11 février 2023 6 11 /02 /février /2023 17:00

N°12 | Poémusique des femmes & genre | Chroniques de Camillæ | Revue culturelle d'Europe 

 

 

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Le film : Tàr

 

 

 

 

 

 

Camille Aubaude

Sites officiels : http://www.camilleaubaude.com/

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Blog officiel : https://camilleaubaude.wordpress.com/


 

 

 

Tàr est une leçon de droiture, et l’on en sort la tête haute, rétablie dans sa féminité d’exception, dont l’élan, la vivacité suscitent hélas la jalousie. C’est un film qui démontre le manège de la culture dominante virile, porteuse de destructio

La blonde actrice est au début très formatée afin que la narration s’enclenche. Elle ne nous lâche pas, cette personnalité célèbre féminine reconnue pour ses compétences : Lydia Tàr. La fascination se poursuit sans faiblir pendant 2h30, malgré des scènes dures. Cette violence rythme une bande-annonce qui occulte un des intérêts majeurs du film : explorer à fond l’amour pour la musique. La « bio » de cette cheffe transgenre est révélée à sa juste mesure, avec la dépression qui escorte un immense talent, et, en toile de fond l’Amazonie devenue une référence omniprésente.

 

Les rapports lesbiens sont toujours présentés par les hommes de la même façon (voir le film de Brian de Palma). Le discours sur l’art ne déroge pas non plus à une affèterie de circonstance. Je ne peux la qualifier d’« académique», car elle est le fruit des cours d’écriture de scénarios, et cela vaut peut-être mieux qu’un relâchement organique, lui aussi devenu assez commun. Par bonheur, ça prend, ça nous prend. Dans les scènes qui se succèdent, la chanson de Lydia à l’accordéon pourrait presque sortir des cadres, comme une chanson de L’Opéra de Quat’sous. Elle chante en réponse aux prédateurs de l’immobilier, des harceleurs in domus. C’est un de ces beaux événements de frénésie qui rendent ce film aussi léger qu’un songe.

 

Ce cadre puissant des techniques médiatiques inclut forcément le parcours de la gloire à la décadence — illustré par le « Loup de Wall Street ». Les luxueux intérieurs modernes ne sont pas épanouissants. Puis c’est forcément la déchéance dans un Tiers Monde qui montre que les évasions dans cette réalité signifient justement la déchéance. Parmi toutes les exactions que l’on peut pratiquer à l’encontre d’une femme d’exception, la trahison des proches, comme la secrétaire privée, est ce qui inspire le grand dégoût. La duplicité et l’infidélité des jeunes que l’on adoube (telle la violoncelliste russe) sont à la mesure de leurs turpitudes.

 

Puisqu’il en faut encore plus pour contrebalancer le talent, il y a les coups bas entre collègues (et rivaux), il y a la diffamation, les fausses accusations devant des juges zélés qui laissent leurs sentes de souillure, sachant qu’à long terme les accusations mensongères sont toujours un mauvais calcul, car il y aura toujours quelqu’un pour démasquer les tyrans envieux. Le film ne montre pas la pire chose que l’on peut faire à une femme, le viol en réunion. La grosse machine médiatique qui met au ban de la société une artiste jalousée suscite l’émotion de l’ange déchu. Lydia Tàr est détestée par ceux qu’elle rejette, et qui se vengent au moyen d’une justice qui ne devrait plus porter ce nom. Pétra, la petite fille du couple de musiciennes, énonce à Lydia la simple vérité : « Je n’ai jamais rencontré une personne aussi belle que toi ».

Un manichéisme habillé de thèmes en vogue sert de corset à cette histoire voluptueusement inquiétante. La force intellectuelle de l’héroïne accompagne le sentiment que rien ne peut se dérouler autrement parmi les ingrats, les lâches, les malfaisants, dont les valeurs dénient la femme d’exception. Dès le début, la référence au Pérou par un chant a capella des peuplades primitives, annonce la nécessité d’arrêter l’écocide qui a lieu sous nos yeux. La louable intention de ne pas voir disparaître les peuples amérindiens revient à la fin du film. Alors que soixante pour cent des espèces vivantes ont disparu, quels seraient les moyens d’agir ? La musique féminine ⸮ Elle mène à la solitude, l’exil et la folie.

 

 

© Camillæ

 

 

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Pour citer ce texte inédit

 

Camille Aubaude, « Le film : Tàr »Le Pan Poétique des Muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°12 | HIVER 2022-23 « Poémusique des Femmes & Genre », mis en ligne le 11 février 2023. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no12/aubaude-lefim-tar

 

 

 

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