naïve qui est non académique et libre, cette peinture est une peinture inspirée. Si l’on en croit Malraux on pourra même parler de génération spontanée de peintres. Et pour cause, dans son ouvrage posthume L’intemporel, où le chapitre XI est consacré à ces peintres, il écrit : « Ce n’est pas courant de rencontrer une peinture dont on ne décèle ni d’où elle vient ni à qui elle parle. » 3C’est une peinture difficilement définissable qui laisse percevoir des formes, des successions de traits formant des visages, des croix, des objets, des animaux polymorphes, bref, une peinture particulière et chargée de mystères dans laquelle perdurent des zones d’ombre.
Dans cette perspective il est à se demander si le vodou participe de l’expression picturale ?
Les ethnologues se perdent en conjectures à ce propos. Selon Jacques Stephen Alexis « Le vaudou est le reflet de notre infrastructure économique arriérée, d’une civilisation de la houe et de la machette dans un monde de tracteurs et de machines perfectionnées, le reflet du caractère semi-féodal sinon tribal de notre société. Le vaudou est un opium, et s’il faut recueillir soigneusement l’apport musical, choral, poétique, chorégraphique, verbal même, en un mot, toute la symbolique artistique d’un peuple qui a mis dans le vaudou tous les trésors que dans l’ignorance où on l’a laissé, il n’a pu le mettre ailleurs. Il faut combattre ce respect fétichiste d’un certain folklorisme nationaliste et bêlant. Il faut verser un autre contenu humain, universel, dynamique dans les merveilleux moules qui recèlent toujours les aberrations religieuses et superstitieusesles plus grégaires. » 4
Et Price Mars de considérer cet art populaire comme s’inspirant du folklore en créant un art proprement haïtien. Notre propos ici n’est pas de parler des caractéristiques de la peinture naïve mais sans faire de digression nous voulons simplement souligner que la reconnaissance de la peinture naïve grâce au cubain José Gomez Sicre donne lieu à un espace discursif conférant à cet art une valeur de culture populaire authentique c’est-à-dire qui répond au projet progressiste d’un humaniste nouveau. À ce compte Jean Price-Mars résume cette peinture en ces termes : « une peinture où s’édifie la trame de notre caractère de peuple, notre âme nationale. » 5
Difficile à cerner, la peinture naïve haïtienne donne lieu à toute sorte d’élucubrations intellectuelles de la part des chercheurs. Et pour cause, Alfred Métraux y voit des allusions aux ferronneries et aux broderies du xviiième siècle français.6 Quant à Jean Kerboull, il insiste sur l’apport de la magie européenne et de la franc-maçonnerie.7 Le spécialiste Michel-Philippe Lerebours, pour sa part, y voit l’influence indirecte de l’art musulman étant donné la présence d’esclaves islamisés dans la colonie.8
Nous ne saurions conclure sans faire allusion, ne serait-ce que sommairement, aux femmes peintres issues de l’immigration. En effet, chez cette catégorie de peintres, on ne décèle pas toujours la persistance de la coloration ethnique, elles s’ouvrent plutôt à la modernité ou à l’universalité. En un mot, elles sont en phase avec leur époque ou le milieu dans lequel elles évoluent.
Notes
1 Jérôme Mireille Pérodin, Le sens d’un hommage, Haïti au toit de la Grande Arche, Port-au-prince (Haiti), Ed. Henri Deschamps, 1998.
2 Margaret Lizaire, « Rencontre avec Luce Turnier », Elles Magazine, n°1, p. 21-22, 1985.
3 André Malraux, L’Intemporel, La Métamorphose des Dieux. III, Paris, Gallimard, 1976.
4Jacques-Stephen Alexis, Contribution à la table ronde sur le folklore et le nationalisme organisée par le Cercle Trianon, le 2 janvier 1956, Optique (Port-au-Prince), juin, p. 25-34, 1956.
5 Jean Price Mars, Ainsi parla l’oncle, Compiègne (France), Imprimerie de Compiègne, 1928.
6 Alfred Métraux, Le Vaudou haïtien. Paris, Gallimard, Alfred, 1958.
7 Jean Kerboull, Le Vodou, pratiques magiques. Paris, Belfond, 1977.
8 Michel-Philippe Lerebours, Haïti et ses peintres de 1804 à 1980. Souffrances et espoirs d’un peuple. Port-au-Prince, Imprimeur II, 2 vol, 1989.
***
Pour citer ce bémol
Maggy de Coster,«L’apport des femmes haïtiennes dans la peinture», Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°7|Automne 2017 « Femmes, poésie & peinture » sous la direction de Maggy de Coster, mis en ligne le 2août 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/2017/8/haitiennes-peinture.html
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. CÉLÉBRANT LES AUTRICES EXILÉES, IMMIGRÉES, RÉFUGIÉES... LE 8 MARS DE CHAQUE ANNÉE, LE PRIX LITTÉRAIRE DINA SAHYOUNI (PORTANT LE NOM DE LA FONDATRICE DE LA SIÉFÉGP ET DE CETTE REVUE) REDÉMARRE À PARTIR DU 14 JUILLET 2025 POUR L’ÉDITION DU 8 MARS 2026....
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