6 novembre 2022 7 06 /11 /novembre /2022 18:35

N°12 | Poémusique des femmes & genre | Poétiser en cuisinant

 

 

 

 

 

 

 

 

Ode au champagne

​​​​​​

 

 

 

 

Judith Gautier (1845-1917)

 

Poème choisi & transcrit pour cette revue par Dina Sahyouni

 

 

 

 

 

Crédit photo : Affiche publicitaire pour le vin de Champagne, "Champagne, tribunes", image de Commons.

 

 

 

Poème Couronné à un concours sur le vin de Champagne

 

 

 



 

Ô Soleil, sois propice aux vendanges prochaines.

Roi de notre horizon, viens verser ta chaleur

Sur les pampres nouveaux, verdoyant dans les plaines,

Ô soleil, sois propice à la Champagne en fleur.


 

 

Car si tu nous manquais que deviendrait le monde,

Puissant philtre, sans ta pétillante gaîté ?...

Il n'est jamais, sans toi, de fête, ô liqueur blonde,

Sans le champagne point de toast ni de santé.


 

 

Que serait un festin sans la salve joyeuse

Des bouchons détonants hors des goulots dorés,

D'où la mousse jaillit, folle et capricieuse,

Mouillant les doigts parmi les rires effarés ?


 

 

Soit pour nous souvenir de quelque heure envolée,

Naissance ou mariage, ou fêter un succès ;

Pour envoiler d'oubli notre âme désolée,

N'est-ce pas toujours toi qu'il faut, cher vin français ?


 

 

L'on t'appelle d'un bout à l'autre de la terre,

Grâce à toi, notre nom est partout acclamé ;

Des neiges de Russie aux brouillards d'Angleterre,

De l'Inde à l'Amérique, il est partout aimé.


 

 

Jusque dans la débauche aux vulgaires ivresses,

En ces frivoles nuits dont on rougit au jour,

Ta magie encore prête aux vénales caresses

Un air de passion et des semblants d'amour.

 

 

Et même l'ennemi, pour boire à sa conquête

Et voir  monter l'esprit sous son crâne impuissant,

Doit tendre vers la France,ainsi qu'un pauvre quête,

Le verre dans lequel il a bu notre sang.


 

 

Gloire à toi, vin léger, vin doré, limpide

Qui réchauffe le cœur et met la flamme aux yeux,

Exalte le courage et rend l'homme intrépide,

Qui fait le pauvre riche et le triste joyeux.


 

 

Je te bois à la France, aux arts, aux républiques,

À la fraternité de tous, aux travailleurs,

À l'espoir, à l'amour, aux aïeux héroïques,

Aux luttes de l'esprit qui nous rendent meilleurs.


 

 

Ô Soleil, sois propice à la Champagne en fleur !

 

 

Le poème ci-dessus est un extrait, il provient de GAUTIER, Judith (1845-1917), Poésies (Les rites divins – Au Gré du Rêve – Badinages – Pour la Lyre), Paris, Bibliothèque-Charpentier, Eugène FASQUELLE, Éditeur (11, rue de Grenelle), « Badinages », 1911, pp. 107-109. Le recueil cité appartient au domaine public.

 

***

 

Pour citer ce poème de l'aïeule

 

 

Judith Gautier,​ « Ode au champagne », extrait de GAUTIER, Judith (1845-1917), Poésies (1911), choisi & transcrit par Dina Sahyouni, Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques N°12 | HIVER 2022-23 « Poémusique des Femmes & Genre », mis en ligne le 6 novembre 2022. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no12/jgautier-odeauchampagne

 

 

 

 

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4 novembre 2022 5 04 /11 /novembre /2022 17:23

N°12 | Poémusique des femmes & genre | Sourires & rires  féministes

 

 

 

 

 

 

 

 

Le réveil-Matin

 

 

&

 

 

 Appartements à louer

​​​​​​

 

 

 

 

Élisa Fleury

 

Poèmes choisis & transcrits pour cette revue par Dina Sahyouni

 

 

 

 

 

Crédit photo : Henry Caro-Delvaille, "Portrait de jeune femme rousse", 1900, image de Commons.

 

Le réveil-Matin

Musique de Paul Henrion

 

 

I

 

Ma vieille tante Gribiche,

En fermant les yeux,

Ne laissa, n'étant pas riche,

Rien de précieux.

Hier on fit le partage

Du pauvre butin,

Et j'eus, pour tout héritage,

Son réveil-matin.

 

 

II

 

Or, cette Samaritaine

Vient mal à propos ;

Il faut à ma soixantaine

Beaucoup de repos ;

Pour que le sommeil m'abrège

Un triste chemin,

Voyons, à qui donnerai-je

Mon réveil-matin ?

 

 

III

 

Ce petit clerc de notaire

Que je vois là-haut

A, dit-on, beaucoup à faire,

C'est ce qu'il lui faut ;

Mais il lorgne la voisine,

Brune à l'œil mutin,

Qui lui tient lieu, j'imagine,

De réveil-matin.

 

 

IV

 

Ce monsieur, qui n'a ni rentes

Ni profession,

Suit les modes délirantes

De la fashion ;

Dans son logis que tapisse

Velours ou satin,

Les créanciers font l'office

De réveil-matin.

 

 

V


 

Cet autre, à l'œil de vipère,

Oui loge au grenier,

N'est bon époux ni bon père,

Il est usurier.

Au jour l'écho me rejette

Un son argentin,

Cet homme a dans sa cassette

Son réveil-matin.

 

 

VI

 

Voici la douce Marie

Dont le père est mort,

La pauvre enfant pleure, prie,

Soupire et s'endort ;

Orpheline, elle est sans armes

Contre le destin ;

Ne donnons pas à ses larmes

Un réveil-matin.

 

 

VII

 

Plus bas, quelle joie éclate ?

Bon, J'ai deviné,

L'heureux ménage d'Agathe

Compte un premier-né.

Dieu, quand il met sur la terre

L'ange ou le lutin,

Attache au cœur de la mère

Un réveil-matin.


 

 

VIII

 

Triste ou gai, dans cette vie,

Chacun a le sien,

Et personne, je parie,

Ne voudra du mien.

Si l'on me fait cette niche

J'irai, c'est certain,

Rendre à ma tante Gribiche

Son réveil-matin.

 

 

 

 

 

Appartements à louer

 

 

 

Vous, dont l'esprit tant soit peu satirique

Est à l'affût de nouveaux aliments,

Pour crayonner plus d'un tableau comique,

Amusez-vous à voir des logements.


 

 

Vous surprendrez Céline à sa toilette,

Ayant sur elle un peu moins qu'un peignoir ;

Plus loin Sainval à gants blancs et lorgnette,

Prêt à dîner avec un radis noir.

 

 

 

Que de tableaux je peindrais sans médire !

Car je vois tout, et j'ai, par ce moyen,

Presque toujours d'amples sujets de rire,

Et le plaisir de m'amuser pour rien.


 

 

 

Maint écriteau m'offre sur ses deux faces,

Pour occuper mon œil observateur :

Appartement et cave orné de glaces.

Que n'orne-t-on l'esprit du rédacteur ?


 

 

 

Le nez au vent, comme en entrant au Louvre,

Je veux d'abord m'adresser au portier :

Où donc est-il ? Enfin, je le découvre

Dans l'antre obscur que masque l'escalier.


 

 

 

Du vasistas, par où l'on vous épie,

Sort une odeur de chou, de cuir et d'ail.

Là, femme, enfants, chien, chat, lapins et pie,

Sont confondus dans le même bercail.


 

Un vieil argus, de l'œil dont il dispose,

Trace un béquet, lorgne entrer et sortir,

Chantant du nez : «  Tu n'auras pas ma rose. »

Ce n'est pas moi qui voudrais la flétrir.


 

Bref, nous montons ; j'entre au premier étages ;

Là, que d'apprêts ! quel chaos sans égal !

Un vieux rentier, grotesque personnage,

Donne aujourd'hui festin, concert et bal.


 

Sur chaque meuble on dépose à la hâte

Fleurs, fruits, rubans, pâtés, filets de bœuf ;

L'amphitryon, que cet exemple gâte,

Sur un melon pose un faux toupet neuf.


 

Moins bien logé qu'au Colisée à Rome,

Dans un salon qu'on traverse en dix pas,

Les conviés seront à l'aise comme

Des hannetons entassés dans un bas.


 

En pénétrant dans la pièce voisine,

Nous dérangeons la dame du logis.

Elle est coquette et fait, à la sourdine,

En brun foncé teindre ses cheveux gris.


 

Sèche et pincée, à côté de sa mère,

Évélina, qui se croit un Rembrandt,

Veut terminer le portrait de son père :

C'est bien plutôt celui du Juif-Errant.


 

Allons, Oscar, soyez donc raisonnable,

Dit le papa, grave comme un bedeau,

À son bambin qui, grimpé sur la table,

A grignoté déjà plus d'un gâteau.


 

À la cuisine on embroche, on fricasse ;

Pour s'illustrer, Babet, en un clin d'œil,

Fait des sirops avec de la mélasse

Et des sandwichs d'un reste de chevreuil.


 

En traversant la chambre de la bonne,

Je vois par terre un bouton en métal ;

Le coq gaulais m'apprend que la friponne

A du penchant pour un municipal.


 

Je sais aussi du portier, qui babille,

Que le papa, sans doter peu d'attraits,

Voudrait trouver un mari pour sa fille ;

Mais le brave homme en sera pour ses frais.


 

Bien des pardons, dis-je avec politesse,

En saluant ces sots prétentieux,

Qui m'ont fourni, chacun dans son espèce,

Quelques quatrains aussi stupides qu'eux.

 

Les poèmes d'humour ci-dessus sont des extraits, ils proviennent de FLEURY, Élisa (Madame), Album de poésies et chansons, par Mme Élisa Fleury, 2ème édition, Paris, Imprimerie Simon RAÇON et CIE, 1858, pp. 45-48 pour le premier puis pp. 50-52 pour le second. Le recueil cité appartient au domaine public. Ces deux poèmes représentent assez bien une manière humoristique de dire, dépeindre et penser la vie citadine et urbaine. Ils consituent ainsi un précieux échantillon de la Sociopoétique.

 

 

***

 

Pour citer ces poèmes humoristiques de l'aïeule

 

 

Élisa Fleury,​ « Le réveil-Matin » & « Appartements à louer », extraits de FLEURY, Élisa, Album de poésies et chansons (1858), choisis & transcrits par Dina Sahyouni, Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques N°12 | HIVER 2022-23 « Poémusique des Femmes & Genre », mis en ligne le 4 novembre 2022. Url :

http://www.pandesmuses.fr/no12/fleury-reveil-matin

 

 

 

 

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LE PAN POÉTIQUE DES MUSES - dans Numéro 12 Humour Muses et féminins en poésie
28 octobre 2022 5 28 /10 /octobre /2022 13:27

Événements poétiques | BRAVOURE IRANIENNE 2022 & N°12 | Poémusique des Femmes & Genre | Poébiopolitique | Réflexions féministes sur l'actualité | S'indigner, soutenir, lettres ouvertes & hommages & REVUE ORIENTALES (O) | N°2-1 | Créations poétiques 

 

 

 

​​​​​

 

 

 

 

​​​​​​Des femmes phénix sont nées

​​​​​​

 

​​

 

 

 

 

Dina Sahyouni

 

 

 

 

 

Crédit photo :  Phoenix rising, from its ashes, Commons.

 

Aux femmes braves.. aux Iraniennes !

En hommage à Mahsa Amini tuée il y a 42 jours pour un voile mal porté et à toutes celles qui ont été assassinées depuis...

 









 

Souffrir.. 

S'offrir aux dieux de leur l'absurdité.. à la déesse Satiété…

Souffrir... en mourir...

S'offrir en silence aux tas de riens qui fabriquent un destin.. un je ne sais quoi de banal, c'est un fanal fatal.

S'offrir en miettes de pain nourrissant le chagrin d'un peuple jadis souverain... c'est un funeste destin.

Souffrir.. seule dans une cage des rouages du temps humain.. rendu inhumain...

Une femme à la chevelure d'ailes vole au ciel de l'Iran.

"Femme, Vie, Liberté", à l'unisson, la population scande en se réunissant.

Une femme libre à la chevelure voyageuse, rêveuse, enflamme les cages textiles des anciennes servitudes serviles et viriles.

 

S'offrir en nourriture sacrée à la liberté…

Écrire avec le sang les nouvelles mélodies de la fierté.

Souffrir en silence, en si longue cadence sous les coups de l'infàme, être une femme gagnée par la cruauté d'une mort pour un voile mal mis.. quelle ignominie, quelle infâmie, quel tsunami !?

Souffrir en être émietté, délesté de tout cet héritage de l'anthropocène pour leur unique mise en scène obscène.

Prendre un aller sans retour dans les détours des chemins de traverse peuplés d'ennuis et de peines pleines, tout cela pour une prétendue politique saine faite de morale vaine.. pis inhumaine...

Souffrir... faire souffrir pour un voile, c'est vivre et mourir comme un poil.

S'offrir en nourriture sacrée à la liberté... retrouver enfin sa dignité...

Lasse de tout, une femme s'enflamme en Phénix de la liberté.*





 


 

* La femme-flamme Mahsa Amini nous quitte mais des milliers de femmes phénix sont nées.





 

© DS., octobre 2022.

 

***

 

Pour citer ce poème engagé, féministe & inédit​​​​​​

 

 

Dina Sahyouni, « Des femmes phénix sont nées », Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques Évènements poéféministes | « Bravoure iranienne » & N°12 | HIVER 2022-23 « Poémusique des Femmes & Genre » & Revue Orientales, « Les voyageuses & leurs voyages réels ou fictifs », n°2, volume 1, mis en ligne le 28 octobre 2022. Url :

http://www.pandesmuses.fr/bravure2022/no12/ds-desfemmesphenix

 

 

 

 

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27 octobre 2022 4 27 /10 /octobre /2022 11:12

N°12 | Poémusique des femmes & genre | Entretiens poétiques, artistiques & féministes & REVUE ORIENTALES (O) | N° 2-1 | Dossier


 

 

 

​​​​​

 

 

 

Mona AZZAM :

 

de l’Orient à l’Occident, force ou errance ?

 

 

 

 

 

​​

Propos recueillis en octobre 2022 par

 

Hanen Marouani

 

 

Entrevue avec & poème de

 

Mona Azzam

 

Site officiel : https://monaazzam.jimdofree.com

 

 

 

 

© Crédit photo :  Portrait photographique de Mona Azzam.

​​

Fiche d'information :

 

 

 

Profession : Professeur (lettres modernes)

Site Internet, Blog, liens sites de ventes :

https://www.vibration-editions.com/product-page/le-sablier-des-mots-mona-azzam

https://monaazzam.jimdofree.com

​​​

 

Biographie :

 

Née en Côte d’Ivoire, enfance en Afrique, enseignante à Beyrouth (Liban), actuellement enseignante à Montpellier.

 

 

Bibliographie :  

 

Auteur de :

 

Trilogie des fables de La Fontaine (fables choisies et commentées) aux

Éditions Cariscript, Paris (février 1994)

Nerval dans le sillage de Dante (Cariscript, Paris) ;

Sur l’oreiller du sable (Roman), (L’Harmattan, janvier 2017)

Dans le Silence des Mots Chuchotés (il est cri…), recueil de Nouvelles aux Éditions de la Trace (novembre 2018)

Nous nous sommes tant aimés (Roman), Éditions la Trace (octobre 2019)

Le Sablier des mots (Recueil poétique), Vibration Éditions (février 2020)

Ulysse a dit… (Roman), Éditions la Trace (août 2020) ; prix des Médiathèques de Bussy-St-George

La Plume des pages (Recueil poétique) BOD, octobre 2021

Amine (Roman), Éditions La Trace (janvier 2022)

Nomades (Roman), Vibration Éditions (mars 2022)

 

Contributions et articles :

 

Des jasmins en bord de mer, Poésie méditerranéenne ; Anthologie ; juin 2021 (Association Poétique Luna Rossa)

À quels feux s’invitent vos rêves (Anthologie) ; Éditions le Coudrier (Belgique, mai 2021)

Hadji (Texte), Revue coeur de plume( Québec, août  2021)

Nadia Tuéni, une figure inclassable ; Revue Orientales (avril 2021)

Anthologie poétique, Association Poaimer (Paris, septembre 2021)

Qu’est-ce que l’Afrique ? Ouvrage collectif, sous la direction d’Eugène Ebodé,

(coll. Sembura ; Editions La croisée des chemins, Maroc, septembre 2021)

Maman Recto-Verso, ouvrage collectif au profit de la Fondation des Femmes, sous la direction de Julie Gayet, David Foenkinos et Franck Ayroles (Éd. E. Leclerc, décembre 2021)

 

Nouveauté 2022 :

 

Amine (Roman), Éditions La Trace (13 Janvier 2022)

Nomades (Roman), Vibration Éditions (1er Mars 2022)

 

À paraître :

 

Rien, Ubik-Art

 

​​​​​​© Crédit photo :  Première de couverture illustrée de l'œuvre Le sablier des mots, 2022.

Entretien

 

 


 

Hanen Marouani —  Qu’est-ce qui vous a plu dans ce rôle d’écrivaine et de voyageuse en même temps ?


 

Mona Azzam Voyager et écrire sont deux activités complémentaires. Les lieux, les cultures, l’humain demeurent ma source d’inspiration. L’écriture est aussi un voyage, solitaire au départ. Un voyage vers des univers inconnus où, par le biais des mots, s’érige un pont entre le scribe et le lecteur. La transmission peut dès lors opérer. Et de cette rencontre prend naissance un partage inouï. Indicible parfois.


 

H.M — Vous êtes vous-même née loin de votre pays natal dans une famille immigrée. Ça été facile de trouver votre chemin parmi beaucoup d’autres ?


 

M.A — Comme tous les enfants d’expatriés, j’ai une facilité d’adaptation qui peut parfois surprendre les personnes qui n’ont pas un tel vécu. Les chemins que j’ai empruntés, que j’emprunte encore, ne sont jamais tracés à l’avance. Et c’est ce qui est fabuleux. Parce qu’en réalité, et je me permets de plagier Nicolas Bouvier, ce sont les chemins qui nous font.


 

H.M —  C’est très beau comme référence. Vos parents et votre entourage, ont-ils été un feu vert vers la poésie et l’art ? 


 

M.A —  Très certainement. Déjà, le fait de voir le jour sur le sol africain, au cœur même du berceau de l’humanité, c’est à mes parents que je le dois. Grâce à eux, je suis tombée dans une calebasse magique emplie de mots magiques, dès ma naissance. Des mots aux contours autres, aux senteurs autres, aux musiques autres.


 

(H.M) – Devant cette magie de reconnaissance et de présence dans la mémoire, vous vous souvenez encore de certains livres ou de recueils de poésie que vous ont influencés ?


 

M.A — Comment les oublier ? Ils ne m’ont jamais quittée. Ils constituent ma boussole.

Noces d’Albert Camus, Le Petit Prince de Saint-Exupéry, Les Fleurs du Mal de Baudelaire,

La Vita Nuova de Dante, Les Textes Blonds de Nadia Tuéni et enfin, les Œuvres poétiques d’Arthur Rimbaud.


 

H.M — Au Moyen Orient, en Europe, en Afrique ou en Amérique, vous avez eu l’occasion de fréquenter des ateliers d’écriture ? Si oui, quelle importance a-t-elle eue ?


 

M.A — Non. Je n’en ai pas eu l’occasion. D’autant plus que j’ai une aisance à écrire...


 

H.M — Qu’est ce qui coinçait encore Mona Azzam pour arriver à ce qu’elle désire vraiment et depuis longtemps ?


 

M.A Il me tardait de parachever une œuvre qui m’a demandé dix années de travail. Un roman sur Albert Camus. C’est chose faite. Il verra bientôt le jour, à l’horizon 2023, année où l’on célèbrera les 110 ans de sa naissance.


 

H.M — Le mal du pays ?! ça s’est apaisé par la suite ou cela sert encore de et comme source d’inspiration ?

 

M.A — Pour répondre franchement, je ne m’étais jamais posé la question avant de lire la vôtre. Pour la simple et bonne raison que je ne me sens d’aucun pays en particulier. Je suis de partout et de nulle part. Ma véritable patrie, ce sont les mots. Et l’humain est ma principale source d’inspiration.

 

 

 

H.M — Quel est le moment où vous vous êtes dit que ça allait marcher mieux avec l’écriture ?


 

M.A Lorsque mon deuxième écrit, Dans le Silence des Mots Chuchotés (Éditions La Trace), un recueil de nouvelles en prose poétique a été publié et est allé à la rencontre de ses lectrices et lecteurs.



 

 

H.M — Quelles représentations de la femme vous ont touchée le plus dans la poésie et dans les beaux-arts de nos jours ?


 

M.A — J’aime beaucoup Camille Claudel qui a su trouver sa place dans un univers exclusivement féminin. Quant aux représentations de la femme dans la poésie, je suis admirative des poèmes de Baudelaire qui en font un être à part.


 

 

 

H.M — Pour vous, les femmes du même domaine sont-elles de rudes concurrentes ou une famille alternative ?


 

M.A — Je ne vois aucune concurrence dans ce domaine particulier qu’est l’écriture. Chacune a sa plume. Chacune a son univers qui lui est propre. Créer demeure un acte personnel. Et chaque création est une œuvre unique qui ne saurait être en concurrence avec une autre.

En revanche, cet univers est en soi une famille. Ce qui nous lie, c’est la passion des mots et de l’écriture. J’ai la chance de faire partie d’une « famille », née grâce à une femme exceptionnelle, Sandrine Mehrez- Kukurudz, la famille de Rencontre des Auteurs francophones qui rassemble, depuis New York, des écrivains du monde entier, autour d’un même amour, l’écriture et la langue française.

 

 


 

H.M — Quelles œuvres conseillez-vous beaucoup de gens autour vous ?

 

M.A — Je conseille à la fois des lectures qui ont été un véritable coup de cœur que mes propres ouvrages. Marguerite Duras, la plupart du temps.


 

 

H.M — Pour vous, qu’est-il important de transmettre aux futures générations dans votre domaine par la sensibilité et par la poésie engagée ?

 

M.A — Il nous incombe aujourd’hui et plus que jamais de transmettre aux futures générations des messages à portée humaniste. Prendre la plume est un engagement en soi. La poésie, à mon sens, plus que les autres genres, parce qu’elle touche à la sensibilité, porte nos messages vers autrui. Cet autrui pour lequel tout écrit s’engage.


 

 

H.M — Que pouvez-vous nous proposer comme poésie à la fin de notre échange ?


 

M.A — Un poème inédit. Né en temps de confinement.

 

Si j’étais un poème, je rêverais pour l’hiver

Afin que du wagon fusent de roses vers.

Si j’étais une musique, je me ferais Mozart

Pour diffuser des notes aériennes de départ.

Si j’étais une contrée, je me nommerais Afrique

Pour battre le tam-tam par-delà les criques

Si j’étais une couleur, je me teindrais en bleu

Couleur de l’océan et des infinis lieux.

Si j’étais un parfum, j’embaumerais de jasmin

Toutes les allées profondes des antiques chemins.

Si j’étais un animal, je renaîtrais éléphant

Pour garder en mémoire mes rêves d’enfant.

Si j’étais un objet, je serais une plume

Naviguant sur les flots de mon encre d’écume.

Si j’étais un poète, je voudrais être Rimbaud

Sur ses semelles de vents, recueillir les mots.

 

© Mona Azzam

_________

 

 

Pour citer ces entrevue, photographies & poème inédit​​​​​​s

 

 

​Hanen Marouani, « Mona AZZAM : De l’Orient à l’Occident, force ou errance ? », Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : N°12 | HIVER 2022-23 « Poémusique des Femmes & Genre » & Revue Orientales, « Les voyageuses & leurs voyages réels & fictifs », n°2, volume 1, mis en ligne le 27 octobre 2022. Url :

http://www.pandesmuses.fr/periodiques/orientales/no2/no12/hmarouani-monaazzamdelorientaloccident

 

 

 

 

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