N°13 | (Auto)Portraits poétiques & artistiques des créatrices | Dossier majeur | Florilège / Muses & féminin / Muses Symboliques |Voix-Voies de la sororité
En sororité
Poème de
Portrait pictural par
Poème choisi, transcrit, légèrement rectifié, titre modifié, avec un commentaire & un portrait photographique par Dina Sahyouni
![](https://image.over-blog.com/sqZiohkzu8CrE7njb7ifTVycs1E=/filters:no_upscale()/image%2F1507988%2F20230705%2Fob_27563e_louisecolet-copie.jpg)
© Crédit photo : Adèle Grasset, "Portrait de Louise Colet tenant sa fille peinture à l'huile du XIXème siècle. Ce tableau de trouve au Musée Granet, image réalisée par DS.
L'extrait poétique ci-dessous provient de l'ouvrage – tombé dans le domaine public – de COLET, Louise (1810-1876), Ce qui est dans le cœur des femmes : poésies nouvelles ; [par Mme Louise COLET] suivies du Poème sur La colonie de Mettray, Couronné par l'Académie française dans sa séance du 19 août 1852, Paris, Librairie nouvelle (Boulevard des Italiens, 15, en face de la Maison dorée), 1852, pp. 63-65.
Cet extrait contenant une note s'adresse à madame Roger-Valazé et constitue une sorte de poème gnomique à l'attention des femmes par une femme ayant une certaine experience et un certain savoir dans le domaine de la condition féminine. Le poème sert ainsi du support moral décrivant la nécessité d'établir une solidarité et une entraide entre les femmes en matière de vie et d'éducation sentimentales. Tout le poème décrit ce que l'on qualifie de "sororité" ou de vie sororale qui protège une femme de se livrer corps et âme à un homme qui en usera, en abusera à sa guise et sans réserve.
Par ailleurs, l'avertissement de Louise Colet est clair : une femme ne doit confier tous ses ennuis ou ses secrets qu'à une femme qui peut la comprendre sans la juger et jamais confier tout son for intérieur à un homme.
En fait, ce poème est un portrait poétique de la sororité comme une voie nécessaire de conduite sociale et sentimentale des femmes.
Le poème est composé en deux parties I et II, la première partie se développe en cinq strophes, quant à la deuxième, elle ne contient que quatre, ce qui donne neuf strophes au total et l'on sait que le nombre neuf symbolise entre autres les neuf Muses qui sont des sœurs... Chaque strophe se forme en un quatrain, mais je m'arrête là et vous laisse apprécier par vous-même cher lectorat ce portrait poetiquement gnomique. Bonne lecture !
© DS., juin 2023.
Titre original :
À Madame Roger-Valazé1
I
À notre fille, à notre mère,
À notre amie, à notre sœur,
À toute femme aimante et chère
Livrons sans voile notre cœur.
Mais à l'homme qui nous captive,
Qu'il soit amant, qu'il soit ami,
Dans nos pudeurs de sensitive,
N'ouvrons notre cœur qu'à demi.
Car il a ses secrets de honte,
Drame occulte, vie en-deçà.
De vos douleurs nous rend-il compte,
Ô pauvres sœurs qu'il offensa !
Comment espérer qu'il se lie
Au cœur qui chaste s'est donné,
Lui dont l'âme garde la lie
De tout un passé profané !
Nos flammes tombent étouffées
Dans des cendres d'où rien ne sort ;
Nos fleurs vivantes sont greffées
Sur l'aridité d'un bois mort.
II
Voilà ce qu'à toutes murmure
La secrète voix des douleurs ;
Mais à celle de la nature
Nous sourions malgré nos pleurs.
Sitôt qu'un regard la pénètre,
Sitôt qu'un désir l'attendrit,
La femme abandonne son être,
Son amour soumet son esprit.
Son cœur trahit sa conscience,
Sa faiblesse éteint sa fierté ;
Son éternelle déchéance
Se revêt de félicité.
Et, dans sa force reconnue,
L'homme resserre, triomphant,
Le servage qui continue
Pour la femme toujours enfant.
1852.
Note
1. Petite-fille de l'illustre girondin.
***
Pour citer ce poème féministe de sororité & solidarité entre aïeules & ce portrait pictural peint par une aïeule
Louise Colet, « En sororité », poème choisi, transcrit, légèrement rectifié, titre modifié, avec un commentaire & une image par Dina Sahyouni de COLET, Louise (1810-1876), Ce qui est dans le cœur des femmes : poésies nouvelles ; suivies du poème sur La colonie de Mettray... (1852), portrait pictural de Louise Colet tenant sa fille par l'artiste Adèle Grasset, Le Pan Poétique des Muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°13 | PRINTEMPS 2023 « (Auto)Portraits poétiques & artistiques des créatrices », mis en ligne le 5 juillet 2023. URL : http://www.pandesmuses.fr/no13/louisecolet-ensororite
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