Lettre n°15 | Eaux oniriques... | Critique & réception | Poésie & musique | Muses au masculin
Une trilogie poétique pour un ténor
à la voix d’airain : Jonas Kaufmann
© Crédits photos, Couvertures illustrées de la trilogie poétique pour Jonas Kaufmann.
Mélomane accomplie, Christine Chatillon a rendu un hommage bien mérité au ténor allemand Jonas Kaufmann dans une trilogie poétique : « La plume et la colombe », « La voix d’airain » et « Au cœur du chant » BOD, 2020.
© Crédit photo, Couverture illustrée du dernier volet de la trilogie poétique pour Jonas Kaufmann.
Ténor à la voix exceptionnelle, Jonas Kaufmann n’est pas moins inspirant. Aussi se fait-il « colombe » sous la plume de Christine Chatillon, émerveillée par sa voix inégalable. L’auteure se réfère à la signification de son prénom voulant dire : « colombe » en hébreu. Aussi considérait-elle le ténor comme une épiphanie, comme un insondable mystère. Dans « La plume et la colombe » (p. 53), nous lisons :
Cette voix m’appela comme un commencement,
Un cristal noir venait briser ma chrysalide ;
Un souffle me portait, j’étais une sylphide…
De cette belle voix, je naissais lentement.
Le lyrisme de la voix de ce prodige tombé du ciel induit la ferveur de l’âme de la poète et elle le mystifie si bien qu’elle semble le comparer au personnage biblique du même prénom, aussi s’exclame-t-elle encore dans « La plume et la colombe » (p. 25) :
Jonas, héros biblique au doux nom de mystère
Jonas, qui ignore être Muse de mes vers…
La force de ses mots est manifeste. Elle dénote la profondeur de la voix du ténor que la poète radiographie à l’aide de ses alexandrins.
Le ténor possède cet art phénoménal qui sait déclencher chez cette admiratrice des cascades d’émotions qu’elle consigne dans un poème de « La voix d’airain » (p. 24).
Lorsque la Terre chante, Jonas en est l’âme,
Car Jonas est larmes, Jonas en est cri.
Mes pleurs sur mon visages coulent sans un bruit :
Mahler ressuscité revient en une flamme.
C’est la voix d’un messie tant attendu, d’une icône, objet de vénération emplissant l’âme de la poète, colmatant les brèches laissées par les jours moroses. Et encore dans « La voix d’airain » (p.55), elle avance :
Il est né, cet Élu que la vie attendait.
Jonas nous offre l’or du héros, et de fait,
Dans nos cœurs bat son chant comme en une amulette.
Il est ce « singulier chevalier » qui nous offre le Graal de la musique par sa voix d’airain de ténor unique en son genre.
Le dernier volet de la trilogie, intitulé « Au cœur du chant » est en quelque sorte le reflet de ces temps troublés où les concerts en public sont annulés et remplacés par des concerts virtuels sans public. La mélomane est en empathie avec le ténor confiné donc réduit au silence. Elle exprime son ressenti, son manque, manque qui aiguise quand bien même sa créativité. Manque que laisse cette voix amie qui la berçait d’espérance (p. 44) : « Jonas, ton chant nous manque inévitablement ! » Subjuguée par cette voix qui la faisait renaître indéfiniment et réduite au silence, elle lance (p.50) :
Lorsque ta voix chante, elle mène aux confins
D’un monde qui se tait.
Ou encore :
J’en appelle à Jonas, j’en appelle à la beauté
De sa voix de velours, qui réchauffe les cœurs
À la page 56 nous pouvons aussi lire :
Voici venu le temps du manque insupportable
Le corps dont l’âme est faite a besoin de présence,
Lui qui, pour préserver sa mystique constance,
Est prêt aux longs voyages, qui maintiennent stable
Christine Chatillon ne tarit pas d’éloges pour son ténor favori aussi le pare-t-elle de tant de qualificatifs comme : « maître chanteur », « phénomène puissant », « précieux oracle », « singulier Tabernacle ».
Christine Chatillon évoque dans cette trilogie un ténor hors norme et met en évidence la complétude de son art.
***
Pour citer ce texte
Maggy De Coster, « Une trilogie poétique pour un ténor à la voix d’airain : Jonas Kaufmann », recension inédite, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n° 15 « Eaux oniriques : mers/mères », mis en ligne le 27 janvier 2021. Url : http://www.pandesmuses.fr/lettre15/mdc-trilogiepourkaufmann
Mise en page par David Simon
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