16 décembre 2023 6 16 /12 /décembre /2023 16:57

REVUE MDV | N°3 | Célébration | DO & N° 15 | Poétiques automnales | Dossier mineur | Articles & témoignages​​​

 

 

 

 

 

 

 

 

La couleur des lieux chez Marceline

 

Desbordes-Valmore : indice du lien entre

 

le paysage & les sensations ?

 

 

 

 

 

 

 

Owen Arderiu

 

Étudiant en 1ère année de

Master Recherche & Création Littéraire,

à l'Université Paris-Saclay

 

 

 

 

© Crédit photo : Portrait de Marceline Desbordes-Valmore par Michel-Martin Drolling, peinture tombée dans le domaine public, image fournie par l'auteur de l'article. 

 

 

Notice biographique sur la poétesse 

 

 

Marceline Desbordes-Valmore, née Desbordes, en 1786 à Douai est une poétesse française. Autrice de plusieurs recueils, tels que Élégies, Marie et Romances (1819), Élégies et Poésies nouvelles (1824), Les Pleurs (1833), Pauvres Fleurs (1839) ou encore Bouquets et prières (1843), elle publia également des recueils de contes.

 

Mère de nombreux enfants qui connaîtront une mort prématurée, et notamment d'Ondine Valmore, qui écrira aussi des poèmes, suivant les pas de sa mère. Seul Hippolyte Valmore (1820-1892) lui survivra. Des critiques expliqueront, d'ailleurs, la prépondérant de l'élégie dans son œuvre par le décès de ses proches : surnommée la « Notre-Dame-des-Pleurs » par Descaves, ou encore la « Mater dolorosa de la poésie » par Sainte-Beuve, sa poésie est, notamment – et à tort – considérée comme une poétique de la douleur.

 

Reconnue et acclamée de ses contemporains (comme notamment Baudelaire, Mallarmé, Descaves ou encore Sainte-Beuve), elle est couronnée par l'Académie Française, en 1857, pour la « moralité de ses écrits ». Une « explosion lyrique » pour les uns, « le plus grand esprit féminin de [leur] temps » pour les autres, ou encore une poétesse « protestataire » pour Aragon : la poésie de Desbordes-Valmore se décline en de nombreuses gammes, qui s'inspirent à la fois de l'intériorité et du monde. Marceline Desbordes-Valmore décède en 1859, à la suite d'un cancer. Plusieurs recueils seront publiés à titre posthume.

 

 

Article 

 

 

 

Le romantisme, dont Marceline Desbordes-Valmore pose les premiers jalons dès le début du XIXe siècle, ne met pas le paysage au second plan, mais lui attribue une réelle fonction poétique, sensible et sentimentale. Chateaubriand explique, dans le Génie du Christianisme1, que « [Les Grecs et les Latins] n'ont jamais représenté nuement, comme [les romantiques], les fleuves, les montagnes et les forêts ». Ainsi, le romantisme, et plus particulièrement la poésie romantique, a ramené le paysage au premier plan. Celui-ci se définit, selon le dictionnaire Larousse, comme « une étendue de pays que l’œil peut embrasser dans son entier ». Issu de païs (paesepais) par suffixation, le paysage comporte en lui-même une dualité notable. Michel Collot précise : « Il n'y a pas d'un côté le paysage ''réel'' et de l'autre sa ''figuration'' : le propre du paysage est de se présenter toujours-déjà comme une configuration du ''pays'' ».2 Autrement dit, il n'est pas le « pays lui-même », mais une « façon de le voir », et « ne réside jamais seulement in situ, mais toujours-déjà aussi in visu et/ou in arte ».3 Cette définition du paysage permet, dès lors, de le rapporter aux sensations et aux sentiments. Puisqu'il est toujours perçu et même conçu par l'artiste, et a fortiori, par le poète, le paysage est subjectif. Collot poursuit :

Le paysage ne saurait se réduire à un pur spectacle. Il s'offre également aux autres sens [que la vue], et concerne le sujet tout entier. Il ne se donne pas seulement à voir, mais à sentir et ressentir.4

Ainsi, la multiplicité des sensations suscite des émotions, et éveille des sentiments. En effet, le romantisme évoque notamment, et toujours selon Collot :


 

Les impressions, les émotions, les rêveries suscitées par des paysages aptes à frapper fortement la sensibilité et l'imagination […] [et peint des] sites sauvages dont l'attrait mêlé d'horreur, est contemporain de la montée en puissance d'une esthétique du sublime.5


 

Des poètes majeurs, tels que Du Bouchet, Bonnefoy ou Jacottet, et avant eux les poètes romantiques du XIXe siècle, ont fait du paysage un motif privilégié de la poésie. Marceline Desbordes-Valmore, poétesse à laquelle s'attachera notre réflexion, ne déroge pas à la mise au centre – bien plus qu'une remise au centre – du paysage, et lui donne une importance toute particulière. Pionnière du romantisme, par la force d'une poésie de l'intime, faisant résonner l'intériorité et son environnement, elle utilise la nature, et partant le paysage, pour dépeindre une réalité intérieure et subjective.

 

Ainsi, la nature et le paysage sont vecteurs de sentiments. Cette observation, quoique justifiée, pose néanmoins une question sous-jacente : par quels moyens les sentiments sont-ils transmis ? En effet, dans la poétique de Marceline Desbordes-Valmore – comme chez nombre de poètes et poétesses romantiques – lieux et paysages jouent un rôle prépondérant dans cette mécanique de transmission. Ne se limitant pas aux motifs constituants des lieux et paysages poétiques, la diffusion des sentiments et sensations semble pouvoir passer par les couleurs de ces mêmes espaces. Certes, les paysages offrent une multitudes de possibilités perceptives via les sens, mais la vue, et partant les couleurs, en sont, souvent, les principaux vecteurs6. Certains théoriciens des arts voyaient dans les couleurs le moyen de susciter des sentiments et des pensées, et a fortiori, de les exprimer. Charles Blanc écrivait :

 

Les couleurs et les formes sont, pour ainsi dire, les voyelles et les consonnes du silencieux langage que nous parle la création, et ces deux termes se réunissent dans la lumière, qui nous fait comprendre les formes et qui nous fait voir les couleurs, en donnant aux unes leur relief, aux autres leurs qualités et leurs nuances. […] Avant que le disque du soleil soit visible à l'horizon, l'aurore ouvre un écrin de couleurs […] de telle sorte que […] notre œil peut aller de la blancheur de l'aube au noir de la nuit, en passant par le jaune d'or, l'orangé, le vermillon, le pourpre, le violet et ce bleu sombre qui confine aux ténèbres. […] Ce n'est pas arbitrairement que nous trouvons de la gaieté dans la lumière, du mystère et de la mélancolie dans l'incertitude des ombres, de la tristesse dans la nuit.7


 

Les couleurs sont, alors, un langage à part entière, permettant de transmettre un message qui n'est pas véhiculé par d'autres moyens sémantiques, et linguistiques. De la même manière que nous pouvons parler d'un « langage des fleurs », nous pouvons parler d'un « langage des couleurs ». Et Michel Pastoureau d'expliquer :

 

La couleur se définit et s'étudie d'abord comme un fait de société. […] C'est la société qui « fait » la couleur, qui lui donne ses définitions et ses significations, […] qui la décline en de multiples codes et systèmes de valeurs.8


 

Leur perception est, de fait, régie par un imaginaire collectif, partagé entre chaque individu d'une société et d'une époque donnée : la langue. Celle-ci implique une manière de percevoir la réalité par un filtre collectif, social, un habitus pour reprendre la formulation bourdieusienne : autrement dit, il s'agit d'une « matrice de perception »9. Les couleurs, dont le champ interprétatif est contenu dans le langage, concourent alors à la perception du monde, et par extension, de la nature, du paysage. Nous trouvons ainsi un premier lien entre le lieu poétique et les couleurs. De la définition du paysage proposée par Collot découle une logique interprétative et subjective, qui donne « à sentir et ressentir » et, des définitions des couleurs énoncées par Blanc et Pastoureau, une dimension significative, profondément sociale, car partagée au sein d'un système de valeurs, de codes, qui pousse également à ressentir.

 

Dans son recueil Les Pleurs, paru en 1833, Marceline Desbordes-Valmore propose justement une relation entre sentiment et paysage. Ainsi, il est possible que les paysages soient décrits d'une manière spécifique, offrant une palette de couleurs, une gamme chromatique dont le choix permet, à son tour, une gamme de sensations et d'émotions dans l'imaginaire du lecteur. Pour rendre plus saillante notre analyse des couleurs permettant, par le concours des lieux, le développement d'émotions et de sensations, nous limiterons notre analyse à deux motifs topiques de la poésie, à savoir le locus amoenus, et le locus horribilis, dont le propre est l'évocation et la sensation : les sentiments y jouent un rôle central. En effet, la nature, et le paysage, au sein de ce recueil, sont souvent traités au moyen de ces deux topoï littéraires éprouvés. Il s'agira de considérer, d'identifier et d'expliquer la manière dont les couleurs, les paysages et les sensations sont liés, au sein de la poétique valmorienne.

 

Notre réflexion consistera en une analyse des loci poétiques traditionnels10 au sein des Pleurs de Desbordes-Valmore, prenant en compte le « paysage naturel », en considérant le rôle des couleurs dans son développement, et partant les sentiments, émotions et sensations que ces mêmes couleurs évoquent, mettant ainsi en relief un rapport « lieu-couleur-sensation ».

 

Dans le cadre de cette analyse, nous travaillerons les notions du locus amoenus et du locus horribilis, et utiliserons celle de couleur. Il convient de définir ces concepts plus précisément, cependant, afin d'éclaircir notre développement. La nature formant un facteur important et récurrent de notre argumentation, nous en donneront également une définition plus précise.

Ainsi, le locus amoenus, renvoie à un lieu naturel, mis en relation de sentiments positifs, de sécurité, de sérénité, de plénitude, voire d'amour. Lieu charmant, agréable, autrement dit amène, il est le plus souvent apparenté aux récits de la Genèse et au Jardin d'Eden. Cette description de la nature dérive du « discours judiciaire ([avec] l'argumentum a loco, qui vise à fonder ses preuves sur la nature-même du lieu où s'est déroulée l'action), et du discours épidictique ([en vantant] des lieux pour leur beauté) »11. Il s'agit de porter une attention particulière au lieu, et dès lors, le locus amoenus met en avant un paysage avec des caractéristiques précises, telles que des sources, la flore, des brises légères, des fleurs, ou encore le chant des oiseaux ; autant d'éléments qui ravissent l'âme du sujet qui s'y trouve.

Par ailleurs, la notion de locus horribilis (ou locus terribilis), qui forme son exact opposé, est définie par Marie-Anne Le Lannou, comme :

 

[Un] lieu isolé du monde, où un personnage se trouve seul en proie à une terreur profonde liée aux éléments qui l'entourent. Cet espace est généralement caractérisé par l'obscurité, un froid glacial ou au contraire une chaleur extrême, une végétation aride, et parfois par la présence d'une faune hostile.12


 

Rapporté aux enfers, c'est donc un lieu hostile qui traduit des sentiments négatifs, des sensations désagréables, et qui peut mener à la mort du sujet.

Ensuite, la notion de couleur, si simple puisse-t-elle paraître, nécessite d'être définie. En effet, Wittgenstein écrivait :

 

Si l'on nous demande : que signifient les mots rouge, jaune, bleu ou vert ? nous pouvons bien entendu montrer immédiatement des choses qui ont de telles couleursMais notre capacité à expliquer la signification de ces mots ne va pas plus loin.13

 

La couleur doit être effectivement considérée comme un motif difficile à définir, et dépendant du milieu intellectuel dans lequel on l'étudie. La définition du physicien ne sera pas la même que celle de l'historien. Ainsi, la couleur n'est pas seulement une matière ou une fraction de la lumière visible, mais peut-être surtout un phénomène perceptif :

Elle naît de la conjonction de trois éléments : une source de lumière, un objet sur lequel tombe cette lumière et un organe récepteur […] à la fois anatomique, physiologique et culturel, que forme le couple œil-cerveau.14

Nous considérerons, alors, la couleur comme un phénomène perceptif culturel au premier ordre, et de fait à la fois objectif, car ancré dans un système codifié de valeurs – l'imaginaire de la langue - et subjectif, du fait des messages transmis, et notamment sensationnels, émotifs, propres au lecteur.

 

Enfin, au sein de notre réflexion, la nature renverra à la fois à la flore dans sa plus vaste définition, qu'à la faune, ainsi qu'aux phénomènes météorologiques (en termes de précipitations), mais également aux phénomènes temporels (tels que la nuit et le jour), et nous y inclurons, en outre, les corps célestes et les astres. Autrement dit, il s'agira de l'« ensemble de la réalité matérielle considérée comme indépendante de l'activité et de l'histoire humaines »15.

 

 

I — « Présence effective » et « suggestion chromatique » : la place de la couleur chez Marceline Desbordes-Valmore


 

 

Le XIXe siècle apparaît comme un tournant dans le rapport au monde, et notamment en littérature. Les formes brèves de la littérature deviennent des fragments : il ne s'agit plus de livrer une totalité ou un ensemble unifié, mais bien plutôt de répondre à un sentiment d'éphémère. Ces fragments comprennent une notion de manque, omniprésente chez les romantiques, que nous retrouvons plus tard chez Baudelaire ou Mallarmé. Les mots deviennent des symboles d'un monde qu'on ne sait plus déchiffrer ; ils ne sont que les signes d'un silence impénétrable : ce vide invite à rêver. La suggestion, et l'imagination sont chez les romantiques, des dynamiques importantes, que nous trouvons, déjà dans une certaine mesure, chez Desbordes-Valmore. La notion de « suggestion chromatique » provient de ce manque de signifiant : évoquant plus qu'elle ne donne à voir, elle pousse à imaginer plus qu'elle ne représente. Jean-Louis Curtis, dans son introduction aux poèmes d'Edgar Allan Poe, écrivait :

 

[La poésie de Poe] vise à produire certains effets […]. Elle ne s'adresse pas à la part consciente du lecteur ou de l'auditeur, à son entendement ; elle veut d'abord impressionner ses sens, frapper son imagination et les zones obscures de sa sensibilité. Aussi éloignée que possible de la formulation rationnelle […] elle se veut, non point discursive, mais incantatoire.16

 

La notion de suggestion, chez Desbordes-Valmore, correspond, à plusieurs égards, à cette définition : elle évoque et fait imaginer les couleurs, en frappant la sensibilité, sans pour autant les désigner.

De là, il semble nécessaire de distinguer deux aspects de la couleur en littérature et, a fortiori, en poésie. En effet, la couleur peut être convoquée de plusieurs manières, et nous en retiendrons principalement deux : premièrement, la présence effective de la couleur, soit la couleur désignée précisément, nominativement. Nous trouvons notamment, dans « Les mots tristes » des vers tels que :

 

Le chemin lumineux qui ramène au soleil,

Pour partir en aveugle, en joie ! à tire-d'aile,

Et ne voir devant soi que l'horizon vermeil

 

La couleur est ici convoquée explicitement, de manière directe par le qualificatif épithète « vermeil ». L'horizon est, de fait, coloré dans des teintes orangées à rouges. La couleur subit alors un phénomène que nous désignerons comme « présence effective ».

 

Secondement, nous observons un phénomène plus subtil dans l'évocation de la couleur, à savoir une suggestion discrète, implicite, faisant appel à l'imagination du lecteur, fondée sur l'ensemble des codes de la langue, qui comprennent, dans les mots-mêmes, une couleur spécifique et communément admise. Ainsi, dans « Trois nocturnes » prenant place dans les Imitations de Moore, nous retrouvons une dynamique d'évocation, que nous désignerons comme « suggestion chromatique » :

 

Quand le soleil couchant sur les flots se balance

[…]

S'endorment sur les fleurs du gazon parfumé

 

Dans ces deux vers se déclinent trois gammes chromatiques distinctes qui, pourtant, ne sont pas désignées explicitement : une gamme de rouge-orangé, convoquée par le « soleil couchant », une gamme de bleu, implicitement contenue dans le substantif « les flots », et une gamme de vert, par le « gazon ». Ces termes disposent d'une qualité chromatique alors intrinsèque à leur signification.

 

Ainsi, la couleur répond à deux évocations distinctes : la présence effective et la suggestion chromatique. De là, il n'est pas nécessaire, pour faire poindre la couleur, de la désigner proprement, l'imaginaire de la langue pouvant, dans de nombreux cas, la sous-entendre. Cela renvoie, en fait, à la perception étymologique de la couleur. Du latin celare, qui signifie « cacher », « dissimuler » ou « envelopper », ou encore déjà en grec khrôma, dérivant du terme khrôs, la peau : la couleur est, de fait, une partie constituante des objets, des éléments et phénomènes du monde qui nous entoure, et désigner de tels phénomène signifie aussi, volontairement ou non, désigner les couleurs de ceux-ci. La couleur n'a, alors, pas besoin d'être désignée pour être présente, puisqu'elle est intrinsèque à nombre d'éléments. Cette observation est d'autant plus vérifiable lorsque nous considérons les éléments naturels : les blés feront poindre le jaune, la forêt du vert, la colombe du blanc, la nuit du noir, et ainsi pour presque chaque élément naturel. Cette suggestion chromatique provenant du système de codes induit par la langue, nous pouvons même avancer qu'il s'agit d'une intuition chromatique des locuteurs : l'imaginaire de la langue prend le relais lorsque les informations manquent. En conséquence, nous pourrons considérer les lieux comme étant, par cette évocation discrète, intégralement décrits chromatiquement, par les couleurs sous-entendues dans les substantifs, adjectifs et tout autre terme renvoyant, dans l'imaginaire collectif, à une couleur ou gamme de couleurs. La poésie de Marceline Desbordes-Valmore en regorge alors, puisqu'elle convoque, par le biais des lieux décrits et évoqués, les éléments naturels qui impliquent en eux-mêmes des motifs chromatiques admis par la langue.

 

 

II — Éléments topographiques et gammes chromatiques : une description intégrale des loci en faveur de l'évocation du sentiment

 

 

Partant de cette observation, les loci sont toujours intégralement décrits, y compris par des couleurs évoquées discrètement ou nominativement. Le paysage naturel a une place importante au sein de l'œuvre de Desbordes-Valmore ; elle met en relation le paysage et plus largement la nature, avec les sentiments, et use par ailleurs du topos du locus amoenus dans plusieurs pièces. Elle met donc en relation un paysage accueillant, agréable, et des sentiments qui s'y accordent, et plus précisément l'amour et la plénitude, tout en prenant soin d'évoquer des couleurs correspondant à la fois au lieu et aux sensations provoquées : ainsi ces lieux amènes proposent un rapport « lieu-couleur-sensation ». Tout d'abord, nous pouvons noter que les éléments topographiques du locus amoenus sont présents, par exemple dans le poème « La vie et la mort du ramier ». Le motif de la source apparaît dans un cadre champêtre propice à la formation de ce topos :

 

De la colombe au bois c'est le ramier fidèle ;

S'il vole sans repos, c'est qu'il vole auprès d'elle ;

Il ne peut s'appuyer qu'au nid de ses amours,

Car des ailes de feu l'y réchauffent toujours !

[…]

Ils ne veulent à deux qu'un peu d'air, un peu d'ombre ;

Une place au ruisseau qui rafraîchit le cœur ;

Seuls, entre ciel et terre, un nid suave et sombre,

Pour s'entre-aider à vivre, ou cacher leur bonheur !

 

D'abord, nous voyons que le « ruisseau » et l'« ombre » suggèrent un cadre champêtre ; renforcé par la mention du « nid », qui se retrouve alors dans les arbres. Par ailleurs, et comme le montre le vers 1, le poème met en scène deux oiseaux, la « colombe » et le « ramier » (qui désigne la palombe), ce qui correspond à un motif supplémentaire du locus amoenus. Par ailleurs, ces mêmes oiseaux permettent de développer le sentiment amoureux au sein du poème, et de fait, de compléter le traitement du locus amoenus. En effet, le ramier tout comme la colombe sont des animaux monogames et partant fidèles. Le choix de ces oiseaux est donc volontaire. Nous citons : « N'allez pas croire au moins que l'un des deux soit volage ; / Bien qu'ils aiment toujours, ils n'aiment qu'une fois ! » (v. 15 et 16). La double mention du verbe « aimer », ainsi que la négation de l'attribut « volage », rend explicite la référence à l'amour, suggérée dès le début du poème. Par ailleurs, non seulement le sentiment amoureux est mis en scène dans une nature bucolique, mais il est aussi porté par la nature elle-même, par les oiseaux. Bien qu'il n'y ait pas de sujet humain pour illustrer pleinement le locus amoenus, nous retrouvons ici toutes ses caractéristiques ou presque : Marceline Desbordes-Valmore use donc de ce topos, pour mettre en relation la nature et les sentiments. Par ces différents éléments, Desbordes-Valmore propose une poétique du lieu traditionnelle, et mettant en perspective les sentiments et le paysage. Baudelaire écrivait justement à ce sujet :

 

Je me suis toujours plu à chercher dans la nature extérieure et visible des exemples et des métaphores qui servissent à caractériser les jouissances et les impressions d'un ordre spirituel. Je rêve à ce que me faisait éprouver la poésie de Mme Valmore […]. Cette poésie m'apparaît comme un jardin […]. C'est un simple jardin anglais, romantique et romanesque. Des massifs de fleurs y représentent les abondantes expressions du sentiment.17

 

Ainsi, il apparaît que la nature valmorienne est liée profondément aux sentiments, et en l'occurrence, au sentiment amoureux, et ce lien est également perçu par ses contemporains. La notion de locus amoenus vient alors corroborer ce rapprochement. La couleur y joue, également, un rôle important. La colombe, nous l'avons dit, renvoie dans l'imaginaire collectif, au blanc ; or le blanc renvoie à la pureté, à la paix, et de fait, est propice à l'harmonie et à l'amour qui sont ici convoqués par le locus amoenus. Michel Pastoureau écrit18 :

 

Dans notre imaginaire, nous associons spontanément le blanc à […] la pureté et [l'innocence]. […] Sans doute parce qu'il est relativement plus facile de faire quelque chose d'uniforme, d'homogène, de pur avec du blanc

 

De fait, le blanc est à rapprocher de cette idée de pureté, d'harmonie, et la colombe, par allégorie, renvoie précisément à cela, par l'intuition chromatique dont nous disposons en tant que locuteurs, et lecteurs. De la même manière, le « bois », à comprendre dans le sens de forêt, renvoie, quant à lui, au vert, qui était considéré, par Goethe, comme une couleur apaisante. Bien qu'il soit historiquement associé à l'instabilité, le vert semble, dans certains cas, être positif. Baudelaire écrira, dans « Moesta et Errabunda »19 :

 

Mais le vert paradis des amours enfantines,

L'innocent paradis, plein de plaisirs furtifs

 

Le vert est associé, de manière historique, à la fortune, la chance, et de fait, à l'espoir, et les vers de Baudelaire vont dans ce sens : le vert semble convoquer l'espoir de l'éternité des amours enfantines – idée d'ailleurs renforcée par la notion de paradis. Nous pouvons trouver une connotation positive dans cette couleur, justifiant son usage dans le locus amoenus, et son évocation chez Marceline Desbordes-Valmore. S'il peut signifier l'espoir, le vert renforce d'autant les sensations positives du lieu.

Le locus amoenus apparaît donc, chez Desbordes-Valmore, de manière traditionnelle, liant la nature et des sentiments positifs, tout en évoquant des couleurs spécifiques et a dès lors une place importante dans le traitement valmorien des paysages et des lieux. La poétesse met donc en perspective ces trois éléments au sein de sa poésie, qui deviennent parties prenantes de son esthétique. Nous trouvons un rapport « lieu-couleur-sensation » qui semble s'auto-renforcer. La nature, par l'absence de trouble, permet des sensations positives, et les couleurs rendent davantage palpable le lieu décrit, par leur évocation explicite ou implicite. Celles-ci deviennent, en fait, un indice important du lien entre paysage et sensation : la présence des couleurs complète la description du lieu, et ce dernier se voit renforcé, plus vivant, et de fait plus propre à évoquer des sensations, ici positives.

Par ailleurs, le locus amoenus n'est pas la seule forme topique du lieu que Desbordes-Valmore convoque : le locus horribilis apparaît aussi à plusieurs reprises dans son recueil. Elle propose plusieurs pièces au sein desquelles la nature évoque des sentiments négatifs, en devenant presque hostile. Nous pouvons trouver, dans « Détachement », un lieu chargé de descriptions tendant vers l'hostilité. D'abord, la temporalité nocturne plonge le sujet lyrique au sein de l'obscurité. Nous trouvons, dès le second vers : « change en affreuses nuits », un cadre qui se précise, avec l'épithète « affreuses », traduisant immédiatement le rapport néfaste entre la nuit et le sujet lyrique. L'obscurité est redoublée, au vers 8 avec l'« ombre ». Par suggestion chromatique, la couleur dominante est alors le noir, couleur associée à la mort, au deuil, ou au malheur en général. Renvoyant au néant dans la majeure partie des cultures occidentales, dès la Grèce antique, avec Erèbe, personnification de l'obscurité et des ténèbres, jusque dans le christianisme, avec le néant de la Genèse : « Terra autem erat inanis & uacua & tenebra erant super faciem abyssi & spiritus Dei ferebatur super aquas. Dixitque Deus : Fiat lux et lux facta est »20, par cette seule phrase, Dieu créa la lumière, et annihila les ténèbres, le chaos, le néant. Dans de nombreuses cultures, l'obscurité et l'ombre, sont alors associées au malheur et partant, l'imaginaire de la langue l'y associe également. Par ailleurs, cette notion est exprimée à la fin du poème :

 

Sur un bonheur lointain qu'on a longtemps cherché,

Créé pour nous peut-être ! et qu'indigne d'atteindre,

On voit comme un rayon trembler, fuir... et s'éteindre.

 

Le bonheur, perçu comme s'éteignant au sein d'une comparaison à la lumière vacillante (« comme un rayon trembler »), suggère la présence du malheur par l'absence de lumière. De même, la temporalité nocturne est explicitement mise en relation d'aspects négatifs dès les premiers vers : « Il est des maux sans noms, dont la morne amertume / Change en affreuses nuits nos jours qu'elle consume ». La nuit est provoquée par des sentiments désagréables, qui permettent au locus horribilis de s'ancrer. La couleur noire, suggérée par « l'ombre » et la « nuit », vient renforcer la description du locus horribilis et permet le rapprochement avec des sentiments négatifs. Nous noterons aussi la présence d'éléments naturels traditionnellement associés au malheur, tels que « l'orage » (v. 6), mis en relation avec « naufrage » (v. 5), par la rime en /ʁaʒ/, apportant une dimension négative supplémentaire. De plus, la scène proposée par ces deux vers (« On ne se souvient pas, perdu dans le naufrage, / De quel astre inclément s'est échappé l'orage »), sous-entend un cadre menaçant, comme des récifs, notamment par la mention du « naufrage ». Le locus horribilis semble donc se développer de manière traditionnelle, dans la mesure où la nature est mise en relation de sentiments négatifs, et caractérisée par son obscurité. La mort est même comprise dans ce poème, au vers 11 : « C'est quand on sent mourir son regard attaché », achevant de compléter le tableau d'un lieu hostile, à la fois au sujet lyrique, et au bonheur – et même à l'amour, comme le montre le chiasme au vers 10 : « C'est quand on n'aime plus, que plus rien ne nous aime », qui permet d'insister sur la néantisation du sentiment amoureux, au sein d'une nature-cadre hostile. La couleur, ou plutôt son absence, par la prédominance du noir et de l'obscurité, permet ici le renforcement du rapport entre paysage et sensation.

 

L'idée d'un rapport « lieu-couleur-sensation » est alors à considérer : la couleur sert d'étoffe au paysage et joue un rôle actif dans sa construction. Le rôle de la couleur ne semble pas s'arrêter là pour autant : elle évoque aussi, et peut-être surtout, des sentiments et sensations qui semblent intrinsèques à la couleur21. La notion de couleurs dites chaudes (rouge, jaune, orange) et froides (bleu, violet) participe à cette association collective22. Les premières seront généralement associées à des sensations agréables, à des lieux propices au plaisir, ou au moins propices à la tranquillité, tandis que les secondes seront associées à des sensations désagréables, et à des lieux s'y accordant.

 

Le locus horribilis, à l'instar du locus amoenus, occupe une place de choix au sein des lieux poétiques des Pleurs de Marceline Desbordes-Valmore et toujours se rapportant à la mort. Nature hostile résonnant avec l'insécurité du sujet lyrique, ce topos est dès lors présenté traditionnellement, notamment par la description d'une nature déchaînée et inquiétante23. Le traitement valmorien de la nature, cependant, ne s'arrête pas à la présence de ces deux topoï, mais implique des palettes de couleurs qui permettent un renforcement des sensations, par la notion de suggestion. Ces deux motifs, les lieux et les couleurs, sont donc profondément liés dans la sensation, et semblent indissociables.

 

 

 

III — Un rapport « lieu-couleur-sensation » indissociable ?

 

 

Nous voyons que le lieu et la couleur forment un ensemble cohérent qui concourt à la création de sentiments, positifs ou négatifs, dépendant à la fois du lieu décrit et des couleurs convoquées. Mais cet ensemble est-il indissociable ? La couleur et le lieu sont-ils toujours joints dans les descriptions du locus amoenus et du locus horribilis ?

D'abord, la couleur, si elle est importante, ne prime néanmoins pas sur la force évocatrice des loci, en effet, la dynamique de suggestion chromatique n'est valable que dans un ensemble de codes partagés, dépendant de fait d'un système commun, la langue, partagé au sein d'une culture et d'une époque. Michel Pastoureau l'explique24 :

 

L'historien doit toujours se souvenir que le relativisme culturel concernant la perception, la nomination et l'utilisation sociale ou symbolique de la couleur s'inscrit dans le temps, qu'il a aussi une histoire et que celle-ci n'est pas une histoire immobile. […] le spectre ne doit être envisagé que comme un système symbolique parmi d'autres systèmes symboliques

 

Toute traduction du texte dans un autre système linguistique ne comportant pas le même ensemble de codes rendrait les descriptions chromatiques caduques, néanmoins, les topoï seraient toujours présents en tant que lieux en rapport avec des sentiments positifs ou négatifs. Dans ce premier cas, la couleur apparaît davantage comme un renforcement topique, une étoffe de la description topographique, et de fait, un parachèvement des loci, plus qu'une condition sine qua non de l'évocation sentimentale. Le rapport « lieu-couleur-sensation », s'il est effectivement présent et utilisé par Marceline Desbordes-Valmore, est néanmoins relatif à notre système langagier : le français.

 

Toutefois, le relativisme culturel est à considérer avec du recul : si les couleurs jouent un rôle différent en fonction du contexte linguistique, historique, géographique et culturel dans lequel on les positionne, elles ont néanmoins une place prépondérante dans la poésie originale de Desbordes-Valmore. En effet, nous l'avons vu, la plupart des éléments naturels comprennent en eux-mêmes les couleurs qu'elle convoque, et Desbordes-Valmore désigne régulièrement d'autres couleurs de manière explicite. Dans ce second cas, dans les textes originaux, ce rapport « lieu-couleur-sensation » est indissociable. Non seulement la couleur est-elle une étoffe de la description, mais elle est surtout un élément actif de la transmission des sentiments. En d'autres termes, le paysage, comme l'explique Collot, se donne à ressentir par l'intégralité de nos sens, et non pas seulement par la vue, il n'est pas un « pur spectacle » visuel, mais un théâtre complet, à la fois visuel, olfactif, tactile, gustatif et auditif, offrant donc un rapport « lieu-sensation ». Néanmoins, la vue, et nous l'avons dit, est le principal élément de cette transmission : de là, la couleur est un agent actif de cette transmission, notamment chez Desbordes-Valmore, et offre un rapport plus complet : un rapport « lieu-couleur-sensation ».

 

​​​​​​

Bibliographie

 

Sur la notion de paysage :

 

Francois-René DE CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme, [1801], Deuxième partie, Livre IV, Chapitre 1, « Que la mythologie rapetisse la nature », Paris, Garnier-Flammarion, 1996, p. 313 et suivantes.

Michel COLLOT, Paysage et poésie du romantisme à nos jours, Paris, José Corti, 2005, p. 12.

 

Sur la couleur :

Charles BLANC, L'art dans la parure et dans le vêtement (1875), Paris, Henri Loones, 1882, pp. 18-19.

Michel PASTOUREAU, Jaune. Histoire d'une couleur, Paris, Points, 2019, p. 13 ; Le Petit Livre des Couleurs (2005), Paris Points, 2014, p.49 ; « Une Histoire Des Couleurs Est-Elle Possible? », in Ethnologie Française, vol. 20, n°4, 1990, p. 371.

Pierre BOURDIEU, Esquisse d'une théorie de la pratique (1972), Paris, Seuil, 2000, p. 262.

Ludwig WITTGENSTEIN, Bemerkungen über die Farben, Francfort-sur-le-Main, 1979, 1, 68.

 

Sur le locus amoenus :

 

Jean-Michel ADAM, « Locus amoenus », in « DESCRIPTION », Encyclopaedia Universalis [en ligne], consulté le 14 novembre 2022, URL : http://www.universalis-edu.com.ressources-electroniques.univ-lille.fr/encyclopedie/description

Charles BAUDELAIRE, L'Art Romantique, Livre III, Réflexions sur quelques uns de mes contemporains, Partie III, « Marceline Desbordes-Valmore », [1868], Paris, Gallimar, éd. de la Pléiade, p. 1098.

 

Sur le locus horribilis :

 

Marie-Anne LE LANNOU, « Locus terribilis, terreur et conversion », 2020 [en ligne], L'actualité Nouvelle-Aquitaine, Espace Mendès-France. URL : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-02868688

 

Sur la notion de suggestion :

 

Edgar ALLAN POE, Poèmes, Paris, Gallimar, 1982, préface de Jean-Louis Curtis, p. 10.

 

Sur l'itinéraire biographique de Marceline Desbordes-Valmore :

 

Marceline DESBORDES-VALMORE, Œuvre poétique, Lyon, Jacques André Éditeur, 2007, avant-propos de Marc Bertrand, p. 14, et chronologie p. 25-26.

 

 

Notes

 

1 Franco-suisse DE CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme, [1801], Deuxième partie, Livre IV, Chapitre 1, « Que la mythologie rapetisse la nature », Paris, Garnier-Flammarion, 1996, p. 313 et suivantes.

2 Michel COLLOT, Paysage et poésie du romantisme à nos jours, Paris, José Corti, 2005, p. 12.

3 Ibid., p. 12.

4 Ibid., p. 14.

5 Ibid., p. 22.

6 Comme lorsque nous observons le tableau d'un paysage : les sentiments sont transmis par la vue uniquement, bien qu'il s'agisse d'une perception de l'artiste lui-même à l'origine.

7 Charles BLANC, L'art dans la parure et dans le vêtement (1875), Paris, Henri Loones, 1882, pp. 18-19.

8 Michel PASTOUREAU, Jaune. Histoire d'une couleur, Paris, Points, 2019, p. 13.

9 Pierre BOURDIEU, Esquisse d'une théorie de la pratique (1972), Paris, Seuil, 2000, p. 262.

10Le terme de loci, dans le cadre de cette réflexion, renverra précisément au locus amoenus et/ou au locus horribilis.

11 Jean-Michel ADAM, « Locus amoenus », in « DESCRIPTION », Encyclopaedia Universalis [en ligne], URL : http://www.universalis-edu.com.ressources-electroniques.univ-lille.fr/encyclopedie/description

12 Marie-Anne LE LANNOU, « Locus terribilis, terreur et conversion », 2020 [en ligne], L'actualité Nouvelle-Aquitaine, Espace Mendès-France. URL : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-02868688

13 Ludwig WITTGENSTEIN, Bemerkungen über die Farben, Francfort-sur-le-Main, 1979, 1, 68.

14 Michel PASTOUREAU, ibid. p. 12.

15 Selon la définition que donne le Trésor de la Langue Française informatisé (TLFi) du substantif « nature ».

16 Edgar ALLAN POE, Poèmes, Paris, Gallimard, 1982, préface de Jean-Louis CurtisCurtis, p.. 10.

17 Charles BAUDELAIRE, L'Art Romantique, Livre III, Réflexions sur quelques uns de mes contemporains, Partie III, « Marceline Desbordes-Valmore », [1868], Paris, Gallimard, éd. de la Pléiade, p. 1098.

18 Michel PASTOUREAU, Le Petit Livre des Couleurs (2005), Paris Points, 2014, p.49.

19 Charles BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal (1857), Paris, Garnier-Flammarion, 1964, p. 86-87.

20 Genèse, 1:2-1:3 : « La Terre était informe et vide, et il y avait des ténèbres à la surface de l'abîme et l'esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. Et Dieu dit : que la lumière soit, et la lumière fut. »

21Voir, pour cela, les travaux complets de Michel Pastoureau, dans sa série d'ouvrages d'histoire culturelle et sociale sur les couleurs – noir, rouge, bleu, jaune, vert et blanc.

22 Quoique critiquée dans les domaines scientifiques et artistiques, cette notion n'en reste pas moins commune et admise dans l'imaginaire collectif.

23 Voir par exemple le tableau « Paysage. Le Torrent », de Jacob van RUISDAEL (1660-1670), représentant des torrents en forêt, qui peut alors renvoyer à une image « pré-romantique » de la nature, par des cascades violentes, aux tons sombres, rappelant la violence de la nature déchaînée.

24 Michel PASTOUREAU, « Une Histoire Des Couleurs Est-Elle Possible ? », in Ethnologie Française, vol. 20, n°4, 1990, p. 371.

Notice biographique du rédacteur de l'article :

Né le 24 août 2002, Owen ARDERIU, est étudiant en première année de Master Recherche et Création Littéraire, à l'Université Paris-Saclay. Après avoir suivi une Licence Humanités, spécialité Lettres Modernes à l'Université de Lille, il s'est engagé en recherche littéraire, et envisage de poursuivre ses études sur le long terme. Ses travaux de mémoire portent sur les lieux poétiques, les lieux topiques et leurs dégradations au sein de l’œuvre poétique de Marceline Desbordes-Valmore, en questionnant une nouvelle forme des lieux chez la poétesse. 

Son intérêt pour la poésie de Marceline Desbordes-Valmore n'a pas été immédiat. Loin d'une passion de longue date, il a découvert son œuvre à l'occasion de son premier travail de recherche, lors de sa deuxième année de Licence, souhaitant travailler sur la poésie romantique, qui, elle, faisait partie de ses premières lectures autonomes. C'est en cherchant une poétesse pouvant être comparée à Baudelaire, dans le cadre d'une étude de la perception de la nature en fonction du genre des autrices et auteurs, qu'il a lu pour la première fois Les Pleurs. Et qu'il ne cesse, depuis, de les relire. Ces textes l'ont retenu dans la force de l'intimité qu'ils créent, et l'ont poussé à les étudier.

 

***

 

 

Pour citer cet article inédit

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Owen Arderiu, « La couleur des lieux chez Marceline Desbordes-Valmore : indice du lien entre le paysage et les sensations ? », Marceline Desbordes-Valmore | Revue annuelle, internationale, multilingue & poéféministe (poefeminist), « Les couleurs dans les œuvres des autrices Desbordes-Valmore », n°3, 2023-2024 & Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N° 15 | AUTOMNE 2023 « Poétiques automnales » & N° 15 | AUTOMNE 2023 « Poétiques automnales », volume 1, mis en ligne le 16 décembre 2023. URL :

http://www.pandesmuses.fr/periodiques/mdvno3/no15/arderiu-couleurdeslieux

 

 

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