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Séance 5 : la générosité affective
Prendre le temps du regard, de la considération… À l’encontre de la froideur apparente, du silence, des demi-mots, de la cruauté.
– Voudrais-tu vivre ?
– Je vis…
– Je veux dire, vivre normalement. Ce hors-norme constaté ou cultivé, sans forcément en être conscient depuis des années, ne voudrais-tu pas le comprendre ?
– Il n’y a rien à comprendre, je suis comme ça, c’est tout.
– Ce besoin d’être aimé et de te conforter dans ton pouvoir de séduction ne t’apporte rien. Tu sais pourquoi ?
– Mais je suis heureux, je suis dans la joie…
– Tu es dans le factice, le mensonge et l’illusion. Ne voulant pas reconnaître tes faiblesses, tu les ériges en philosophie. Les femmes peuvent mourir d’amour pour toi, tu te présentes comme victime de ta séduction. Et tu y crois. C’est une illusion d’amour.
– Les mots que je dis sont vrais. Je suis vrai quand je suis avec toi.
– Tu sembles entier quand tu es avec quelqu’un, c’est ça qui trompe, tu y crois. Cette ferveur et foi que tu démontres ont les allures de la pureté, celle qui m’a touchée, mais ce qui te fait défaut, c’est ton absence totale de conscience, de cœur, ou si peu.
– Tu te trompes !
– Tu as un charme fou et rien ne t’embarrasse sur le fait de charmer. Tu penses aux autres uniquement dans le cadre de ton intérêt. C’est comme si tu n’étais pas arrivé à une maturité affective.
– Qu’est-ce que tu racontes ?
– L’état de l’enfant est l’inconscience. Quand il frappe quelqu’un, il rit. Tu n’as pas conscience qu’il y a une relation à autrui, tu n’es pas capable de t’abstraire de toi-même, tout d’abord, pour te regarder toi-même, ensuite pour regarder les autres. Ta séduction diabolique et monstrueuse fait preuve d’un égocentrisme absolu, comme celle d’un enfant immature dans le corps d’un homme mature, brillant, séducteur. Ces atouts du diable qui poussent les femmes jusqu’à l’extrême, voire la mort, sont comme le résultat d’un retard affectif. Comme un petit chat destructeur, tu tortures avec délice, dans la pureté absolue de la cruauté. Tu as un manque profond de sociabilité, de générosité affective. Comme l’enfant contrarié, tu piques ta crise quand on ne te donne pas ce que tu veux. Tu fais abstraction des autres. Le monde devrait être statique, avec seulement des gens joyeux d’être avec toi. Ça s’appelle le bonheur sélectif, artificiel. C’est un piètre bonheur. C’est la plénitude du bébé repu. Le vrai bonheur va bien au-delà de ça.
– Comment oses-tu ?
– Tu as un comportement puéril, tu nies toute réalité et psychologie humaine. On a tous été blessés à un moment ou à un autre. Tu as décidé de vivre dans le factice. C’est une malhonnêteté intellectuelle. Tu te mens à toi-même et trouves les excuses qui justifieraient ton comportement. Tu n’es pas capable d’osmose, de te tourner vers l’autre. Tu es ambitieux, tu as des qualités, mais il y a des qualités intellectuelles et morales. L’habitude du mensonge est ancrée en toi. Quand je te dis ces vérités, tu en as même une espèce de jouissance. Quand quelqu’un souffre à cause de toi, tu en es presque heureux.
– Mais je m’en sors très bien comme ça…
– Oui, parce que tu as fait théorie et justification le mensonge, afin de ne pas te découvrir toi-même. Tu ne peux aller au bout de tes velléités artistiques en éludant la sensibilité. Tu t’acharnes à défendre des causes humaines pour te démontrer qu’il y a de l’humain en toi mais quand ça touche ton relationnel direct, tu n’as plus aucune humanité. Tu n’as jamais pensé à moi en tant que moi. Comme sûrement d’autres femmes, j’ai voulu être ta Pygmalion, t’ouvrir les yeux sur le monde, sur l’amour, sur la réalité, sur le don. Cette pureté que tu te dégages dans ton effort de manipulation s’est confondue avec mon désir de pureté à moi d’amour, de relation…
– Il faut que tu te détaches de moi !
– Ce n’est pas le problème, il faut que tu m’entendes. Tu dis m’aimer mais tu ne penses pas une seconde à moi, tu es même plutôt en colère quand je souffre à cause de toi. « Comment puis-je te faire ça à toi ? Dis-tu… Je ne t’ai pas permis ce soir de passer une bonne soirée. Tu es tant concentré sur ton intérêt personnel ! Tu ne te poses même pas la question de savoir comment je vais… Tu as une absence totale de doute sur toi-même, de compassion, de remise en question, une psychorigidité cachée sous une forme de tolérance, de timidité feinte…
– Mensonge, mensonge !
– Dans l’amour, il doit y avoir échange, complicité, abandon, lâcher prise. Chez toi, cela est ponctuel. Ton cynisme ne t’embarrasse pas car tu n’as pas de conscience.
– Qu’est-ce que tu fais avec moi ?
– J’essaie de façon ultime de sauver celui que j’aime, sans trop y croire désormais. Je ne suis pas psy ! Le principe du psy, c’est justement cette absence de lien affectif, cette neutralité qui permet à l’autre de se regarder lui-même. Tu induis autour de toi l’amour total mais toi, tu ne ressens rien.
– Quand je suis avec toi, je ressens parfois…
– Dans l’illusion de l’instant seulement, ça n’a aucun rapport ! Tu as besoin d’être aimé mais tu te présentes comme une victime : Tu te gausses de « Regarde comme elles souffrent pour moi ! ». Tu en tires du plaisir ! À tes yeux, ce n’est pas toi qui fais du mal aux autres et de toute façon, ça ne te touche pas. Rien ne t’embarrasse dans le fait de jouer avec les gens, tu es absent de culpabilité et feins d’ignorer les incidences que tu induis. Cette drogue dont tu as besoin que tu infliges aux autres, cette dépendance mortelle que tu crées n’aurait, selon toi, aucun rapport avec toi. Ce serait ton charme irrésistible qui, sous l’habitude du mensonge, créerait cela. Pour les femmes, dont tu as terriblement besoin, c’est un cas psychanalytique idéal. Jouer le rôle d’une mère Térésa, sauveuse de l’humanité, aimant le père, l’enfant, puisque tu incarnes les deux ! Les bébés, on les aime parce qu’ils sont charmants, capricieux, inconscients, alors on les excuse. Tu n’as pas dépassé cette maturité affective, paradoxe total avec ton aspect adulte, brillant intellectuellement, cultivé…
– Je ne sens rien…
– Tu es obsédé par toi-même et ne peux envisager l’interaction à autrui. Quel gâchis de vie, de compétence, quel mal fait autour de toi !
– Balivernes, allez, viens !
– Rien ne te touche. Tu préfères le confort du leurre. Les autres te servent à alimenter ta pathologie. Tu as une négation totale des êtres, qui ne sont qu’objets pour servir ta cause. Ils n’existent pas en tant que tels. Ainsi, tu restes dans l’illusion et tu n’es pas blessé. Le mensonge cache et te cache certaines choses, mais tu verras qu’un jour, tout s’arrêtera. Ton fonctionnement ne portera plus. C’est une question de temps. Alors peut-être tu comprendras. Là, malgré mon amour, je vais partir. Ça ne m’intéresse pas d’être une marionnette dans un jeu, un objet de ton talent manipulateur, et je sais que tu as besoin de plusieurs personnages… Je sais que ça t’est égal de me perdre. Si je souligne ta manipulation, tu vas même en être fier, flatté, parce que tu es dans un cycle infernal qui ne te fait plus rien discerner. Toutes les âmes sont liées. L’errance et ton mauvais penchant n’acceptent pas d’excuses vu le nombre de personnes qui ont tenté de t’ouvrir les yeux. Ta maladie ne semble pas pouvoir se guérir. C’est la pire des condamnations. Une seule solution pour moi, la fuite ! Non seulement tu ne feras rien mais, et je le vois sur ton visage, tu es comblé de mon attention, flatté que je t’aie psychanalysé et je sais ce que tu vas faire instantanément après que j’aie fermé définitivement cette porte, tu vas sourire, sans être le moins du monde concerné…
L’ignorance d’un monde perdu
Dans un moment de sa vie, lors d’un amour intense qui ne fonctionnait guère, Laurence rencontra un homme, lors d’un anniversaire. Il n’y avait là essentiellement que des couples. Après avoir salué les amis qui l’avaient invitée, elle fut priée de se servir au buffet accueillant qui ornait la table du salon. La maison offrait une verrière donnant sur un magnifique jardin se prolongeant au loin par une forêt. Elle prit place à une table autour de laquelle étaient assis trois femmes et un homme. Charmant, le quadragénaire, qui semblait être le mari d’une des dames assises près de lui, était très jovial. Ils discutèrent de tout et de rien, mais quand ils abordèrent le thème de l’écriture et qu’elle lui annonça qu’elle avait déjà publié quelques livres, son attention s’aiguisa. Il lui confia que lui aussi écrivait mais que c’était un secret, et il ne l’avait jamais révélé à personne. Sa femme se désintéressait de lui et méprisait toute forme dexpression quelle qu’elle fût. Emprisonnée dans la logistique quotidienne, c’était une bonne mère mais hélas, se plaignait-il, incapable de s’adonner à quelque sujet intellectuel.
Laurence sentit que la révélation qu’il lui fit là était une confidence intime et douloureuse. Il lui livra n’avoir jamais montré ses écrits et lui demanda si elle voulait bien lui donner un avis sur ses textes. Elle lui répondit qu’elle le ferait avec plaisir. Son épouse, qui n’entendait pas ce qui se tramait, la regardait fixement et elle fut gênée de l’attention exclusive que Tim portait à son égard au milieu de la tablée. Il ne quitta pas sa nouvelle amie de la soirée et les regards ambiants ne cessèrent d’aller dans leur direction.
Peu après cette rencontre, Tim lui envoya des textes. Laurence les trouva très riches et découvrit avec étonnement la profondeur que cette personne avait enfouie en lui. Elle lui fit quelques remarques par mail, l’encourageant à continuer, à persévérer dans son écriture. Flatté et heureux de ce retour, il l’invita à dîner quelques jours plus tard.
Tim était un bel homme, plein d’humour et de sensibilité. Son intérêt pour la jeune femme grandissant, celle-ci était embarrassée, ne pouvant et ne voulant se détacher d’un amour qui l’envahissait encore. Dans quinze jours, elle commencerait un nouveau travail. Elle aspirait à partir avec l’homme qu’elle aimait mais celui-ci ne prêtait plus guère attention à elle, vaquant à des activités auxquelles il avait du mal à la mêler. Pourtant, elle ne demandait que ça, le voir, partager rires et émotions, élaborer des projets dont elle avait une soif effrénée. Mais il la maintenait à une telle distance qu’elle était, malgré tous ses efforts, devenue une étrangère pour lui. Cette situation lui était très difficile. Elle fonctionnait à découvert, dans l’authenticité, lui se dispersait dans des chemins obscurs qu’elle peinait à saisir.
Cet homme avait derrière lui une histoire sordide qu’il évoquait parfois, sans jamais se retourner vraiment. Une déception de jeunesse qui, semble-t-il, avait définitivement déterminé sa voie. Plus on avance en âge, avait-elle déduit (il avait 10 ans de plus qu’elle), plus on préfère ignorer son passé, celui-ci pouvant révéler un échec. Remettre en cause un fonctionnement de quarante ans de vie, se dit-elle, pouvait aboutir à un constat de déconvenue guère avouable. Et il était nettement plus confortable pour lui de continuer à fonctionner comme il l’avait toujours fait. Entre les femmes qui le portaient sur un piédestal et celle qui le titillerait sur son fond afin d’éclaircir le chemin, le choix était vite fait, conclut-elle. Repenser un mode opératoire construit au fil des années - qui lui permettait de vivre tant bien que mal - était malvenu. Enfermé dans un processus sans recours possible, il avait créé son propre enfermement. Ses contradictions, ses peurs, sa dureté et son intransigeance n’étaient que le symptôme d’un système clos auquel tout changement perturberait un équilibre présumé.
La vie pourtant le ramenait sans cesse aux mêmes épreuves, ses conquêtes féminines étaient l’expression d’un désir jamais assouvi et immédiatement, s’éveillait en lui la peur de la nature enfermante de l’amour. Dépendance ravageuse du désir de la mère et pourtant besoin continuel de l’éprouver !
Le travail, l’efficacité, les heures passées dans l’étude et les livres le dotaient d’une culture sans précédent, mais étaient aussi le signe de ce repli sur soi qui ne lui accordait pas de pause et encore moins l’introspection. Car cette course intellectuelle était une fuite, un paravent pour « épater la galerie ». L’« intelligence » qui en découlait n’avait rien des qualités essentielles que sont le discernement et une forme promise de sagesse. Elle ne lui servait qu’à se mettre en valeur, gonflant un ego déjà disproportionné, sans réel fondement. Pas de générosité affective, une sensibilité qui n’apparaissait pas, une sorte de connaissance à l’état brut, sans sensations ni appel au cœur…
Malgré ces traits de caractère qu’elle avait distingués, elle avait perçu autre chose. Et elle avait la prétention de le lui montrer. Mais pourquoi lui était-elle si dévouée ?
À quoi avait-il fait écho chez elle ? Avait-elle projeté sur lui un idéal, ou était-elle, comme tant d’autres, tombée dans le panneau de sa séduction, dont peu semblaient se relever… ? Si son fond était apparemment inatteignable, la forme prenait des effets pervers, « un jeu », ainsi qu’il le définissait. Il s’était vendu que pour bien vivre, il ne fallait s’accrocher à rien ni personne et avait donné à cette théorie le nom de « liberté. » Cette peur qu’une femme le « dévore » correspondait en fait à sa propre crainte de se lier. Il créait le désir, mais n’y répondait pas, ne s’y investissait pas, comme s’il appréhendait d’être mangé, avalé par l’autre. Ne pas s’attacher pour ne pas souffrir ?
Dans un besoin éternel de reconnaissance, tout était contrôlé chez lui. Paradoxalement, il s’appliquait à créer un lien qui n’en serait pas un, comme il plongeait dans une charge de travail à outrance dont ce n’est même pas la rétribution qui l’attirait. Il cherchait plutôt à éviter de se retrouver face à lui-même. Consommer, être reconnu, étaient son obsession, ignorant que ce qu’il attendait ne viendrait pas de là mais de sa libération intérieure !
Elle avait tout essayé pour lui faire entendre des choses, qu’aurait-elle pu faire d’autre ? Elle avait saisi la source de son comportement, ayant dès le départ perçu son errance malgré une résistance très forte, et elle persévérait, parce qu’elle l’aimait ! Elle tenait à lui, elle cherchait sa liberté d’aimer. Il ne l’avait pas compris et lui en voulait d’avoir décelé ses failles. Aujourd’hui, sa démarche tournait à l’absurde. Il refusait toute analyse, lui disait son attachement mais en venait à la repousser…
Comment en était-elle arrivée là ? Elle n’avait, pendant trois ans, vécu que pour lui, se souciant de son bien-être, l’aimant à chaque minute, à chaque seconde, jusqu’à une totale déroute. Elle était allée au bout de ce que tout être peut endurer, elle n’avait plus rien à dire. Il ne bougeait pas d’un pouce, repartait vers d’autres projets, l’ignorant, ne s’impliquant pas, ne la reconnaissant pas, ni pour ce qu’elle était, ni pour ce qu’elle avait ouvert en lui. L’avait-elle touché quelque part ? Elle ne le savait même pas. Il cherchait son contact, mais ne s’épanchait pas. Il disait lui écrire, mais ne lui adressait pas de lettres. Il n’avait pas le temps, ironisait-il, de se poser, de regarder, de contempler, de parler ! Et elle se sentait comme un objet… ou pire, comme un Jiminy Cricket servant de morale, de conscience, qu’il n’avait pas…
Il s’était forgé un refuge, alibi infini de la vie où l’on écarte l’essentiel. Penser, sentir, ressentir, confier seraient un aveu trop pénible, trop douloureux. Le temps l’avait recouvert de labeur, le labeur avait pris la forme de la survie, l’essence était écartée ou abordée très superficiellement. Il n’assumait pas les préjudices qu’il causait aux alentours. Il avait détourné la responsabilité, la culpabilité de ce qu’il engrenait, faisant fi des conséquences. Il avait créé ce mur d’insensibilité si contradictoire d’avec son aspect chaleureux et généreux. Il savait évincer habilement toute incohérence. Son activité lui permettait d’occuper l’espace, le lieu et les pensées, emplissant le temps dont il n’avait plus réelle notion.
« Il y a des gens qui ont l’amour, d’autres qui ne l’ont pas. J’ai la chance d’être de ceux-ci », fanfaronnait-il. Ainsi s’enchaînaient visages anonymes, figures multiples, femmes éperdument amoureuses, toutes enchaînées à lui par la dépendance qu’il provoquait.
« Il y a des gens qui se jouent de l’amour, d’autres qui en meurent, pensait-elle, d’aucuns qui invitent puis se retirent, qui attirent puis écrasent, tu as ta part dans le filet dans lequel tu saisis ces donzelles, et non des moindres. Tu t’en sers à ta guise puis tu passes à la suivante. Cela te remplit-il ? Tu es si méprisant ! ». « La femme de ma vie devra être ce qu’elle est, heureuse, je ne veux rien lui apporter, juste être un petit plus, surtout, qu’elle ne me demande rien ! Je ne veux partager que joie… Me voir sera pour elle allégresse, je ne veux pas entendre parler de souffrance, même celle que je peux induire ! », se déresponsabilisait-il. « Mais tu ne peux manier les gens à ton gré ! Une liaison, c’est un échange, le bonheur de rendre heureux aussi ! », clamait-elle. L’homme niait sa responsabilité, ses aspirations, son passé, ses douleurs, ses désirs, son fondement. Il était sans cesse en quête, comme s’il était normal que les autres réparent sa vie, se vengeant quelque part de ce qu’il n’avait pu obtenir, et attribuait aux autres ce qu’ils subissaient à cause de lui, s’affranchissant de ce qu’il induisait.
Elle détestait l’image qu’il lui avait accolée. Elle ne prônait qu’amour et douceur, ne recevait que dérision et disparition. Se taire étant pour elle impossible, elle était devenue, malgré elle, une sorte de sainte à ses yeux, parce qu’elle ne le brossait pas dans le sens du poil et tentait d’émettre une vérité. Au début de leur relation, il l’avait accueillie comme sa libératrice, lui avait demandé de l’aider à changer et elle s’était jetée corps et âme dans cette entreprise. Elle était si désolée pour lui. Elle voulait qu’il se libère, elle souhaitait son bonheur, son ouverture, sa reconnaissance, mais elle ne se sentait d’aucun recours, lui continuait sa ronde infernale et elle souffrait de ce potentiel gâché et de son papillonnage incessant. Bien sûr, elle ignorait à cette époque le piège qui lui était dressé. Elle était sous emprise, mais ne le concevait pas encore. Le prédateur tirait à lui ses marionnettes et elle incarnait son pygmalion…
Pourquoi est-elle partie dans ces considérations… Tim… Tim lui proposa instantanément de partir avec lui une semaine en vacances. S’étant engagée dans une formation professionnelle, elle savait que pendant six mois, elle ne pourrait plus être disponible pour quelque congé... Elle était donc libre et ne le serait pas avant longtemps. Elle interrogea le père de famille : « Mais… ta femme, ton fils... ? » « Je m’arrange », avança-t-il.
En avait-elle envie ? Oui, elle aimait les voyages, elle avait besoin de se changer les idées, mais Tim, qu’elle connaissait seulement depuis deux semaines, lui proposait ce dont elle rêvait, non avec lui, mais avec son amant. Les week-ends qu’elle avait passés avec ce dernier s’étaient interrompus sans qu’elle comprenne pourquoi… Tim, dans sa spontanéité et l’amour qu’il lui portait déjà, l’invitait si gentiment, se souciait d’elle, de son bien-être, de son état…
Elle hésita cependant, elle aimait son ami et non Tim. Et elle ne voulait pas casser l’union de ce dernier... Elle lui proposa de lui donner une réponse un peu plus tard.
La semaine qui suivit, il ne cessa de la relancer, lui rendit visite, se préoccupant d’elle comme on ne l’avait jamais fait. Sans se confier à lui totalement, elle lui avait raconté un peu son histoire, son amour fou pour cet homme pour qui elle avait risqué ma vie, sans qu’il le sût, cet élan qu’elle ne pouvait s’empêcher d’avoir vers lui. Elle évoqua ses amis, ceux qui l’avaient sauvée in extremis et pour qui elle vouait une éternelle gratitude, ceux-là mêmes qui par leur présence, leur sollicitude, leur bienveillance, l’avaient tant soutenue, quand elle pleurait, criait, tomba…
Ces proches, qui furent présents en toute circonstance (même quand elle ne pouvait plus marcher dans la rue !), l’avaient supportée malgré leur désapprobation, leur colère sur son état, lui procurant amitié, amour… mais malgré tout cela, son sentiment pour celui qui lui disait parfois qu’il est beau de penser à la mort (!) était resté intact…
Alors Tim, nouvelle conquête donc, arrive, sincère, aimant, prévenant… Forcément, il l’interpelle dans ce moment où elle pointe de plus en plus les incohérences de l’Autre, qui ne fait qu’aspirer son amour sans rien donner en retour… « Les sentiments… ça n’existe pas, ça dure cinq minutes. Juste après, je n’y pense plus », s’amusait-il à lui dire, hautainement. Être rentable, efficace… « Et puis, les hommes sont lâches et égoïstes, pourquoi échapperais-je à la règle ? » Que dire après cela, qu’elle aimait ses cheveux longs et qu’elle n’était pas là pour l’encenser, qu’elle ne pouvait rentrer dans ce divertissement dont quiconque en dévie est hors circuit, que ces fatalités n’étaient qu’alibis, effronterie ? Ses sentiments si difficiles à déceler, il ne les exprimait pas directement, mais par allusion. Ne pas avouer, ne pas entretenir un lien continu, ne pas se détacher du nœud intérieur... Usant de son pouvoir, de son charme et de sa fragilité apparente pour amorcer les relations, il simulait l’inconscience, reportant sa propre problématique sur les autres, écartant tout ressenti : « La vie est un jeu… » Et même s’il n’était jamais heureux, il se disait joyeux, gai, croquant la vie. « Il fait froid, je veux ma couverture, mes livres, mon travail, le reste n’est que futilité… » Sentences, actes manqués…
Elle essuya ses larmes (à quoi servent donc ces bouts d’eaux qui coulent sur les joues ?), revenant à Tim. Le lendemain, elle accepta d’être du voyage, pour faire une pause ; oublier les lettres, qu’elle n’avait jamais reçues, malgré ses promesses ; oublier ce qui lui revenait sans cesse, l’empêchant de passer à autre chose, de continuer sa vie… Le drame l’avait couverte, recouverte, emprisonnée – tout son monde se focalisait désormais en cet homme, qu’elle avait entrepris de sauver ! – Elle ne cessait de l’analyser, troublée, sidérée qu’on puisse se conduire de façon aussi désinvolte, irrespectueuse. Elle en souffrait, et se souvint que des femmes en étaient mortes. Il fallait enrayer le phénomène, si ce n’est pour elle, pour elles…
Elle passa un agréable week-end avec Tim dans un superbe hôtel de charme en Normandie. Il était enfin heureux, lui susurra-t-il. Elle lui rappela que c’était un autre qu’elle aimait. Il opina de la tête...
À leur retour, il la rappela sans cesse, mais elle ne pouvait plus. Elle ne voulait plus. Elle ne jouait pas avec les hommes, elle ne pouvait le laisser espérer. Elle eut peur quand un soir, il débarqua chez elle, avec deux valises à la main. Il venait de téléphoner à sa femme et de lui annoncer qu’il la quittait. Elle était paniquée, ne voulait surtout pas qu’il commette un tel acte, pas pour elle. Il lui rétorqua que cela n’avait pas de rapport avec leur liaison, qu’il vivait depuis quinze ans « dans le non-sens », qu’il était enfin libéré. Il la remerciait pour son honnêteté et sa prévenance.
Laurence était désolée et profondément émue. Elle n’était pas prête, il le comprit, il savait depuis le départ, il lui sourit. Elle fut soulagée. « Je t’aime, je serai là si tu le veux » émit-il.
« Ne m’attends pas, Tim, mon cœur est pris, tu le sais ».
« Oui, je sais… »
Le roman est aujourd’hui terminé. Les années ont passé. Si le temps est censé porter conseil, quel conseil tirer d’une manipulation sordide ? Le prédateur qu’elle a tant aimé ne trouve plus de femmes, est atteint d’andropause, et de cataracte - qu’il ne soigne pas car il a peur de se faire opérer. Avant, les femmes s’attachaient à lui, maintenant, les proies se font rares, ne rentrent plus dans son jeu, et il ne séduit plus. Il effleure la surface et tente de sauver la face, mais elle sait qu’il est perdu. Il est trop douloureux de se réveiller après tant de temps.
« T’estimer », a-t-il conclu.
Toutes ses tentatives restèrent vaines. Elle fut un intermède, dans un carcan éternellement fermé. Jamais il ne l’honora, ne la considéra, ne commenta ses paradoxes. Clos dans sa prison dorée, il ne put briser le monde de la fuite et du silence. Avec Lui, elle fut loin de la célébration, elle fut dans une terre dépeuplée, sans repères, un univers nié dans lequel, la confiance bafouée, la rigueur du caractère avait pris le pouvoir sur la sensibilité reconnue. Il est impossible de secourir les morts...
© S. Mostrel
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Séance 3 : le collectionneur bourru
Hasards, coïncidences
Correspondance, annonciations
Réveiller un corps, un cœur, un désir
Révéler l’intellect, le plaisir, l’affectif
Rétablir l’ordre des choses…
– Les choses ne m’atteignent pas…
– Comment cela est-il arrivé ?
– Je suis prêt à renoncer à toi
– Mais ces mots, tous ces mots…
– Je suis ainsi, n’attends rien de moi !
– Mais un jour, tu as chanté : « J’ai tellement peur que tu me laisses », tout cela est-il si anodin ?
– Surface et boule de gomme, vérité du moment !
– Mais ce hasard, notre rencontre, ces coïncidences, l’annonciation…
– Pas le temps, pas envie, détente d’un instant.
– Le temps justement, ne faut-il pas y penser, bâtir afin de recouvrir un morceau du monde ?
– Relations éphémères, je suis une société plénière, à moi, tout à moi.
– Mais l’envie, le besoin, pourquoi te refermes-tu ?
– Je suis comme les pages de mon livre, inapte à l’amour, dans le non-retour. Les livres ne me sollicitent pas, eux, ils m’enrichissent, ils ne posent pas de questions, ne me demandent rien. Ils sont ce qu’ils sont…
– Mais ce plaisir d’aimer n’est-il que fugace ?
– Il me remplit un moment mais soudain, je me lasse.
- Jamais besoin de l’autre, ce manque qui vient aux tripes ?
– Je me suis interdit, j’ai promis, plus jamais ! (il crie)
– Mais ceci ne veut-il pas dire renoncer ?
– La peur est bien plus forte et je ne suis pas prêt.
– Prêt à quoi ? Je ne demande rien, sauf la cohérence et vivre le refrain…
– Prêt à ouvrir les vannes, à me laisser mener, à lâcher ma douleur, à rouvrir mon cœur.
Dans ma prose, je peux avec joie exprimer les paroles, mes pensées, l’amour, sa vérité…
– Et dans la vie réelle ?
– Ne pas trop approcher, sous peine de rejet. Ne pas me critiquer, sous peine d’indifférence.
– Mais ces paroles, ces aveux insensés, tes je t’aime incessants, ne sont-ils qu’une théorie, des pages entamées ?
– Dans les livres, je me penche et ainsi, je m’évade, vivre le texte, je le fais dans ma tête. Je n’ai nul besoin de respirer parfums et journées langoureuses, entonner des refrains…
– Mais ce temps qui s’ajoute aux années de folie, semblable à un feuilleton qui n’est jamais fini, ces étapes sanglantes, ces cœurs endoloris, n’aimerais-tu pas changer le cours de ta vie ?
– Ainsi, je fonctionne et c’est ce que je suis. Si ça ne te convient pas, fuis !
– Mais je t’aime, je te veux, je veux comprendre l’interdit, je n’ai nulle intention de fouiner dans ta vie, je veux juste t’ouvrir à l’amour, aux valeurs, qui avec l’intellect font la beauté des nuits.
– La nuit est belle sans tous ces soucis.
– Mais les éluder ne peut les affranchir.
– Mes histoires sont terribles et je suis insensible ! Le drame m’est utile, c’est ainsi que je vis. Je ne suis pas responsable des sentiments des autres et du réveil de mon inévitable ennui. Je connais le danger mais ne peux l’assumer. Maintenant, ça suffit, je ne veux pas penser à ces actes invitants, c’est un jeu de cartes, voire un jeu de poker, il y a le gagnant et il y a celui qui perd !
– Il n’y a pas de fatalité ni de choses figées. La liberté, c’est d’aimer sereinement et non de fuir le lien. Tu blesses, puis tu contestes la complainte quand c’est toi qui l’induis. Aimer est être auprès de l’être aimé, se soucier de lui, donner, réconforter…
– Si tu n’es pas bien avec moi, si je ne suis que source de reproches, si tu n’es pas heureuse, va-t’en !
– Mais ce n’est pas ce que je dis, ce que j’essaie de formuler, c’est que tu crées les choses qui t’arrivent, qu’il faut les changer, briser cette mécanique, ouvre-toi, ne coupe pas ta foi en moi.
– Je n’ai pas le remède et ne veux le chercher, je retourne au bercail, laisse-moi travailler !
– Si tu savais comme je veux t’aider, comme j’aimerais avec toi collaborer !
– Débrouille-toi, détourne-toi de moi, as-tu besoin d’un homme ?
– C’est ton contact qui m’épanouit, car je t’aime, tout simplement !
– Tu ne comprends pas…
– Ne veux-tu pas élucider enfin l’origine de tout ça, cette vie bizarre, ces images, ces ravages ?
– Laisse tomber !
Es-tu encore sous la coupe de cet amour ancien, sous l’effet de la mort, de ces catastrophes que tu continues à provoquer, plongeant ton assemblée-harem dans les extrêmes, la vie ou la disparition, la comédie, la tragédie… ?
– Oui, c’est vrai, je ne peux oublier.
– Personne ne te demande d’oublier, mais de surmonter et de ne pas déporter ton mal-être, assume tes actes, même inconscients !
– Je ne sais pas aimer, je ne peux considérer, ma douleur est trop grande, laisse-moi travailler !
– Le travail est excellent mais n’est pas suffisant. L’amour donne des ailes et complète labeur par des énergies nouvelles, amenant l’équilibre. Et il est faux que tu ne sais pas aimer. Tu es dur parfois et intransigeant, car tu ne te laisses pas aller à tes sentiments, tu bloques toujours à un moment, alors qu’il n’y a pas de raison pour ça…
– Alors, je ne m’avance plus…
– Mais ce n’est pas la question, pourquoi ce manège, pour réparer quoi, pour éviter quoi, ne serais-tu pas plus heureux si ta vie était honnête ?
– Je n’ai pas le temps. Tellement de choses à faire !
– Il faut apprendre à vivre, « faire » ne va pas sans ressentir. Le repli n’est qu’un refuge, seul l’amour démontre le sens de la vie…
– Prétentieux jugement !
– Peut-être, mais juste.
– Je n’ai nul besoin d’amour
– Si, tu séduis tout le temps et tu aimes ça, en parler, t’étonner de l’effet que sur les femmes tu fais, tu te dédouanes des responsabilités…
– Ça me conforte et c’est leur choix.
– Non, c’est ton jeu qui leur fait croire au possible, quand d’emblée, tu refermes tout attachement.
– Je cherche une femme qui n’a pas besoin de moi…
– Ça ne veut rien dire, si elle t’aime, elle a besoin de toi, de ta présence, de ton amour, de ton implication !
– Je ne veux donner qu’une partie de moi, le reste, j’en suis incapable et je n’y crois pas.
– Ces relations ne sont qu’étincelles de vie. Une petite vie au dehors, la peine en dedans…
– Rien ne m’atteint, tu entends ? (il hurle…)
Silence…
– Mon amour, il est encore temps. La vie passe, les déceptions aussi... Tu as tellement de choses à accomplir. Je t’offre cet amour, pour te combler, te libérer.
– Ça ne m’intéresse pas. Tu me demandes trop…
– Non, je demande ce qui est normal entre deux personnes qui sont censées s’aimer. Se voir, faire des projets, partir en vacances, communiquer…
– Je n’aime pas aimer.
– Pourquoi, à cause de cette fille qui un jour t’a quitté ? D’où cette revanche à vie ? Tu ne penses qu’à toi !
– Je ne fonctionne que par rapport à moi-même.
Oui, mais moi, je suis un tout, avec mes compétences, mes atouts, mes faiblesses, mes désirs, mes besoins, mes souffrances. Quand on aime vraiment, on prend tout. Je ne dois pas être la bonne personne…
– Je ne crois pas à ce système.
– Ne faut-il pas plonger dans le mal pour l’exorciser une fois pour toutes ?
– Je suis bien et proche du Paradis.
– Ne faut-il pas régler ce passé trop présent ?
– Que sais-tu de moi, tu t’imagines ce que je ne suis pas !
– Non, bien sûr, je spécule et m’avance, mais ce que j’ai ressenti, personne ne me l’enlèvera. J’ai cette intuition qui… aujourd’hui rejoint l’absurde !
– Qui es-tu pour avoir des certitudes ?
– Quelqu’un qui comprend, qui t’aime et te sourit.
- Que saisis-tu de moi ?
– Beaucoup car je t’écoute. L’écoute est essence, le don, renaissance, la confiance, première… Tu dois résoudre ce que tu te fais à toi-même, et aux autres, notamment à moi…
- Foutaise, les autres ne font que ce qu’ils veulent. Je ne suis pas responsable de leurs actes ou de leurs pensées, laisse-moi tranquille !
– Beaucoup de choses ne m’atteignent pas moi aussi, comme l’envie, l’orgueil, la jalousie ou la provocation, mais ce qui m’atteint, ce sont les gens que j’aime, qui se braquent, par orgueil, par peur de s’ouvrir aux émois…
– J’ai depuis longtemps refermé la porte des émotions, malheur à celui qui la rouvrira. C’est une décision irréversible. Laisse-moi !
– Soit, je m’en vais, comme tu voudras, je suis désolée et t’aime malgré cela. Continue tes scenarii et à alimenter ta vie par le multiple à l’infini. Le désir ne viendra pas tant que tu ne sortiras pas de ce cercle vicieux. Tu ne veux pas parler de cela, n’est-ce pas, de la libre circulation… Ce sont des sujets tabous. Dommage ! Les mots d’amour sont si difficiles pour toi à exprimer. La confiance, l’élan, tu les fuis à chaque fois. Je préfère quand tu me dis je t’aime ! Les paroles qui sortent du cœur entrent dans le cœur. Moi, je t’aime, le dis, le clame. Je ne réussis pas à te faire voir d’autres horizons, à te faire exprimer tes sentiments, non éphémères mais réels, à te faire abolir les excuses, les préétablis, à t’ouvrir à l’amour, à la vie…
– Ma vie est mon œuvre. Le reste n’est qu’artifice et c’est plutôt plaisant…
– Oui, je sais, tu fais fi de ce que je ressens. Tu maintiens ton corps dans le virtuel. Le vrai plaisir ne provient que dans l’investissement. Tu rejettes tout pour ne pas te pencher sur toi-même. Tu es si instable ! Tu cherches quelque chose qui n’existe pas, en attendant, tu fais du mal, et quand bien même le sur-mesure existerait, il n’aurait aucun intérêt, car figé, prédéfini d’avance, froid, rigide, stérile. Le but est de grandir et d’évoluer dans ses pensées !
- Tes mots sont reproches, infamies, calomnies, tu rêves que je peux assouvir ta vie, je ne suis pas celui que tu attends…
– J’essaie de faire resurgir ton fond, mais tu l’as si bien enfoui… En résolvant ton passé, tu serais plus heureux, avec ou sans moi…
– Prétentieux ! Je suis heureux ainsi, je ne crois pas au bonheur, sauf quand il disparaît…
– Et ta violence, et ces instincts fatals, est-ce normal, n’y aurait-il qu’une voie au bonheur présumé, rentrer dans « ta » dite liberté ? Les choses sont statiques avec toi, sans issue, n’y a-t-il nulle issue à ce salmigondis ? Tu voulais que nous partions ensemble, tu voulais me confier tes écrits, tu voulais réfléchir et peut-être résoudre. Parfois, il faut savoir partager la peine, comme la joie… Cela fait partie de l’amour, sinon, rien que surface ne subsiste. Tu ne veux pas de lien, tu t’avances, tu recules, au gré de tes humeurs, tu m’appelles ou m'invectives… Comment sur ce chemin si individualiste partager une romance, ça me rend si triste ! Mon âtre, mon cadre te sont inconnus, je me sens comme une étrangère...
– Tu as ta vie, j’ai la mienne… Reste avec moi si tu veux, mais ne m’en demande pas plus !
– Aimer est présence et sollicitude. On ne peut pas jouer toute son existence, un jour, il faudra accepter de rencontrer la vérité, et accepter l’amour. La vérité est l’évidence. La vérité est l’amour.
Séance 4 : l’emprise amoureuse
« Le doute et la peur sont les auxiliaires des grandes initiatives. »
AMÉLIE NOTHOMB
La Femme : Pourquoi es-tu si cruel ?
L’Homme : Je me sens attaqué.
– Par l’emprise amoureuse ?
– Ça me fait peur
– Alors tu fuis...
– Oui, je ne sais pas faire autrement.
– Mais tes réactions sont dures, ça frôle le sadisme parfois !
– Sadisme, ne crois-tu pas que tu exagères !
– Le sadisme civilisé nie purement et simplement l’existence de la douleur.
– J’ai tellement souffert que plus personne n'a le droit de me blesser, même sans intention…
– Tu joues à l’invulnérable !
– Mon but est de contrôler, de maîtriser tout ce qui est affectif, tout ce que je ne domine pas m’effraie.
– Mais c’est une régression ! L’angoisse de castration qui revient ! Pour ne pas être victime, le sadique devient bourreau !
– J’ai besoin des femmes pour exister psychiquement, elles dépendent de moi autant que je dépends d’elle.
– Soit, mais il y a un sadisme « bienveillant » et un autre malveillant. Il est bienveillant lorsque le sadique est persuadé d'agir pour le bien de celui qu'il contrôle : par exemple, c'est le cas, bien connu des psychologues, des mères abusives… Il est malveillant lorsque le sadique ne fait que rechercher sa jouissance personnelle.
– Je suis en fait quelqu’un de très angoissé. Tout ce qui dérange ma construction mentale de la vie me panique. Je dois contrôler l’espace. Je me situe en marge du monde. J’aime susciter chez l’autre un attachement absolu.
– Ton système de défense est très organisé, mais ne te sert pas, parce que tu vois bien qu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.
– Je n’ai pas de souffrance, pas de conscience.
– En psychologie, on appelle ça le complexe compensé. Moi, je dirais plutôt que c’est le complexe stéréotype. Toujours la même séquence se reproduit, le même scénario. Tu sais, je remarque que tu utilises souvent les mêmes phrases, les mêmes mots, les mêmes excuses…
– De quoi parles-tu, Madame je-sais-tout ?
– Du complexe d’abandon, d’exclusion, de rejet, tu devrais rechercher dans ton enfance ce qui touche à ce phénomène, par exemple, ta mère t’aurait laissé seul un jour et tu aurais eu peur, ou lors de la naissance d’un de tes frères, elle aurait transféré son amour pour toi vers un autre, ou je ne sais pas, toi seul as la clé…
– Je ne me rappelle de rien !
– Cherche un peu, les choses non résolues entraînent des dégâts dans la vie adulte : ce syndrome est connu : on fait taire toute forme d’affectivité, on nie toute affection ou toute chaleur et tendresse, ça s’appelle la forme défensive de l’anesthésie affective. D’ailleurs, ces hommes aiment s'attirer des femmes douces et demandeuses d'affection… Sous la forme intellectualisée, on se moque de tout ce qui est affectif, et sur une forme surintellectualisée, on monte le complexe sur une base philosophique, une forme très intellectualisée de la vie, ou humanitaire, on y parle de la condition humaine…
– Je ne sais pas de quoi tu parles.
– Écoute, Monsieur l’Insensible, toi, tu ne cherches pas, mais moi, je cherche, tu ne me laisses guère le choix, alors j’étudie les choses.
- Ridicule !
– Que puis-je envisager d’autre, il y a d’autres types de complexes... Les parents peuvent être formidables mais castrateurs, et engendrer des complexes de culpabilité. Ça, ça s’appelle le complexe de castration, et ça détruit la confiance pendant l’enfance. Il y a alors négation de la sexualité. La sexualité devient platonique.
– Tu n’es pas psy que je sache !
– Non, mais je m’intéresse à cette « science » et je m’intéresse surtout à toi, alors analyse tes symptômes : insensibilité apparente, repli sur soi, peurs, agressivité, violence, goût du pouvoir…Une charge émotionnelle forte peut impliquer tout cela, ça n’a rien de condamnable, on est tous faits de choses et d’autres, ce sont des pulsions qu’on a tous en soi mais quand elles sont dérangeantes et qu’on rentre dans des schémas répétitifs, il faut se poser des questions… Il y a des théories selon lesquelles on ne tient aucun compte de la souffrance d’autrui car « autrui » est situé au-delà de la souffrance. Autrui n’existe que dans l’inexistence, ne commence à exister qu’à partir de son inexistence, tant la passion d’être unique et unique objet d’élection est absolue. C’est la pulsion de pouvoir, dont la cruauté n’est manifeste qu’aux yeux de l’autre…
– Non, mais qu’est-ce que tu racontes ?
– Je veux élucider ton comportement, j’en ai besoin. Il me faut comprendre, résoudre, réparer…
– Si tu n’as que ça à faire !
– Oui, c’est important pour moi. Je veux comprendre ton insensibilité. Ce jeu me fait mal, tu continues à ignorer ce que tu provoques, cela suscite en toi comme une sorte de plaisir.
– C’est morbide, ce que tu dis.
– Oui, ça l’est, mais tu ne veux pas m’éclairer, tu ne veux pas t’occuper de toi. Je ne peux qu’aller selon mes ressentis. Ces pulsions, non sexuelles à l’origine, orientent aussi la vie sexuelle. Le pouvoir est au-delà du plaisir, en synergie ou en antagonisme avec les pulsions sexuelles et les pulsions d’auto conservation. D’autre part, la pulsion de mort peut limiter et faire échec à la pulsion de pouvoir. C’est aussi dans cette entame du narcissisme, dans son altération, son devenir-autre, que se manifeste le penser-avec-l’autre et la conscience de culpabilité.
– Le sexe, la réussite, la performance ne m’obsèdent pas !
– Il y a ces choses, la libre-circulation dont tu parles, ces compétences intellectuelles que tu as, ton narcissisme, ton obstination, l’agressivité qu’il y a en toi, comme si tu te débattais, ces contradictions permanentes…
– La vie, quoi !
– Non, TA vie ! Parfois, des choses m’inquiètent. Ce livre qui te fascine, comment s’appelle-t-il déjà ? Ah oui, « La femme et le pantin », de Pierre Louys, comme s’il n’y avait qu’un moyen d’arriver à l’amour, une sorte de dépendance, sadique, malsaine... Au service des pulsions de destruction et d'autoconservation, la pulsion d'emprise amoureuse alimente le sadomasochisme et peut se conjuguer avec le plaisir sexuel ou moral à faire souffrir comme à souffrir. Le point d'émergence de l'obsession se situe exactement entre le contrôle et la perte de contrôle, entre la nécessité impérieuse d'exercer son emprise et la peur catastrophique de ne pas pouvoir.
– Je ne comprends rien…
– Il existe en toi quelque chose qui est antinomique, qui ne te correspond pas. Tu ne m’enlèveras pas ça de la tête. Et je sais certaines choses, je t’ai dit que je les ai toujours sues… J’irai au bout de mes extrapolations et je n’en suis plus très loin.
– Arrogance !
– Je n’ai plus le choix, je veux que tu arrêtes de faire du mal.
– Cesse de faire l’enfant !
Ou tu ne comprends pas, et alors, je ne peux que t’ouvrir les yeux, ou tu comprends très bien – ce que je crois -, et tu joues. Je veux que tu cesses de jouer, que tu comprennes que ce jeu ne mène à rien. Casse cet automatisme, arrête de nuire. Tu peux aussi faire du bien !
– Je résiste.
Je sais, mais un jour, tu n’auras pas le choix, tôt ou tard, tu seras face à toi-même. Tu regretteras alors de n’avoir pas résolu ta névrose, que dis-je, ta psychose ! Prends conseil, cesse de te réfugier dans ta bulle, ne reste pas passif, accepte l’introspection. À moins que tu n’attendes ce fameux événement qui bouleversera tes certitudes : événement de la vie, familial, affectif, professionnel, andropause… Mais alors, il sera vraiment trop tard.
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Table
Clair de femmes
« Sous prétexte que la perfection n’est pas de ce monde, ne gardez pas soigneusement tous vos défauts. »
JULES RENARD
– Qu’est-ce que ce que tu as vu comme film dernièrement ?
– Je ne sais plus, un film de Chabrol, je crois.
– Oui, celui-là, tu l’as vu avec moi…
Elle fit mine de ne pas remarquer la chose. Elle aurait pu s’en offusquer, protester, lui faire une remarque. Elle ne chercha pas à l’embarrasser. Cela l’avait-elle blessée ? Certainement, vu l’ardeur qu’elle lui portait, mais elle se devait d’être indulgente.
Cet amour lui était bien trop précieux pour permettre à quiconque, y compris lui, de l’altérer. Elle ignorait si elle n’était pas bernée quelque part, mais cette relation se devait d’être préservée, entretenue, sauvée... Parce que sa vie se jouait là, à ce moment précis. Interroger, méditer, raisonner, imaginer, psychanalyser, dialoguer avec l’invisible, c’est ce que va tenter de faire l’amoureuse éperdue… Tenter le vous, le tu, le il, le elles, avec ou sans rimes, avec ou sans lui…
Vous tu elles
Vous et tu
Une belle balade
Pour toi et vous
Pour elles…
Faut-il vous dire, Monsieur, ce qui traverse mon cœur ?
Fait-il vous déclamer vers et prose envoûtante, comme il en est d’usage, d’une femme à son amant ?
Faut-il décrire l’absence, les mensonges, les faux airs, jouer le jeu du manque, les paroles fuyantes ?
Faut-il vous confier mon amour empressé ? Il vous flatterait sûrement, vous qui êtes si concentré sur votre image, de savoir que sujet, vous êtes, de toute cette attention… Je vous sais friand de ces relations qui vous permettent d’exister…
Vous qui errez dans la ville comme moi je tangue dans mes rêves, êtes-vous un homme sensible, me demandais-je ? Je pourrais alors vous écrire le feu et les promesses, enrober de tendresse la moindre de mes instances, vous servir ma romance, me fondre dans le tourment, imaginer les lieux et les emplois du temps que vous occupez, d’un rendez-vous à l’autre… Je pourrais… incarner votre Jiminy Cricket, prendre la place du sage, vous mener au ciel, vous faire grimper les marches de la conscience (bien plus précieuses que celles de la connaissance, le savez-vous ?). Qu’il est bon d’élargir les champs du cœur, rejoindre les instincts vitaux, essentiels, retrouver l’origine de toute chose, célébrer la vie, en somme, dans le présent qu’elle offre. Faut-il, plaît-il ?
Ou faut-il aujourd’hui te dire en face ce qui me prend, homme futile et égoïste !
Tu vis et as oublié le Sens. Tu marches sans connaître l’essence. Tu avances dans un fracas brisant les silences primordiaux. Tu as omis de tendre la main. Tu te veux séducteur, irrésistible, humaniste, quand ta face est voilée ! Tu as renoncé depuis bien longtemps à la grâce, à l’élégance, à la vie. Tu as oublié que ton physique extérieur, certes avantageux, n’est qu’un vêtement, ton corps, un outil, ton âme, où es ton âme ? Je n’entends plus rien, je ne peux que rêver… d’universel.
Confidence
J’ai le cœur gros ce soir et demandeur d’étoiles…
Tu te demandes qui je suis. Tu veux instamment savoir. Tu ne veux pas vivre bêtement ta vie. Tu l’as déjà fait, dis-tu. Je n’ai pas voulu vivre bêtement. J’ai lutté à ma façon, pour sortir de l’emprise... Un jour, je te raconterai. Peut-être… Écoute…
– Il venait tous les soirs chez moi, jusqu’à 1 heure, parfois 2-3 heures du matin. On s’était connus au travail. Il se trouvait dans le bureau d’à côté, et dès le départ, j’avais été séduite par son naturel, son enthousiasme et sa sensibilité. Il venait souvent me demander des cigarettes. C’était juste avant la sortie de mon premier disque. Et puis, un jour, il s’est approché d’un peu trop près. Derrière moi, je sentais des ondes passer, sa respiration, son odeur. Je n’ai rien dit. Je savais qu’il m’aimait beaucoup. Le soir, je lui ai laissé un message sur son portable : « Est-ce que tu veux coucher avec moi ? » Il m’a rappelée le lendemain, très ému. Il était un peu sous le choc.
C’est ainsi que notre histoire commença, avec des dizaines de coups de fil par jour, des dîners, des visites chez moi, je ne sais pas comment il s’arrangeait pour être aussi disponible, car il n’était pas libre. Harry était juif. Sa famille avait été en partie exterminée dans les camps, j’étais très sensible à cette tragédie et nous nous révoltions ensemble, contre le négationnisme, contre les insultes que subissaient de nouveau les survivants. Nous avions des références communes, un terrain de complicité supplémentaire. Et puis un jour, il a fait un malaise cardiaque dans ma cuisine. J’ai eu très peur. Le lendemain, il a débarqué avec ses valises, il voulait tout quitter... Je n’ai pas pu…
– Je comprends…
– Que comprends-tu ? Que sais-tu de la sexualité des femmes, que dis-je, de toutes les filles à qui l’on impose un interdit puissant quand elles découvrent leur corps mais dont les parents ferment les yeux quand elles subissent des attouchements, voire sont violées ? Que connais-tu des tétanies ou maladies psychosomatiques qu’elles développent pour faire barrage aux agresseurs potentiels ? Que saisis-tu du paradoxe de ces familles qui élèvent leur progéniture comme des saints alors qu’ils sont dans l’adultère ?
– Je ne comprends pas…
– Écoute, toi qui ne comprends pas, mon histoire.
– …
– À 4 ans, tu découvres par hasard le plaisir en te roulant sur un ballon, à 9 ans, tu vis ton premier baiser avec un camarade de classe, au fond de la cour du collège, puis tu continues la récréation sur les bancs de l’école, mal à l’aise... Quelques années plus tard, tu as tes règles. Tu vis des choses bizarres et tu as peur quand cet homme tordu te déshabille du regard dans la rue et ouvre soudain son manteau et te montre son sexe... Alors, tu fais attention à ne pas porter des vêtements trop suggestifs, tu rhabilles ta naïveté et trouves une passion pour rêver. Sur le chemin de la vie, tu rencontres des gens étranges, un type qui renverse ses yeux pour te faire peur, un autre qui ne te lâche plus et dont tu ne sais comment échapper aux menaces... Heureusement, il y a les bons copains, ceux qui chantent avec toi dans le groupe que tu as formé et qui prônent amitié, solidarité, « be cool ! ». Tu en fais craquer plus d’un, tu essaies de ne jamais blesser, tu cherches déjà l’homme de ta vie... Un jour, tu as 20 ans, tu perds un ami, et tu relativises. Tu as conscience de la brièveté et de la préciosité de l’existence et tu sais déjà qu’elle n’est pas simple. Tu joues, tu ris, tu couches, tu caresses, tu embrasses, tu jouis. Le sexe, part importante de la vie… Tu rêves, tu fuies, tu tentes d’accéder à la vérité, mais il y a des relations qui ne laissent aucune trace dans le corps… Tu veux vivre, ressentir, tu expérimentes, tu découvres des corps enchevêtrés les uns sur les autres dans un club échangiste, tu es fascinée et horrifiée à la fois, tu as vu, ça t’a suffi. Instincts, jouissance… Une nuit, chez des amis, une fille te drague, tu n’es pas portée là-dessus et tu ne fermes pas l’œil de la nuit. L’amour avec les femmes, ce n’est pas ton truc. 25 ans, tu prends des risques, tu as une aventure avec un mec qui sort de prison, tu veux lui donner une seconde chance, tu découvres beaucoup de tendresse. Jusqu’à 30 ans, tu rencontres encore des gens, des individus plus ou moins louches, des machos, des pédants, des prétentieux, des joueurs, des manipulateurs, des prédateurs. La soumission, hors de question ! Tu plais toujours, mais tu cherches la perle rare, la sensibilité, tu retiens des images, des sons. Et ces lits qui craquent, ces cris poussés au fin fond des chambres, cet amour au téléphone, au milieu des soupirs et des petits cris d’enchantement. Puis, en vacances, lors d’un bain de minuit, tu fais l’amour avec un homme dès le premier instant où tu l’as vu. Il n’arrêtera pas de t’embrasser pendant quelques années…
Sont-ce ces histoires que tu as envie d’entendre, ces expériences, ces bouts d’existence ? Combien d’amants ai-je eus ? Je ne sais pas. Où était donc l’homme de ma vie ? M’attendait-il quelque part ?
À 40 ans, après un mariage et trois enfants, tu fais la connaissance d’un être qui te plaît infiniment. Il correspond à tout ce que tu as toujours voulu et tu te dis que les échecs précédents n’ont aucune importance puisque tu es enfin face au rêve. Cet homme, tu en tombes terriblement amoureuse et le désires par-dessus tout. Lui aussi t’aime, te dit-il, et ne veut pas gâcher la relation. Pour ce faire, il veut entretenir le désir, ce désir qu’il a parfois tant de mal à éprouver et maintenir. Il s’en fait une théorie : la distance peut commander la jouissance, la jouissance exige la distance. Alors il entretient un éloignement constant, s’avançant parfois pour mieux reculer. C’est un jeu très dangereux et très difficile, toi, ne sachant plus ce que tu représentes pour lui, lui, pris à son propre piège. Où s’envole le désir ? La distance l’accentue mais l’écarte aussi, faute de combattants…
Un jour, on est allés dans la montagne et on a combattu les herbes qui nous chatouillaient le corps, te souviens-tu ? Un week-end, tu m’as amenée à la campagne, et tu m’as prise sous l’olivier, que tu disais très vieux. La maison de campagne, aujourd’hui, tu l’as vendue…
Portraits
De la difficulté d’aimer
Comment les gens font-ils pour vivre n’importe comment ?
Tommy, je l’ai rencontré dans une soirée. Il était marié. Il a flashé sur moi. Une semaine après, il annonçait à sa femme qu’il la quittait…
Éliane vit avec un homme depuis quinze ans. Depuis la naissance de son deuxième enfant, son conjoint ne la touche plus…
Claude, divorcé. S’envoie 120 minettes à la seconde, l’une après l’autre, en attendant de rencontrer la femme de sa vie… Il n’a jamais pensé que le problème pouvait venir de lui…
Shirley, deux enfants. Elle s’est laissée prendre au piège de la maternité. Ne vit que pour eux. Refuge inconscient pour ne pas affronter la vie, SA vie, celle qui lui démontrerait qu’elle existe encore…
Pierre a vieilli. La performance, les préservatifs, la génération clitoris, ça le perturbe ! Assurer, assouvir le désir de la femme, n’est-ce pas terrifiant ? Le point G ? Connaît pas. Se réfugie dans le passé, passe son temps avec des maîtresses qui le quittent une après l’autre. Signe caractéristique du lascar ? « Préserve » son mariage, union dénuée de sens puisque sans le moindre partage ni la moindre complicité, mais le dîner est prêt à heure fixe. Et l’image idéale est intacte…
Cyril n’a plus de désir. S’est reconverti en bon petit soldat, après une cure chez les moines bouddhistes. Va désormais au pas, dans quelque domaine qui soit. Il a peur du vide. Déporter l’anomalie vers d’autres cieux…
Ernest, un célibataire endurci. S’occupe de sa mère, castratrice. Phobique de l’engagement, il n’a jamais été heureux. A eu quelques conquêtes qui n’ont jamais abouti. Est amoureux d’un absolu qui n’existe pas, mais qu’il recherche encore. Ça l’occupe.
Ricardo, le tombeur. N’a qu’un but : satisfaire son ego. Être aimé en permanence, sous peine de mésestime de soi. Tout signe de profondeur le terrorise. « L’introspection est faite pour les malades, je n’en suis pas un ! », explique-t-il. Jamais il n’ira voir un psy, il va très bien, merci. Un vrai petit dictateur, sous des airs d’homme parfait. Charmant, au demeurant, quand on ne décèle pas sa pathologie...
Véronique est restée dix ans dans l’abstinence, non qu’elle n’ait pas de besoins, non qu’elle ne séduise pas, mais elle veut la vraie jouissance. Celle-ci lui est arrivée un jour, sans qu’elle s’y attende, mais le type a disparu. Depuis, elle s’est renfermée dans le silence…
Raymond n’a pas besoin de sexe, mais dans les relations, il faut bien… Alors s’installent tous les automatismes élaborés depuis des décennies. Théories fermes qu’il impose aux autres, sous peine de rejet. Un jour, il avoue cependant : « Si on pouvait avoir des relations « sans », ça me conviendrait tout à fait ! »
Maurice, le forcené du travail, ne veut pas affronter la vie, alors il travaille le jour, la nuit, le week-end, afin de déplacer, reporter, oublier. Il en a même fait une théorie implacable. Le travail, fondement de notre société ! Mais ce n’est pas tant la rétribution ou la récompense qu’il poursuit, c’est la preuve du raisonnement qui justifierait ses actes… Le travail a cette place qu’il se substitue, sous couvert de légitimité, à la pensée. En le plaçant dans l’utilité, il élude ainsi les fondements de sa propre existence…
Damien, l’assoiffé de séduction. Une sorte de don juan vampiresque. Pervers narcissique. Aspire l’amour de ses victimes, bien choisies : des proies aimantes et vulnérables à souhait. Idéales comme marionnettes dont il actionne les fils dans une pièce de théâtre dont elles sont d’éternelles figurantes et dont il est le personnage principal. Habile radoteur. Se donne bonne conscience en participant à des œuvres caritatives. Profondément meurtri à l’intérieur de lui-même, il ne le montre pas bien sûr mais joue et installe une dépendance souvent fatale. Autre dénomination : schizo-affectif. Son objectif : trouver la femme qui lui correspond (c’est-à-dire, qui lui donne le plus d’amour possible). Comment ? Par la manipulation mentale. Jusqu’où ? « Si elle m’aime, jusqu’à se tuer » Cela s’est déjà produit : sa femme, qu’il a trompée pendant 25 ans, est devenue anorexique. Elle en a péri. Son ex s’est tuée en voiture après une dispute ; Une de ses anciennes copines n’est jamais parvenue à se détacher de lui. Elle s’est mariée, a continué à le voir une fois par mois, puis s’est suicidée il y a quatre ans.
Il dit :
– Seuls les désirs des femmes peuvent induire mon propre désir. Leurs mots d’amour, leur dévouement, c’est formidable. C’est ce retour sur moi qui me fait aller vers elles. Je ne pourrais supporter qu’elles ne m’aiment pas, elles seules peuvent me donner ma propre valeur. Je ne peux m’aimer et encore moins aimer sans leur regard. Les femmes me « servent » à exister…
– Donc, tu n’as pas besoin de les aimer ?
– Elles ne sont qu’objet de réconfort et d’assurance de ma propre personne. D’ailleurs, je ne pourrais jamais les aimer comme elles m’aiment. Pour cela, il faudrait que je me détache de moi-même, mais j’y suis accolé. L’ouverture m’est impossible car je ne m’aime pas. Je suis bien trop concentré sur moi-même pour m’ouvrir à elles.
– Jamais de culpabilité ?
– Ça m’effleure à peine. J’ai cette faculté de négation de l’autre, qui sert mes intérêts. Moi, macho ! Comment osez-vous ? J’ai tant lutté pour la libération de la femme ! Elles sont les reines du monde, sans lesquelles il ne survivrait pas. Les femmes sont des objets d’amour, j’ai besoin de leur amour (il s’énerve !), mais je n’ai pas besoin de les aimer d’amour, c’est pourtant simple, non ?
– Tu es égoïste, phallocentrique…
– Non, déportées dans de belles phrases, mes théories font merveilles. Dans les actes, oui, bien sûr, il y a des dommages, mais elles n’ont qu’à pas… Il faudrait qu’elles me donnent sans rien me demander. Pourquoi veulent-elles recevoir ? Moi, apparemment, je ne demande rien !
– Et pourtant, tout ton comportement est dans cet appel à l’amour… Il n’est pas besoin de mots pour demander, le corps, l’âme, la sensibilité présumée, ta stratégie masquée, tout cela parle, tout ton être demande et crie !…
– La vie n’est qu’un jeu, il y a le gagnant et le perdant, je ne suis pas responsable si elles s’accrochent, tout le temps… Blessé, je l’ai été, mon intérieur en tremble encore… Oui, c’est peut-être ma revanche contre ce mal que je parviens ainsi à couvrir…
– Et tu le nommes liberté !
– Liberté si chère ! Liberté de blesser, de fuir, d’être ce que je suis, ce que je ne suis pas ! Ce détachement grâce auquel rien ne me touche me permet d’éviter de me retrouver face à moi-même, de renoncer à la complicité qui envahirait mon moi profond que je ne veux pas connaître. Il n’est pas si bon que ça, vous savez… Me dépasser ? Mais que dépasser ? On ne peut que jouer, travailler, se divertir, tout cela fonctionne, la soudure de la relation n’est pour moi que le réveil d’une horrible cicatrice…
– Celle que tu infliges aux autres…
Vérités, non-vérités, cœurs ouverts, cœurs non couverts...
Les femmes, n’importe laquelle, a cette générosité, ce sens de l’humour, j’aime quand elles sont au service des hommes, elles leur apportent ce qu’ils attendent… Ce qu’elles peuvent apporter d’autre les concerne, moi je prends ce dont j’ai besoin, c’est tout.
Vous pourriez évoluer…
Non, je ne veux pas changer, tout va bien. C’est un leurre, vous savez, de vouloir changer les gens, je suis comme ça, c’est tout. C’est bon pour vous, vous prenez, ça ne l’est pas ? Adios mi amor ! Il n’y a pas de demi-mesure, il y a la joie perpétuelle ou il n’y a pas. Je ne conçois pas qu’on puisse passer son temps à discuter, il faut être léger, ne pas dépasser, ne pas outrepasser le schéma fixé, ne pas interpeller, ça remettrait tout en question, je ne veux pas !
Mais cette profondeur, elle existe en vous !…
J’ai réussi ma vie, ma chère, c’est ce qui importe. Et je fais attention aux gens qui m’entourent. Jamais je n’aurais quitté mes enfants par exemple, et encore moins élevé ceux des autres ! S’ils se rendent compte que je trompe leur mère ? Bien sûr qu’ils le savent quelque part, mais ils m’aiment forcément, ce sont mes enfants…
Les enfants, des « valeurs précieuses », n’est-ce pas ?
Oui, bien sûr, même si je n’ai jamais su m’en occuper : Quand, petite, ma fille me regardait, je n’arrivais pas à soutenir son regard.
Bien sûr, les enfants décontenancent, surtout quand on vit en permanence dans le mensonge !
Je n’ai jamais pu changer une couche, ni les emmener dans un parc... Les tâches, l’intendance, ça a toujours été pour leur mère, de toute façon, je ne voulais pas d’enfants. Quand on en a parlé avec ma femme, je lui ai dit : Si tu en veux, ce sera 80 % à toi de t’en occuper. J’assurerai le reste…
Mais qu’est-ce qui reste ? Ce qui est confortable, le bon côté des choses, le contact avec l’enfant lavé, nourri, bordé ? Tout sauf l’intimité, et surtout ne pas être remis en question…
Mai 68 a fait de la société un bordel ! Pauvres femmes ! Je compatis…
trange théorie ! Comme si vous vous en souciiez. Où l’extravagance constante ne dérange plus…
Je ne sais pas aimer. Pour moi, ce n’est que poison et complications.
Et pourtant, vous les créez partout où vous vous trouvez, vous étonnant de susciter une admiration qui pourtant est ce qui vous maintient en vie… Se nourrir de l’amour des autres remplit ce dont vous êtes dépourvu…
Oui, je suis lâche et égoïste…
Aveu qui dédouane des devoirs ! La culpabilité envolée, le fatalisme et le « je suis comme ça » résout bien des choses… Quelle place a le sexe chez vous ?
J’ai ce qu’il faut chez moi, curieusement, je recherche l’affectif, non le sexe.
Vous faites donc collection de femmes pour le paraître.
Non, pour être aimé !
Et ces conduites dont vous vous affranchissez si facilement ? Sont-ce les bonnes valeurs à transmettre à vos enfants ?
C’est comme ça, je n’y peux rien. Ils s’en sortent bien, surtout ma fille, elle m’adore et moi aussi, j’en suis si fier. Œdipe ? Dépassé depuis bien longtemps, vous pensez ! Avec mon fils, c’est plus compliqué, mais c’est parce que ma femme ne m’a jamais laissé vraiment l’approcher ! Tout a une explication, vous savez, je n’ai rien à me reprocher. Quand les gens ne vont pas dans mon sens, c’est qu’il y a anguille sous roche. Pourquoi me remettrais-je en question ? Les théories à la Dolto, on en est revenus !
Mais pensez-vous que les enfants soient dupes ? Vous par exemple, avec vos parents…
Je les ai adorés, c’était un modèle…
Mais vous qui aviez ce rôle de « gentil » dans la famille, celui qui comprend, qui est présent… N’avez-vous pas pensé que tout cela assouvissait chez vous ce besoin de… Vous savez, vous faire remarquer, pour être aimé… surtout de votre mère, ne jamais perdre cet amour sous peine de… Est-ce par altruisme que vous êtes si… N’avez-vous jamais réfléchi aux raisons de votre différence, n’auriez-vous pas tout fait pour avoir cette place auprès de l’être aimé, votre maman ? Cette sentimentalité excessive n’est-elle pas le résultat d’une certaine tyrannie cachée sous fond de désirs de sa part, par exemple, de ces pleurs en silences quand vous aviez des mauvaises notes elle qui vous rêvait médecin, chemin que vous n’avez pas pris… de ce mutisme pudeur quand elle vous voyait dépérir… Vous détacherez-vous un jour de ce poids que vous portez encore à plus de cinquante ans !
Vous, avec votre psychologie à deux balles ! Je préfère ignorer ce qu’il y a au-dessous, et cela me concerne, c’est ma famille, vous n’êtes qu’une étrangère !
Oui, selon le statut que vous m’avez accordé, je ne puis être qu’une étrangère pour vous. Vous fuyez lorsque le lien se resserre, éternelle protection, quel gâchis ! Ouvrez les yeux, Monsieur, il n’est pas trop tard, voyez la vie en face, sortez de ce sentimentalisme exacerbé couvert sous ces faux-fuyants, vivez et surtout, respectez les autres ! Prenez donc ces critiques comme constructives, vous savez bien qu’elles ne sont pas là pour vous enfoncer ni vous trahir, considérez les femmes dans leur entité, avec leurs peines et leurs joies, prenez-les dans le tout, et non juste dans ce qui vous convient. Pour une fois, vous accorderez à celle que vous dites aimer ce qui lui revient : Non pas une relation partielle, comme vous avez d’usage de faire : sexe d’un côté, amitié ou complicité de l’autre… Mais une relation pleine, ça vous emplira ! Car votre incohérence suscite l’incompréhension, l’incompréhension mène au suicide…
Je suis libre de dire ou de ne pas dire, de taire ou de ne pas taire, de dévoiler, de vous confier, de vous réconforter...
Ces moments-là sont justement le véritable lien, celui qui renforce, donne sens, reconnaît l’autre dans sa totalité.
Je ne me sens pas bien soudain…
Ça arrive, ce n’est pas une honte ! L’être aimé est aussi là pour ça. Ne vous en cachez pas, c’est ridicule, ça voudrait dire mutiler une partie de soi. Vous ne voudriez que les bons moments !
Je ne crois pas à l’amour.
Mais alors, n’aimez pas et ne faites pas semblant d’aimer. Car dans une relation, vous engagez aussi l’autre… Et vous en avez tant besoin, pour la reconnaissance… Mais la véritable reconnaissance vient de celle qu’on s’accorde soi-même et non des dignitaires des hauts rangs qu’on a conquis par l’argent, le pouvoir ou la séduction. La reconnaissance ne peut venir que de soi. Ainsi va la liberté !
(Il se reprend…) Céder à une femme est une sorte de prostitution, j’aime user de mon charme, en quoi cela est-il mal ?
Tel que vous le faites, vous manipulez.
Tout est vérité… ou tout n’est qu’erreur. L’entre-deux est supplice et dérision, une agression...
On n’a pas formé le monde dans le silence, on l’a formé dans le dialogue, dans la pratique de la langue, dans la communication. Apprenez à douter, ne soyez pas figé sur vos certitudes. Rétablissez-vous !
Si un jour il se réveille, dites-lui de considérer, d’agir, de rétablir, de regarder, d’aimer peut-être…
Séance 2 : énigme
« Le bonheur, c'est d'être heureux ; ce n'est pas de faire croire aux autres qu'on l'est. » JULES RENARD
Aimes-tu les mots ?
Les mots sont une merveille, les mots disent tout.
Les mots n’ont de sens qu’à travers les actes, les actes accompagnés des mots constituent le merveilleux.
Les mots ne sont rien à côté des baisers et des caresses…
Les mots et le désir vont ensemble, mon chéri. Les mots sont l’échange privilégié de l’amour
Mon chéri, j’aime quand tu m’appelles mon chéri… L’amour et le désir sont deux valeurs non mêlées, je croyais que ça allait ensemble, mais j’ai cloisonné pendant si longtemps…
Mais, mon cher, comment as-tu fait, tu as été marié, tu as des enfants…
Je me suis toujours battu contre les schémas familiaux. Vous les femmes, aimez cette sécurité, le syndrome de la mère, la bouffe prête à heure fixe, la logistique du foyer assurée, moi, ça n’a jamais été mon truc. J’ai toujours été libre parce que je voulais vivre, j’ai voyagé, lutté, abandonné celles qui voulaient me cadrer, me fixer… J’ai des aventures, je compense ainsi, comprends-tu ?
Non, pour moi, les pierres se collent bout à bout, on érige un pan, puis un autre pan, parfois, on voit un semblant de bâtisse et c’est extraordinaire…
J’ai de nombreuses passions : avec la littérature, je peux construire une œuvre, avec mes amis, j’ai le respect, la confidence, la complicité, j’ai des activités intellectuelles, je me sens riche de l’intérieur, je suis heureux ainsi.
Ma vie aussi est palpitante, il faut que je t’avoue, un jour j’ai embrassé la terre, je lui ai fait l’amour plaquée sur le sol, et j’ai joui. La terre de ses vibrations avait remué tout mon être, j’avais atteint le paroxysme. Et puis la terre m’a ramenée à elle, c’était formidable…
Comme un retour à la nature ?
Un retour à la Nature de l’être, l’équilibre retrouvé.
Comment as-tu fait ?
Il y a de cela très longtemps, j’ai vécu une grande histoire d’amour, avec un homme qui cherchait la complétude comme moi, mais pour certaines raisons, l’amour s’est égaré, moi, je ne voulais pas rester sur ce malheur, parce que je ne voulais pas vivre dans le regret, le remords, la tristesse, l’amertume, alors j’ai réparé. À l’époque, j’avais voulu en finir avec ma vie, je pensais qu’elle n’en valait pas le coup, je refusais de vivre dans la souffrance, je ne voulais pas poursuivre dans la petitesse, dans les compromis ou dans l’utopie, ni survivre et être comme ces gens qui, bien que vivants, se sont éteints… Alors, je me suis acharnée dans mon travail, fermant les yeux, mettant des œillères pour ne plus penser à rien, et on m’a ramassée. Des âmes bienveillantes se sont penchées sur moi et m’ont pansée. Il y avait l’Amitié, chaleureuse et présente à ces moments difficiles de ma vie, il y avait le Plaisir, avec des relations sexuelles qui me permettaient de tenir un équilibre oui, parce le désir, je ne l’ai jamais mis de côté, je revendique ce droit de faire l’amour et puis il y a eu l’art, ô miracle des sons et des mots me permettant de célébrer l’Univers. Et alors, je me suis aperçue que j’avais érigé des fragments de merveille, j’avais de la chance, ma séduction ne faillait pas, et c’est comme ça que je me suis reconstruite, sans inscrire mes relations dans un contexte particulier. Ouverte à l’inconnu, libre, confiante, je pouvais de nouveau vivre…
Biographie
SARAH MOSTREL : de formation initiale ingénieur, Sarah Mostrel est écrivain, journaliste, musicienne. Recueils de poésie : Chemin de soi(e), éd. Auteurs du monde (2015) ; Tel un sceau sur ton cœur, éd. Auteurs du monde, 2012 ; Le parfum de la mandragore, éd. Atlantica-Séguier, 2009 ; La caresse de l’âme, éd. La Bartavelle, 2003 ; La rougeur des pensées, éd. La Bartavelle, 2001 ; L’absolu illusoire, éd. La Porte des Poètes, 2000. Livres d’artiste : À mesure que je t’aime, éd. Transignum, 2015 ; À cœur défendant, bilingue français/anglais, éd. Transignum, 2011. Essai : Osez dire je t’aime, éd. Grancher, 2009. Recueils de nouvelles : La dérive bleutée, éd. L'Échappée Belle, 2014 ; Révolte d’une femme libre, éd. L'Échappée Belle, 2013. CD : Ces heures où tout s’efface, texte-voix-chant de Sarah Mostrel, musique de Jean-Pierre Brouard, 2015 ; Poser le monde, texte-voix-chant de Sarah Mostrel, musique de Pierre Meige, 2011 ; Désirs pastel, texte-voix-chant de Sarah Mostrel, musique de Pierre Meige, 2010.
Distinctions
Médaillée de l’académie ARTS-SCIENCES-LETTRES (2015)
Médaille du rayonnement culturel de LA RENAISSANCE FRANÇAISE (2014)
Prix de poésie néoclassique ANDRE OMBREUSE, SAPF (2014)
Grand prix international CHARLES LE QUINTREC (Mention spéciale), SAPF (2012)
Primée lors du 7e concours international de Poésie La Porte des Poètes (1999)
Quelques liens
Site : www.sarahmostrel.online.fr
Page facebook : www.facebook.com/sarah.mostrel
Chaîne You Tube : www.youtube.com/user/SarahMostrel
Quelques interviews radio : soundcloud.com/sarah-mostrel
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Clair de femmes http://www.pandesmuses.fr/2016/07/clair-de-femmes.html |
LE SITE « PANDESMUSES.FR » DEVRA BASCULER EN HTTPS DÈS LA FIN DE SA MAINTENANCE ET LE COMPTAGE DE SES PAGES À ACTUALISER. CELA PRENDRA DES MOIS VOIRE UN AN. NOTRE SITE AURA AUSSI UN THÈME GRAPHIQUE UN PEU DIFFÉRENT DU THÈME ACTUEL. POUR UNE MAINTENANCE À COMPTER DU 20 OCTOBRE 2023. CETTE OPÉRATION POURRAIT PERTURBER VOIRE RALENTIR LA MISE EN PAGE DE NOUVEAUX DOCUMENTS. MERCI BIEN DE VOTRE COMPRÉHENSION !
Dernière nouveautés en date :
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Info du 29 mars 2022.
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