REVUE MDV | N°3 | Célébration | AS | Spicilège & Événements poétiques | Festival International Megalesia 2023 | I. Anthologie « Étrangères »
L'étrangère
Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)
Poème choisi, transcrit avec un commentaire & une photographie (prise) par Dina Sahyouni
© Crédit photo : Portrait de Marceline Desbordes-Valmore jeune, dessin photographié (pour cette revue par DS.) de ses Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore 1819-1833, Idylles, Élégies, Paris, Alphonse Lemerre éditeur, MDCCCLXXXVI) ouvrage poétique tombé dans le domaine public.
Ce poème magnifique témoigne des difficultés sociales que rencontrent les femmes en général et les dites « étrangères » en particulier. Il contient deux licences poétiques de versification, la première se trouve dans le vers « Il n'a rien dit... mais je le voi ! » où le verbe voir est conjugué sans « s » à la première personne au présent de l'indicatif, quant à la deuxième, elle apparaît un peu plus loin dans la dernière strophe au vers « Quelle main essuira les larmes », le verbe essuyer est conjugué sans « e » après la lettre « i » à la troisième personne du singulier au futur de l'indicatif.
Ah ! que le monde est difficile !
Hélas ! il n'est pas fait pour moi.
Ma sœur, en ton obscur asile,
J'étais plus heureuse avec toi !
On m'appelle ici l'étrangère ;
C'est le nom de qui n'a point d'or.
Si je ris, je suis trop légère ;
Si je rêve... on en parle encor !
Si je mêle à ma chevelure
La fleur que j'aimais dans nos bois,
Je suis, dit-on, dans ma parure,
Timide et coquette à la fois ;
Puis-je ne pas la trouver belle !
Le printemps en a fait mon bien ;
Pour me parer je n'avais qu'elle ;
On l'effeuille... et je n'ai plus rien !
Je sors de cet âge paisible
Où l'on joue avec le malheur.
Je m'éveille, je suis sensible,
Et je l'apprends par la douleur !
Un seul être à moi s'intéresse ;
Il n'a rien dit... mais je le voi !*
Et je vois même, à sa tristesse,
Qu'il est étranger comme moi.
Ah ! si son regard plein de charmes
Recèle un doux rayon d'espoir.
Quelle main essuira* les larmes
Qui m'empêchent de l'entrevoir ?
Soumise au monde, qui m'observe,
Je dois mourir, jamais pleurer !
Et je n'use qu'avec réserve
Du triste droit de soupirer !
L'extrait ci-dessus provient du recueil de poèmes, tombé dans le domaine public de DESBORDES-VALMORE, Marceline (1786-1859), Poésies [de Mme Desbordes-Valmore], Troisième édition, Paris, François Louis (libraire, rue Hautefeuille, n°10), 1820, « Romances » pp.167-168.
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Pour citer ce poème de l'aïeule
Marceline Desbordes-Valmore, « L'étrangère », poème choisi, transcrit avec un commentaire & une photographie (prise) par Dina Sahyouni de DESBORDES-VALMORE, Marceline (1786-1859), Poésies... 3ème édition, (1820), Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événements poétiques | Festival International Megalesia 2023 « Étrangères », « Frontières du vivant », « Lyres printanières » & Marceline Desbordes-Valmore | Revue annuelle, internationale, multilingue & poéféministe (poefeminist), « Les couleurs dans les œuvres des autrices Desbordes-Valmore », n°3, mis en ligne le 5 mai 2023. URL :
http://www.pandesmuses.fr/periodiques/mdv/no3/megalesia23/mdv-etrangere
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