Événements poétiques | Le Printemps des Poètes | « Désir » | Les femmes & le désir en poésie
À la lueur des flambeaux
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Crédit photo : Vekoslav karas, "Young woman with à mandoline", domaine public, Wikimedia.
Celles qui m'ont
frayé un chemin
font signe de les suivre
Celia Sánchez, Rosa Luxembourg,
Alexandra Kollontai, Dolores La Passionaria
Celles qui m'ont mené à briser les stigmas
contre d'autres et moi-même
Car lorsque l'on est un jeune gars,
l'on ne « peut pas » admirer de femmes
- Il faut admirer Rambo,
Musclé, couvert de sueur,
marchant les pattes écartées pour prouver sa taille –
admirer une femme c'était
être un sous-homme,
un untermensch de notre héritage culturel
qui ne peut pas jouer aux saint-sacrés sports
ou être un meneur
l'on ne peut mystérieusement pas faire,
ce que
Capitaine Lakshmi Sahgal,
Aoua Keïta, Kang Keqing
Arlette Laguiller ou Monique Wittig
ont toutes fait.
Je lisais en secret
Marx (Eleanor)
Sylvia Pankhurst, Emma Goldman
Angela Davis
dont l'influence demeurait
muette autant que majeure ;
je prétendais m'intéresser
aux voitures, aux machines de guerre
à ce qui devait m'attirer
en tant que mâle
interdit
d'inviter des filles à se joindre au club
à croire aux jeux mixtes,
aux vêtements unisexes
de vouloir me tenir avec un groupe des filles
- elles ne savaient pas,
en me rembarrant
que me guidaient
Henriette Holst, Cai Chang
Claudia Jones, Silvia Federicci
que je souhaitais leur ressembler
(non pas physiquement, mais
là où ça compte
oubliant toute distinction
d'entrejambes,
comme dirait Shulamith Firestone
de poitrines ne compte que ce qui bat dedans)
ce sont elles
qui annonçaient l'espoir du monde
qu'oser vouloir,
contre tout gré
ignorant les tendances
remplaçant les sentiments
inspiraient mes expressions.
Sous leurs pavillons
j'ai rompu avec l'obéissance
j'ai défié ceux qui me disaient que seules les femmes
peuvent s'inspirer de femmes
et qui me disaient
qu'aucun homme ne pouvait comprendre
et qu'aucun homme ne pouvait soutenir
les causes qu'il ne comprenait pas
me traitant comme un
ennemi inconnu,
ou inconnu donc ennemi
tandis que les avis sensés
de Gisèle Halimi
Tamara Bunke, Xiang Yingyu,
Wangari Maathai
ponctuaient mon quotidien,
agréablement remettait en cause
mes gestes, ma posture,
les réflexes de mon langage.
Lorsque j'étais petit,
un garçon ne pouvait pas admirer une femme,
sans être la risée du coin,
sans faire de soi cible.
Est-ce encore le cas de nos jours ?
J'aimerais croire que non,
mais j'ai tendance à être trop optimiste.
J'ose espérer que
pédé ne sert plus d'insultes,
que l'industrie pop n'a pas déconstruit les luttes,
en plaçant les mots rebelles
derrière des lèvres gonflées au botox
derrière des proues faites en usine
aussi inspirantes que dénudées
pour croire que l'on peut
respirer de l'air frais dans un nez refait,
confondre si
le féminisme est la libération de tous,
ou une marque de commerce ;
j'ose croire qu'à notre époque
tout individu est source d'inspiration,
que les hommes sont sortis de leurs cavernes ;
à l'heure qu'il est
que les femmes puissent guider
et les hommes suivre
sans que les uns ou les autres
aient des appréhensions à calculer.
J'aime citer les femmes
qui ont changé la politique
car nous ne parlons jamais d'elles,
car même par les standards de nos jours
beaucoup d'entre elles sont considérées
de dangereuses radicales,
socialistes ;
néanmoins, ce sont elles qui
légitimes, justes
ont frayé les chemins
fait signe de suivre ;
je les suis.
***
Pour citer ce poème féministe sur le désir
Thibault Jacquot-Paratte, « À la lueur des flambeaux » poème féministe inédit, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique|Le Printemps des Poètes « Les femmes et le désir en poésie » sous la direction de Françoise Urban-Menninger, mis en ligne le 15 mars 2021. Url :
http://www.pandesmuses.fr/desir/tjp-lueurdesflambeaux
Mise en page par Aude SIMON
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