Poèmes |
À toi
&
Chère levantine…
|
Ahmed Hafdi |
À Françoise Urban-Menninger,
en signe d’amitié et de haute considération
Chère levantine…
Aujourd’hui, je t’écris Ghada, j’ai hâte d’avoir de tes nouvelles, si tu es encore en vie. Ici, les gens se croisent sans se saluer, sans poser un regard sur vous ; oui, juste un léger regard qui vous procure cette sensation que vous existez… Suis-je transparent ? Peut-être ! Ils ne marchent pas ; ils courent tellement ils n’ont plus le temps. Vers où ? Je n’en sais rien. Te rappelles-tu ? Près du Tigre, je t’avais croisée ce jour-là, avant le dernier déluge. Nous avions joué à l’homme et à la femme, glané quelques galets, par-ci, par-là, bâti notre maison, un rectangle enchanté. Nous avions ri aux éclats profitant de cette fraîche brise léchant la surface de l’onde. Tu t’amusais à lancer des cailloux vers l’onde ruisselante, des cercles se formaient, et tu as commencé à les compter un, deux, trois… Puis rien, hormis l’écho enchanteur d’Erbil, du Mont-Liban qui chatouillait nos oreilles. L’enivrent maqâm ensorcelant de Farida nous transportait dans des contrées lointaines et indescriptibles !
***
À toi
À
Toi
Chère levantine
De l'auguste cèdre sublime
Cette douce clameur divine
Ô !
Levantine
Marine
Aux multiples vertiges
De lait et de miel
C'est là entre terre et ciel
Que l’homme peut encore s’habiller de lumière
À
Toi
Ghada
Mayada
Aïda
Aux yeux palpitants comme une liqueur
Éclairant encore les chemins de l'Orient
Ô !
Ghada
Fille du soleil
J’irai par ce chemin incertain
Humer, sentir la rosée du matin
Précieuse parure des vallons
Nul compagnon, seule ma passion
Bruit des pas de mon cœur
Peux-tu m’offrir une lueur ?
Sous ce gris ciel, j’ai perdu mon chemin
Éclaire de tes yeux ce reste de jour orphelin
Notre amour ne dure qu’un printemps
Divine, douce Ishtar de l’Orient
Ô
Muse de l’auguste Orient
Reine de Phénicie
De Mésopotamie
Au portail du levant
Traversant le firmament du Liban
Le berger égaré suit toujours ton sillon
J’ai suffisamment mordu dans la poussière
Des rayons pourpres de l'aurore
À Uruk, à Karbala, près des tablettes millénaires,
Tu m’as fais revivre les gloires de l’enfant téméraire
Accompagne-moi près du somptueux cèdre sublime,
Là je serai un homme,
Là j’oserai être.
Après la fonte des neiges,
L’hiver reculera derrière les montagnes
Et posera un dernier regard
Sur les paisibles collines voisines
Viens donc Ghada !
Nous irons aux portes du ciel
Là où la nuit cogne la montagne
Caresse les âmes des enfants du soleil
Là où chaque arbre raconte sa légende
Viens donc Ghada !
Sous le sable, j’ai déposé mon rêve
Je n’ai ni la patience du palmier
Ni l’endurance du chameau
Le café du matin a perdu son arôme
Ce n’est plus comme celui d’antan
Reviens douce muse de l’Orient
Traversant l’aube de mes premiers printemps
Ô
Poète
De Beyrouth
De Baalbek
De Tripoli
De Saida
Écris ton épopée
Montre-Toi
Au soleil
Écris Marche
Marche Pour
Ne Pas
T’égarer
Ahmed Hafdi, 26 octobre 2003
Pour citer ces poèmes |
Ahmed Hafdi, « À toi » & « Chère levantine… », Le Pan poétique des muses|Revue internationale de poésie entre théories & pratiques : Lettre n°5 [En ligne], mis en ligne le 11 décembre 2013. Url.http://www.pandesmuses.fr/article-levantine-121509944.html/Url. http://0z.fr/e1hkd |
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