N°11 | Parfums, Poésie & Genre | Critique & réception | Astres & animaux
Anne-Lise Blanchard
Ce chant étroit
Interventions À Haute Voix,
2003, 56 pages, 9€
Crédit photo : "Young woman charming the fish", domaine public, Wikimedia.
Ce chant étroit se subdivise en trois parties : L’épaisseur du silence, Chaussés de vent et Le bleu incendié.
Ce chant, limpide et dépouillé, semble venir des profondeurs d’une âme recueillie. Fait « mots tressés d’ombre et de vacarme », il s’élève comme des pétales de rêves labellisés par l'éloquence du silence et même « Les murs font silence ». Effrayant et saisissant constat. C’est l’éternelle présence de la mer sous quelque forme que ce soit qui supplée à la mère consolante :
« J’appelle la mer
de sable de cailloux
d’écume et d’ailleurs
passent
les grands vaisseaux d’encre
sur ce papier de soie
bleue
– Alger Marseille sans retour-
rendu au silence »
Un silence contagieux qui s’est généralisé jusqu’à gagner les forces vives de la nature tels les arbres dont on n’entend plus le bruissement des feuilles sous l’emprise du vent ni les mélodies des oiseaux qui égayent la nature.
« De matin le ciel
a pris l’épaisseur du
silence
les oiseaux les arbres
les jeux d’eau
se sont tus
et
c’est comme si toute la nature
se mettait en congé
de l’opiniâtre été »
Il nous semble que la poète a le don de la perception de l’in-vu aussi nous éclaire-t-elle :
« Dans les yeux du chat
la présence de l’eau
la patience du monde »
Tout est dit en peu de mots. Indubitablement l’eau recèle la mémoire du monde donc elle demeure partout présente.
Elle verse aussi dans l’observation scrupuleuse de la montagne généreuse et protéiforme qui accueille la végétation et s’offre en pâture aux animaux.
« La montagne
sa cotte de velours ôtée
quand l’écorce se craquèle
laissant place
au vif verdoyant »
Elle abreuve des calices de pluie, disparaisse sous la neige, affronte de violentes tempêtes mais elle demeure « cet espace redessiné »
Anne-Lise Blanchard est en osmose avec les êtres de la nature, elle est fascinée par les étendues, l’immensité, les odeurs, les couleurs, les formes. Éprise de liberté, elle se laisse porter par sa curiosité qui la pousse à entrer en interférence avec les choses vues.
Chez elle, les mots s’étirent sans fioriture à l’infini et se déposent comme des caresses veloutées sur les aspérités de la vie. Et l’espoir naît de la liberté qui naît de la lumière.
© Maggy DE COSTER
***
Pour citer ce texte inédit
Maggy De Coster, « Anne-Lise Blanchard, Ce chant étroit, Interventions À Haute Voix, 2003, 56 pages, 9€ », Le Pan Poétique des Muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°11 | ÉTÉ 2022 « Parfums, Poésie & Genre », mis en ligne le 26 août 2022. Url :
http://www.pandesmuses.fr/no11/mdc-blanchard-cechantetroit
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