Lettre n°15 | Eaux oniriques... | Réflexions féministes sur l'actualité
Élisabeth Lévy
&
l'hystérie*
Crédit photo : Illustration empruntée à Wikipédia, domaine public.
Quelle mouche a piqué ce mardi 9 février la journaliste Élisabeth Lévy sur le plateau de CNews alors qu'elle participait à un débat sur l'écriture inclusive ?
Comment les discussions se sont-elles orientées vers ce fameux qualificatif de « poissonnière » déjà évoqué dans cette revue pour glisser insidieusement vers une autre insulte à l'inflexion indubitablement sexiste réservée aux femmes ? Rien ne fut plus aisé aux participants de l'émission car il fut question d'y dénigrer les « néo-féministes » !
Sans se démonter, Élisabeth Lévy usa du terme péjoratif « d'hystériques » pour les désigner, adjectif dont Simone de Beauvoir dénonçait déjà la stratégie de stigmatisation visant à discréditer la parole des femmes ! Ainsi le comble fut atteint sur le plateau de CNews avec une femme décrédibilisant toutes les femmes à commencer par elle-même…
Élisabeth Lévy semble ignorer que l'hystérie renvoie à la nuit des temps et à ce cher Hippocrate puis à ses disciples qui définissaient la femme par sa nature de génitrice, autrement dit par son utérus !
Très vite au Moyen Age, l'hystérie prend une connotation à la fois sexuelle et diabolique et l'on connaît le sort réservé aux femmes jugées « hystériques », à savoir lesdites « sorcières » que l'on brûlait au XIIe et XIIe siècle…
Il fallut attendre les recherches de Charcot pour comprendre que l'hystérie est une maladie neurologique qui n'a rien à voir avec l'anatomie féminine et dont les hommes victimes de traumatismes sont également tributaires.
De fait l'hystérie prit le nom d'encéphalite spasmodique et trouva officiellement son siège dans le cerveau selon la définition du psychiatre Georget.
Freud, cité par Élisabeth Lévy pour légitimer ses dires, ne fit que développer les découvertes de Charcot en ajoutant que les expériences sexuelles infantiles prédisposaient à l'hystérie, cette maladie touchant indifféremment les femmes et les hommes, consacrant même un rapport sur ce sujet dédié exclusivement à la gente masculine et intitulé « L'hystérie masculine »...
Cette piqûre de rappel est d'autant plus utile qu'il me semble étonnant que des journalistes dignes de ce nom se devraient de vérifier leurs assertions avant de les clamer telles des vérités indéfectibles sur des plateaux de télévision !
À noter que dans la même émission, c'est un homme, Philippe Doucet, qui remit les pendules à l'heure en recadrant Élisabeth Lévy quant à sa sortie malheureuse...
© F. Urban-Menninger
* Contexte : À revoir en replay l'émission du 9 février sur CNews vers 13h et l'histoire de l'hystérie développée par Élisabeth Lévy... C'est un billet-réponse pour expliquer objectivement ce qu'est l'hystérie et que ce terme ne désigne plus exclusivement les femmes, n'en déplaise à cette journaliste mal informée.
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Pour citer ce billet-réponse
Françoise Urban-Menninger, « Élisabeth Lévy et l'hystérie », billet-réponse inédit, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n° 15 « Eaux oniriques : mers/mères », mis en ligne le 10 février 2021. Url : http://www.pandesmuses.fr/lettre15/fum-