Événements poétiques | Megalesia 2021 | Chroniques de Camillæ
Où est la femme ?
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© Crédit photo : Photo no 1, fournie par Camillae.
La raide église Saint Eustache, la plate et terne Canopée et la boite de verre ouvragée Notre Dame des Tuyaux, dite aussi Pompidoléum.
© Crédit photo : Photo no 2, fournie par Camillae.
« Ouverture » est le titre voulu par le célébrissime collectionneur breton François Pinault.
Ouverture, comme un opéra, bien sûr.
Le 22 mai 2021 est le jour d’inauguration de l'ancienne Bourse du Commerce, la Halle au Blé, initialement Maison de Catherine de Médicis — ce n’est pas rien les Médicis, Lorenzaccio, la Saint Barthélémy…
L’accès est autorisé. Je rêvais depuis un demi siècle d’y entrer dans de bonnes conditions, pour des ventes de vêtements.
Je sonne au contrôle, il faut ouvrir mon sac, les agents de sécurité cherchent une bourse avec du métal. On ne peut entrer avec un porte-monnaie. Une vieille dame connectée trouve cela « normal ».
Le collectionneur préoccupé par la crise sanitaire affiche « une profonde vision humaniste ». C’est sans doute pour quoi la première image montre des gens en troupeau sur une plage :
On s’attendait à voir la laideur, et c’est la plage ; des couleurs, des lignes droites et des esquisses de danses hélant le public soulagé. Il se voit, ça le rassure sur l’art contemporain. Il peut photographier ses semblables avant de découvrir la Halle au Blé. L’émotion est claire, charnue, sur des tissus judicieusement choisis — tissage et trame de fils solides.
L’épi de Blé d’Isis-Déméter-Astarté-Cérès est la base de la nourriture, l’emblème de la richesse et de l’abondance.
En organisant des pénuries de blé, les politiciens véreux affamaient le peuple désarmé, et se faisaient choyer par des « berceuses » telle la Camille-Michèle du poète lyrique André Chénier, mort guillotiné dans un pays créant simultanément les « droits de l’homme ».
1889 — pour commémorer le centenaire du massacre de la Révolution, la Halle au Blé est décorée d’une grande fresque dédiée à la femme, ces déesses-trônes, comme Isis, ayant le charme désuet d’un poème chanté de Reynaldo Hahn.
Les courbes révèlent autant qu'elles épousent poliment les mœurs des peuples de la terre.
Quel écrin au mondialisme et au métissage ! certains vont trouver ces déesses d’un mauvais goût insupportable.
© Crédit photo : Photo no 3, fournie par Camillae.
© Crédits photos : images no 4 et no 5, fournies par Camillae.
Déesses, techniques, rotondités. Isis est là !
© Crédit photo : image no 6, fournie par Camillae.
Beaucoup de sensibilité dans les choix de cette collection... Le public s’agglutine pour photographier la petite souris blanche en couverture du catalogue. Elle dévore les cloisons en placoplâtre aussi sûrement que le ciron qui mine le temple de Salomon, symbole du temps qui passe… pardon, du « passage du temps ». Une peluche comme œuvre d’art montre l’engagement humaniste du collectionneur. Mais elle ne sourit pas.
© Crédit photo : Image no 7, fournie par Camillae.
Après l’adolescent terrifié devant la déesse, des traces visibles de la décomposition fixée dans du métal aux reflets lunaires, pour ne pas dire « argentés ». Ça agace, mais ce n’est pas scabreux, je vous rassure.
© Crédit photo : Images no 8 & no 9, fournies par Camillae.
Au sous-sol, le son. Ce qui pourrait évoquer un état de grâce est ce couple masqué assis dans l’auditorium. Si non, tout est fait pour tromper, briser, improviser : le passage d’un être humain va générer d’infinies versions de fumée qui, à mon sens, résume l’usage des techniques virtuelles.
Au second étage, une collection de photographies, suivies de tableaux qu’on trouvera excessifs ou absolument magnifiques...
La visite de cette collection se clôt sur une série de photographies d’un gobelet en plastic, pour qu’à la fin, un visiteur puisse dire : « Je n’ai rien compris aux gobelets ».
La personne soumise aux techniques cognitives va dire : « Je vais vous le dire (non, non, je n’ergote pas) ». On peut jouer sur le public qui gobe, et le laid, et je vous laisse poursuivre ce petit jeu. Le public a rempli le salon du troisième étage où il n’y a plus de gobelets, et comme autrefois le peuple était affamée par les pénuries organisées du blé, le visiteur assoiffé contemple le container d’eau potable sans pouvoir boire, jusqu’à ce qu’arrive un agent qui déroule un serpent de gobe-laids — le serpent de la déesse, si vous cherchez bien...
Et les gens déambulent masqués, telles ces mère et fille, rompues aux expositions.
Et des gens qui lisent…
… jusque dans la salle des machines à réfrigérer le blé, retrouvées durant les travaux de rénovation — techniques déjà obsolètes.
Le public achète des livres à la librairie « Les Éditions – Bookshop ».
Au milieu de la Rotonde, des fauteuils en cire et la statue de l’Enlèvement des Sabines en cire en train de fondre « dans un saisissant processus de destruction créatrice ».
Sus au maniérisme ! c’est le reproche adressé à ce chef d’œuvre de la fin du XVIè siècle, ceint de balustrades versaillaises et de hautes parois en béton, l’un des chefs d’œuvre de l’architecte Tadao Ando, conseillé par Pierre Antoine Gatier, architecte des Monuments historiques…
Rien n’est prétentieux... juste installé un climat d’effroi, l’Homme face à la Nature.
Aujourd’hui, on ne meurt plus de famine mais de phobie, car il manque le sacré, d’où naissent le goût et l’excellence. L’humanité de plus en plus dévastatrice détruit la nature, et cela à ses propres dépends. On entend le sens de cette collection qui ose, grandiose, en symbiose, chanter la félicité d’un lieu dédié au blé, à Cérès, à la fécondité.
Quand va-t-elle s’éteindre, après avoir tenté de rendre exotiques les métaphores de l’abondance ?
À propos de Camille Aubaude
Bibliographie
— MYTHE D’ISIS (la BnF l’a jugé suffisamment important pour le mettre en ligne), et Plainte sur l’embrasement de Notre Dame (chapitre du Mythe d’Isis sur Notre Dame de Paris).
— CINÉVITA (chroniques de films)
— LA MAISON DES PAGES (récit gothique ; une édition bilingue français-italien)
— POÈMES SATIRIQUES (et une édition bilingue espagnol)
— L’AMBROISIE (proses poétiques, avec photographies)
— IMPRESSION INIMAGINABLE (recueil de poésies avec photographies)
— LA MALCONTENTE (recueil de poésies avec photographies)
— ISIS AMBACIENNE (recueil de poésies avec photographies)
— SEVRAGE (livre multimédias)
Sites
http://plus.wikimonde.com/wiki/Camille_Aubaude
http://camilleaubaude.wordpress.com/
http://www.pandesmuses.fr/2017/8/distinctions-malcontente.html
https://r.academia.edu/CamilleAubaude
http://www.litterature-lieux.com/ficheFEDERA-site-428.htm
FILMS sur la poésie
— Poèmes d’Amboise au Cercle Anna de Noailles, par Jérémy Véron
http://www.youtube.com/watch?v=NCoEvLmM63g&feature=youtu.be
— Un soir à La Vénus noire, par Galya Milovskaya
http://www.youtube.com/watch?v=steLgqcF8RA
— Voyage en Orient, Galerie Templon, 30 rue Beaubourg, Paris 3è
— Voyage en Orient, lecture à la Maison de la poésie-théâtre Molière, Paris 3è.
— Dialogue de poésie à la Maison de la poésie-théâtre Molière, avec Alberto Sorbelli.
— Fanpop.
— Rêve nu, film interactif réalisé par Camille Aubaude.
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Pour citer cette chronique d'arts
Camille Aubaude, « Où est la femme ? », texte inédit et images inédites, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique|Megalesia 2021, mis en ligne le 1er juin 2021. Url :
http://www.pandesmuses.fr/megalesia21/ca-ouestlafemme
Mise en page par Aude Simon
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