Événements poétiques | Recueil numérique du festival « Le Printemps des Poètes » | Poésie contemporaine
Dans la marge d’un horizon ébouriffé
(extraits)
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Crédit photo : Mimosa Pudica, image Wikimedia, Commons, domaine public.
Cette voix venue d’un temps pas si lointain et d’un autre espace presque connu, qui joue en boucle, remplace l’écho qui s’est tu. Cette voix qui cherche des réponses d’horizon en horizon. De mur du son en mur du son. Et moi, j’écris sur les pétales des églantiers le vide et le trop-plein. J’écris sur l’effilochage des nuages gorgés d’eau. J’aurais dû compter les tentacules d’argent de l’astre d’hiver alors qu’il faisait encore scintiller les cristaux de givre. J’aurais dû.
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Je suis le dernier fantôme à hanter les lieux. Tout s’est dissipé dans les brumes d’automne, pluies d’été, tornades de poudreuse et parfums éventés de renouveaux oubliés. Tous s’en sont allés vers d’autres demeures éphémères qui protègent mal des intempéries. Espaces de rêves incommensurables. Ainsi errent les loups solitaires entre les doigts verts des forêts et des prairies ondoyantes. Les draps transparents qui m’habillent battent dans le ruissellement de la pluie et la mémoire des pierres.
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Nos aubes se ressemblent-elles ou s’agit-il simplement d’un parfum fluvial qui s’amuse à nous enivrer? Les cailloux semés sur le chemin se sont accumulés au bas de la côte et s’amoncellent un peu plus à chaque déluge. Tant de larmes ont été versées, tant d’adieux murmurés. Tout cela pour un envol aux lourds sabots aveuglés par des joies sidérales. Parce que l’amour est un leurre qui jamais n’ôte son masque.
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Quand le désespoir dans un grand fracas s’enroule autour des doigts et que le souvenir de visages et d’instants menace de s’estomper, c’est là que j’ai envie de rôder comme une louve. D’arpenter des immensités jusqu’aux confins du cosmos. Comme si les étoiles allaient se mettre à tinter, chœur de la nuit, beauté séraphique enfin non trompeuse sur les lèvres d’un gouffre.
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Rayon de lune ou volcan assoupi, cette lueur tremblotante sur le fil de l’horizon. Au loin, une barque est prise dans les glaces de l’indifférence et mon pouls cherche à reprendre son souffle. J’oublie le grain glacé sur les galets quand le couchant se drape de rouge. Je suis une lettre oubliée au fond d’un sac postal, datée du siècle dernier. Pourtant, tous continuent de cheminer sur une planète qui fait le dos rond.
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En équilibre sur la lisière de la réalité, j’écoute quelques arpèges qui épousent le rythme du vent. Mieux vaut effacer certaines traces de mémoire quand la figure de proue n’est plus que givre sur une ligne d’horizon hypnotisante. Qu’emporte-t-on dans le voyage que l’on voudrait sans retour? À tire d’ailes par-delà les châteaux de cartes, puisqu’il faudra bien vivre la fin du monde loin les uns des autres.
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© M. L Jacquot
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Pour citer ces poèmes en prose
Martine L Jacquot, « Dans la marge d’un horizon ébouriffé (extraits) », Le Pan Poétique des Muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique / Festival Le Printemps des Poètes Mars 2022 | « L'éphémère aux féminin, masculin & autre », Recueil collectif des périodiques féministes de l'association SIÉFÉGP, mis en ligne le 3 mars 2022. Url :
http://www.pandesmuses.fr/ephemere/mlj-horizonebouriffe
Mise en page par David Simon
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