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Rencontre entre
Hanen MAROUANI & Valérie ANTOINE
Propos recueillis par
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© Crédit photo : La poétesse Valérie Antoine lisant son poème pour la paix.
Valérie ANTOINE : « La poésie est un moyen de transmission universel pour partager les messages de paix. »
Entrevue
Hanen MAROUANI — Comment définissez-vous votre cheminement d’autrice/poétesse : qu’est-ce qui vous a menée à la poésie et qu’est-ce qui vous y retient encore aujourd’hui ?
Valérie ANTOINE — Mon premier contact avec la poésie c’est le cours de français au collège. On nous a donné le goût des beaux textes. Aujourd’hui c’est un moyen d’exprimer mes sentiments ou ma vision / opinion de notre monde.
(H.M) — Y a-t-il des rencontres, littéraires ou humaines, qui ont marqué votre parcours d’écriture ?
(V.A) — Oui, lorsque j’ai rencontré mon compagnon lors d’une soirée. Il était l’un des poètes invités. C’est ma première rencontre avec la musicalité de la poésie arabe. C’est lui qui m’a poussée à écrire.
(H.M) — Quels auteurs, courants ou expériences de vie nourrissent le plus votre imaginaire poétique ?
(V.A) — Actuellement, ce sont plutôt des expériences dans mon parcours personnel mais aussi des faits d’actualité. Mais ce qui me donne le plus envie d’écrire ce sont les moments partagés avec la nature.
(H.M) — Dans votre nouveau recueil, qu’est-ce qui vous tenait le plus à cœur de transmettre, et en quoi cette œuvre représente-t-elle une étape particulière de votre chemin d’écriture ?
(V.A) — J’ai eu envie de transmettre mon regard poétique sur le monde. Lorsque je me promène dans la nature ou dans la ville, il y a toujours quelque chose, un bruit, un animal, un objet particulier, une ambiance que je trouve beaux, agréables et que j’ai envie de partager. J’ai beaucoup vécu de situations de stress et c’est encore souvent le cas maintenant, mais je veux continuer à voir le beau et le partager. La poésie est pour moi la plus belle manière de le faire.
(H.M) — Quelles ont été vos principales sources d’inspiration pour ce recueil et en quoi se distingue-t-il de vos précédents ouvrages/textes ?
(V.A) — C'est mon premier recueil personnel. J’ai participé à plusieurs ouvrages collectifs sur différents thèmes.
Cet ouvrage rassemble quelques textes repris dans ces ouvrages collectifs et d’autres inédits.
Ce que je voudrais transmettre à travers ma poésie, c’est mon regard sur le monde et ce qui nous rassemble.
(H.M) — Comment souhaitez-vous que vos lecteurs reçoivent ce recueil : comme une confidence personnelle, un manifeste poétique, ou une ouverture vers l’autre ?
(V.A) — Un peu des trois… certains textes sont des confidences, d’autres des textes poétiques plus engagés, mais il y a toujours une ouverture à l’autre.
(H.M) — Quels ont été les principaux obstacles rencontrés lors de la publication de ce recueil, et comment les avez-vous surmontés ?
(V.A) — L’argent. Sans hésitation. J’ai dû attendre avant de pouvoir financer ce recueil.
(H.M) — Pensez-vous que les défis liés à la publication de la poésie renforcent, d’une certaine manière, la conviction de l’auteur dans sa démarche ?
(V.A) — Je ne sais pas, je crois que c’est plutôt décourageant. Mais ce qui me pousse, c’est vraiment cette envie de partager.
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© Crédit photo : Des exemplaires du recueil intitulé « Du bout de ma plume » de la poétesse Valérie Antoine.
(H.M) — Dans quelle mesure l’édition indépendante ou alternative peut-elle représenter une solution pour les poètes d’aujourd’hui ?
(V.A) — Je pense que dans le monde littéraire il y a d’un côté trop d’offre de textes et un public qui se tourne de plus en plus vers le support dématérialisé, ce qui rend les éditeurs encore plus sélectifs qu’auparavant. Et il y a donc beaucoup d’auteurs qui ne sont pas édités. L’autoédition permet des petits volumes, plus accessibles, faciles à gérer par l’auteur lui-même. Le désavantage, c’est qu’on ne profite pas d’un réseau très étendu.
(H.M) — Quel rôle accordez-vous à la promotion et à la médiation culturelle (lectures publiques, réseaux sociaux, résidences) dans la diffusion de votre œuvre ?
(V.A) — Pour moi, les lectures publiques, festivals sont ma première source de transmission de mes poèmes. Je suis moins présente sur les réseaux sociaux mais je vais m’y remettre. Je n’ai pas encore fait de résidence.
(H.M) — Pouvez-vous nous dire comment est née l’idée de préparer des anthologies sur la paix et quelle en est la vision directrice ?
(V.A) — L’idée de cette anthologie est venue lors d’un voyage. Je participais avec mon collègue Valéry à un festival de poésie. Valéry est russo-ukrainien. La guerre venait de commencer et pour beaucoup c’était une déchirure, pris entre leurs deux pays. Nous est alors venue l’idée de proposer à nos amis poètes de partager un texte sur la Paix. Ils ont été près de 150 à répondre à notre appel. C’était vertigineux. Rien que de l’évoquer j’en suis émue. Notre idée était de publier les textes dans la langue d’origine et leur traduction en français, anglais ou néerlandais.
Nous avons dû y renoncer car nous avions trop de textes.
(H.M) — Quels critères guideront vos choix de textes et d’auteurs afin de donner une voix plurielle à cette thématique universelle ?
(V.A) — Le seul critère, c’est le respect de l’autre. Nous refuserons uniquement les textes trop agressifs ou discriminatoires. Nous tenons à garder une certaine nuance dans le propos.
(H.M) — Souhaitez-vous ouvrir ce projet à une dimension internationale, en intégrant des voix issues de différentes cultures et langues ?
(V.A) — C’était le cas pour la première anthologie et c’est encore le cas pour celle-ci. Les poètes viennent de différentes cultures.
(H.M) — Selon vous, quel rôle concret la poésie peut-elle jouer dans la construction ou la préservation de la paix, à une époque marquée par tant de fractures ?
(V.A) — La poésie est un moyen de transmission universel pour partager les messages de paix. Il faut la partager, la laisser circuler au maximum pour qu’elle ait un impact sur les gens. Favoriser la culture, lui donner tout l’espace dont elle a besoin, est certainement le meilleur moyen de préserver une paix durable. Le problème est que l’on néglige bien souvent la culture, particulièrement en politique.
(H.M) — Comment concilier la diversité des esthétiques poétiques avec une unité thématique aussi essentielle que celle de la paix ?
(V.A) — Je pense que la paix est certainement la thématique qui permet de concilier la diversité des esthétiques poétiques, particulièrement lorsque l’on s’inscrit dans une démarche de diversités culturelles et linguistiques.
La poésie est difficile à traduire et ne peut donc s’adapter aux exigences des poésies trop classiques. Ce qui rime en français ne rime pas forcément en anglais ou en chinois... Il faut donc être ouvert à une poésie plus libre.
(H.M) — Voyez-vous la poésie comme un espace de résistance, d’espérance, ou comme une manière de relier les êtres au-delà des frontières ?
(V.A) — La poésie est tout cela en même temps. Elle peut être révolte, espoir ou désespoir, bonheur ou colère ; et elle est universelle. On la retrouve dans toutes les cultures.
(H.M) — Enfin, comment aimeriez-vous que vos lecteurs — à travers vos recueils ou ces anthologies — prolongent votre démarche et participent eux-mêmes à ce dialogue de paix ?
(V.A) — Je pense que le meilleur moyen de prolonger notre démarche, c’est de la partager. Utiliser nos recueils et partager nos poèmes dans les activités culturelles, les écoles, partout où ils peuvent faire écho.
Bruxelles le 04.10.2025
© Hanen Marouani, octobre 2025.
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Pour citer cet entretien illustré & inédit
Hanen Marouani, « Rencontre entre Hanen MAROUANI et Valérie ANTOINE », Le Pan Poétique des Muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : AUTOMNE 2025 | NO IV « LE MAL DE VIVRE DANS LA MORT VOLONTAIRE DES ARTISTES DE SAPHO À NOS JOURS » sous la direction de Francoise Urban-Menninger & Revue Orientales, « Libres », n°5, volume 1, mis en ligne le 10 octobre 2025. URL :
https://www.pandesmuses.fr/periodiques/orientalesno5/2025noiv/hm-valerieantoine
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