Poème
Hier Demain Jamais (extrait)
Gérard Georges
Extrait reproduit avec l'aimable autorisation
des éditions l’Échappée Belle et l'auteur
[pp. 32-36]
Impressions mouvantes
Un ciel où rament
des corbeaux
des étourneaux
Un paquebot de nuages
Des panses ventrues
Des bedons bedonnants
L’apex des grands hêtres
jusqu’à l’épaule de la montagne
et en bas,
tout en bas,
une mare
où coassent des grenouilles en mal d’amour
de mâle en pis
La lune y reflète son albédo couleur de miel
couleur de fiel
où
rament des corbeaux
des étourneaux
à ne plus rien voir, ne plus pouvoir,
je suis resté après la pluie
sur un capuchon de neige gelée
à dénombrer tous ces automnes
et ignorer les brumes hiémales,
j’ai lapidé mon temps qui se rouille
bien sûr,
l’aube vient toujours quand le ciel se délie
ou que
l’ondée se juxtapose.
Trésors d’antan
pour que s’ouvrent les écluses du temps
et que
jouent à la marelle les étoiles buissonnières.
C’était un éternel passé
qui tardait à venir.
La fenêtre ouverte laissait fluer toutes les pensées
les plus osées –les moins formelles.
Des embruns crépitaient sous les senteurs de résine.
Ton corps alangui sur la couche
-si nu, si beau, si doux-
tressautait au moindre souffle du vent.
Cette envie de te toucher
de faire l’amour
de renaître aux jours anciens
-tous ceux qui fleurissaient comme les roses de Noël-
et puis
ce demain qui déboulait tellement vite
que,
sitôt que je pus ouvrir mes yeux purulents,
je ne sus remonter
tout à l’envers
du temps.
La brume a tissé
des ombres éphémères
sur le calendrier des jours
qui ne sont plus
l’hiver est descendu des nues
il a cadenassé en silence les vents des antipodes
et ouvert la porte au souffle boréal
-celui qui pèle qui rugit qui désosse
qui exaspère aussi
rien ne vit plus que la neige
– une poussière qui court de vallon en vallon –
et puis
quelques cendres d’un feu de bois
au hasard d’une coupe sombre dans la forêt
tout s’est figé
tout s’est tu
et jusqu’à l’herbe en déshérence
qui, depuis la Toussaint,
compte à rebours les nuits sans faim ni soif
qui tombent long temps
souvent
L’antépénultième soleil d’hiver
irradiait sa comptine.
Après après demain, peut-être
-ou bien alors avant avant hier-,
il serait mort.
Les épluchures d’un vent céleste
menaient grand train dans les entrailles de la terre-mère.
Moi,
je remontais mon col
je rêvais, je rêvais
j’avais rêvé aussi
mais
tout avait été tellement dit
que
cela n’aurait servi à rien
de vouloir mâcher ses mots
ni
de cacher ses maux.
Titre : Hier, Demain, Jamais
Poète : Gérard Georges
Genre : Poésie
Collection : Pioche
Nombre de pages : 50 pages
Date de parution : Novembre 2016
Prix : 10 euros
ISBN : 978-2-919483-44-0
Page dédiée au recueil chez l'éditeur : http://www.lechappeebelleedition.com/gerardgeorges_hierdemainjamais.html
Voir aussi la présentation de l'ouvrage dans
Les nouveautés des éditions L'Échappée Belle
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Pour citer cet extrait
Gérard Georges, « Hier Demain Jamais (extrait) », Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n°10, mis en ligne le 27 février 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/jamais.html
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