Texte
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Explications du poème « Totem »
de Paul TOJEAN (nom d’auteur d’Éric Guillot)
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Paul Tojean
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« Totem » est un poème-hommage dédié aux femmes. À l’origine, ce texte avait pour titre La danse du ventre ; ce nom que j’avais d’abord donné à cette pièce était relatif à la danse orientale, où se dévoilent par la volupté du corps féminin, la sensualité, la beauté, l’élégance. Je la considère comme la danse féminine par excellence et je voulais que mon poème puisse « traduire » cette « chorégraphie sentimentale » et romantique, ou transcende toute la poésie de l’Orient. Une danse poétique, élégante, ravie de finesse et de subtilité. Étant donné le caractère péjoratif que ce sens recouvre encore de nos jours, j’ai préféré Totem. Comme une grandeur, une pyramide, un totem indien, qui défie le Temps et les croyances…
TOTEM
Le ventre de la femme est un élastique
Le ventre de la femme monte et descend
Le ventre de la femme est un ascenseur
Le ventre de la femme lorsqu’il s’allonge s’étend comme du sable mouvant
Le ventre de la femme est un volcan en éruption qui s’élève des nuées et se métamorphose en fine pluie incandescente
Le ventre de la femme est perle de rosée
Le ventre de la femme est musique dans l’érotisme
Le ventre de la femme est le Rano-Raraku où naissent les moai
Le ventre de la femme est le symbole de l’altjeringa sur les terres d’Arnheim et de Groote Eyland
Le ventre de la femme est une voile qui gonfle au vent du Pacifique
Le ventre de la femme est au creuset de l’art océanien et de l’art africain
Le ventre de la femme est précieux comme un diamant
Le ventre de la femme est au cœur de toutes les civilisations
Le ventre de la femme est le totem des mythologies et des religions
Le ventre de la femme est la source des croyances
Le ventre de la femme est sacré.
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Je vais maintenant m’employer à décortiquer ce poème :
Le ventre de la femme est un élastique
Le ventre de la femme monte et descend
Le ventre de la femme est un ascenseur
Ces trois premiers vers sont relatifs à une grossesse. Le ventre de la femme « monte et descend » suivant le rythme de la respiration. « Le ventre de la femme est un ascenseur » est une redondance volontaire, afin de mieux appuyer ce qui précède et de montrer l’importance de cette évolution.
Le ventre de la femme lorsqu’il s’allonge s’étend comme du sable mouvant
Le ventre de la femme est un volcan en éruption qui s’élève des nuées et se métamorphose en fine pluie incandescente
Le ventre de la femme est perle de rosée
Le ventre de la femme est musique dans l’érotisme.
Les quatre vers suivants sont purement d’un concept érotique. Le ventre d’une femme nue allongée sur un lit me fait songer à du sable mouvant. J’aperçois le ventre qui sensiblement bouge, comme du sable, se soulève légèrement et diminue aussitôt. Le volcan en éruption qui s’élève des nuées renvoie au cycle menstruel qui représente la vie tandis que ce même ventre se métamorphose en fine pluie incandescente au moment du désir, et devient perle de rosée dans les prémices de l’amour.
Le ventre de la femme est musique dans l’érotisme évoque cette musique qui accompagne la danse orientale, dite « la danse du ventre ». Cela évoque également le plaisir, lorsque le corps « ondule et danse » et semble rythmer par une musique invisible et qui tend vers l’extase. Le féminin est musical. La femme est musique.
Le ventre de la femme est le Rano-Raraku où naissent les moai
Le ventre de la femme est le symbole de l’altjeringa sur les terres d’Arnheim et de Groote Eyland
Le ventre de la femme est une voile qui gonfle au vent du Pacifique
Voici les explications des trois vers ci-dessus, en citant directement un extrait de l’ouvrage de José Pierre, intitulé « L’univers surréaliste » in « Les Modèles fondamentaux et les précurseurs immédiats », chapitre « Au commencement était l’Océanie », (voir p. 68).
« ...à l’Ile de Pâques, dans le cratère de ce volcan éteint, le Rano-Raraku, où étaient taillées à même la pierre de lave, les gigantesques sculptures moai, érigées ensuite sur les terrasses surplombant l’océan Pacifique.../...Les véritables ancêtres spirituels n’étaient autres que ces altijiranga mitjina, les êtres éternels du rêve, dont les fabuleux exploits marquèrent, dans les déserts de l’Australie centrale, l’altjeringa, ce temps du rêve, autrement dit ce passé mythique dont la remémoration insistante aura seule permis aux peuples des Aranda, des Pidjentara et à quelques autres d’affronter, en dépit de leurs extrême dénuement, le fantastique fossé culturel de plusieurs dizaines de milliers d’années qui les sépare des Européens implantés seulement depuis trois siècles sur leur île-continent. Ce temps du rêve, qui était aussi, comme dans la mythologie des Celtes, celui de toutes les métamorphoses, règne encore en maître sur les œuvres d’art australiennes et notamment sur les écorces peintes de la terre d’Arnheim et des îles environnantes, comme Groote Eyland... Dans toute l’aire océanienne, le rêve joue un rôle de premier plan au sein de la création artistique, où il entre judicieusement en composition avec le modèle traditionne... transmis de génération en génération... ».
Je me suis donc inspiré de cette lecture pour la composition du poème avec les « êtres éternels du rêve » en relation avec « le temps du rêve » autrement dit, la symbolique du rêve éternel. Le ventre de la femme est une voile qui gonfle au vent du Pacifique. Mais ces « êtres éternels » je les symbolise dans le poème, par le féminin pluriel. Les femmes représentent la création et tout naturellement l’amour. Elles symbolisent l’harmonie et une vie sociale idéale et en sont garantes de génération en génération. Comme un éternel recommencement. En effet, le Rano-Raraku, ce cratère du volcan où surgissent les statues (moai) évoque ce cycle menstruel qui précède l’enfantement. La Création. Le propre de la création est inscrite dans un mouvement perpétuel ou plus exactement dans un perpétuel recommencement.
Le ventre de la femme est au creuset de l’art océanien et de l’art africain
Le ventre de la femme est précieux comme un diamant
Le ventre de la femme est au cœur de toutes les civilisations
Le ventre de la femme est le totem des mythologies et des religions
Le ventre de la femme est la source des croyances
Le ventre de la femme est sacré.
Ainsi, le ventre de la femme est de tous les continents. Universel. Il y a dans l’art africain comme dans l’art océanien, une similitude de genres, presque identiques. Ainsi, le ventre de la femme est précieux... comme un diamant. Il est représentatif dans toutes les cultures. Le ventre de la femme est au cœur de toutes les civilisations, et en devient le totem des mythologies et des religions. Mais, contrairement aux totems indiens, dédiés aux dieux, le ventre de la femme est lui-même le totem qui se dresse contre les dieux inventés par les hommes. Après avoir écrit ce poème, je me suis représenté une scène avec un chanteur et des musiciens africains. « Totem » était chanté sur les rythmes musicaux des tambours. Il y avait dans le groupe, une jeune femme qui jouait de la flûte traversière pour le passage des « êtres éternels du rêve », notamment, à partir des vers suivants :
Le ventre de la femme est le symbole de l’altjeringa sur les terres d’Arnheim et de Groote Eyland
Le ventre de la femme est une voile qui gonfle au vent du Pacifique
Cette jeune femme vêtue d’une longue robe blanche dont les boucles de sa chevelure retombent sur ses épaules nues représente la féminité. Jouant de la musique, elle est La musique. Et la musique est en elle. Elle symbolise la beauté, l’amour, l’érotisme, l’émancipation. Elle ne sera pas sans rappeler une divinité de l’antiquité grecque. Mais que dire de cette jeune femme, sinon que sa chevelure ondoie au rythme du vent et de sa musique tout comme sa robe, comme une voile qui gonfle au vent du Pacifique. La représentation scénique du poème a pour fonction de pourvoir à l’accentuation rythmique de sa lecture. En aucun cas il ne répond à une série de rituels, ni à des offrandes, mais puise ses recherches dans les richesses de diverses civilisations, telles la Grèce antique (représentée par la jeune fille) ; trois Africains représentés par Les Numides, pour le rite de la pluie et la croyance en des esprits, gardiens de lieux. La musique sera rythmique et soutenue et le chant sera marqué par des pauses après chaque vers ou portées, en mode lente ou rapide selon les passages. En donnant comme titre « Totem » j’ai voulu représenté un symbole. LE symbole sacré. Le symbole de la grandeur, de la beauté et de l’intégrité morale. Totem symbolise la femme dans mon esprit. Ainsi, le poème de par ses vers volontairement répétitifs insiste sur le ventre féminin qui symbolise l’érotisme, la beauté, mais égal ement la procréation. Ces changements biologiques sont naturellement ce mystère.
Pour citer ce texte
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Paul Tojean, « Explications du poème « Totem » de Paul TOJEAN (nom d’auteur d’Éric Guillot) », Le Pan poétique des muses|Revue internationale de poésie entre théories & pratiques : Lettre n°7 [En ligne], mis en ligne le 3 mars 2016. Url : http://www.pandesmuses.fr/2016/03/explications-totem-paul-tojean.html
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