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Le jardin qui bascule, de Guy Gilles
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Le jardin qui bascule est une figure de rêve. Ce rêve est fait par un tueur à gages, il le raconte aux trois quarts du film. Il est chargé d’éliminer Kate (Delphine Seyrig), destinataire de ce récit de rêve, qui compose le sens de ce film de 1975 qu’une copie avec des génériques rose vif fait revivre en 2024.
Je me serais passé de la cheville narrative du tueur* pour me laisser emporter par la poésie de ce film indéfinissable car d’une puissance émotionnelle jusqu’au-boutiste. Les personnages typiques des seventies ont un rythme lent comme dans les films de Marguerite Duras. La liberté d’après mai 68 est illustrée par les cheveux longs des jeunes hommes, et il n’est pas besoin d’insister sur les pantalons pattes d’éléphant, si datés qu’ils marquent le pouvoir déclinant de la révolution. Le beau blond de cette bande de « petits prolos », et de cette « chair fraîche condamnée à la défraîcheur », selon Jean-Louis Bory** se sait filmé sous son meilleur profil. Alors il souffle sur sa mèche. Lui, il ne tue pas, mais il connaît déjà la prison modèle de Fleury-Mérogis : il vole des voitures pour payer une maison à ses parents... Pas besoin non plus d’insister sur les stéréotypes masculins, toujours les mêmes dans ces films d’hommes qui à travers une actrice divinisée donnent à voir leur désir comme de l’art brut, sans naturel. Eux déglingués. Elle distinguée. Tout la met en valeur, le récit, la technologie, le maquillage, et la violence imminente.
Que ce soit ce film-là qui ressorte est pataphysique : il veille sur le danger ! Le temps qui passe et donne la mort s’élève à l’amour passion. Avant de basculer, la fraîcheur s’incarne dans la beauté d’une déesse qui lit. Nul besoin de préciser que Delphine Seyrig est éclatante et lumineuse pour ces corps d’hommes qui dodelinent avant que bascule le couperet. Elle dit qu’elle peut lire dix heures sans s’arrêter. A quarante ans passés, elle est retirée dans une maison au bord d’un fleuve. La liberté des seventies n’a rien à voir avec la prise de parole des femmes en 2014. Quarante ans : vieillesse. Jeune, « elle travaillait », comprenez qu’elle se prostituait, et elle devient un accessoire. Pouvons-nous parler de « féminicide » pour ces œuvres où la femme est mise à mort, tandis que l’homme travaille ? Gros travail, ces films…
Préservons la surréalité poétique ! Passer une vie à lire les classiques de l’Antiquité grecque et romaine, et quelques œuvres de la Renaissance est ce que nous pouvons faire de mieux parmi les fleurs et les arbres d’une Nature non aseptisée — il n’est pas question de « vert » en 1975... Laissons aux « petits soldats » les missions et les énigmes réductrices, et les ficelles de la narration, pour suivre le fil du temps. Lire et écrire. Et chanter, le front haut, la tête légère. Il y a dans Le jardin qui bascule une des meilleures prises de vues d’une chanson de Jeanne Moreau. Parole et visage illuminent le jeu des correspondances qui raniment la fidèle espérance. La maison de ce jardin est ce qui fait percevoir la beauté incertaine, où la chanson est l’exacte vanité de l’instant, sa grâce et son plaisir.
© Camillæ
* & ** voir URL. https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Jardin_qui_bascule
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Pour citer ce texte inédit
Camillæ (Camille Aubaude), « Le jardin qui bascule, de Guy Gilles », Le Pan poétique des muses | Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événements poétiques | Festival International Megalesia 2024 « Amies », « Elles », mis en ligne le 15 mai 2024. URL :
http://www.pandesmuses.fr/megalesia24/camillae-lejardinquibascule
Mise en page par David
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