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Muses
VIII & IX
Crédit photo : La Muse Érato, peinture trouvée sur Commons, domaine public.
VIII
Érato, mon aimable, Érato ma désirée.
Toi qui depuis ce baiser déposé sur tes lèvres, va et vient entre les mots et quelques frontières inconnues.
Par la main tu m’as mené sur la terrasse d’un Opéra, un soir d’été. Huit Muses nous tournaient le dos, regardaient le soleil se coucher.
Là je t’ai reconnue, debout, détendue, charmant la vue des passants loin en bas, sur la place du disque solaire en bronze. Tu lançais quelques élégies à ceux qui marchent la tête en l’air. Tu envoyais tes flèches dorées – couleur de ta peau, et taillées par le dieu Éros – transpercer les pensées des passants qui n’ont plus d’Amour.
Une phrase m’est revenue, gravée sur le bronze : « Permets mamour penser quelques folies ».
Ta statue en disait aussi long : avec un grand drap blanc enroulé autour de la taille ; recouvrant les deux épaules et juste le bras droit. Un déhanché de danseuse orientale. La main droite tirant fortement ta tunique, plaquée sur ta jolie poitrine.
Le bras gauche dénudé, une main fine retient près du corps la cithare à neuf cordes d’Apollon.
Ton regard doux est auréolé d’une couronne de roses et de myrtes. Auréole de parfums enivrants et de saveurs aigres-douces…
Érato, je dépose mes armes à tes pieds. Elles ne sont pas bien nombreuses : un lance pierre qui n’a plus d’élastique, un couteau corse mal aiguisé, et ma plume bien encrée !
Érato mon aimable, Érato ma désirée
Je reviens de mes pensées, face à tes yeux d’amandes. Nous sommes attablés sur cette terrasse perchée – le soleil est rouge-orangé. Je bois tes mots par le filtre d’un élixir ambré ou les bulles font des étoiles filantes. Je vis tes songes et tes doutes. Je vibre de tes combats, de tes révolutions. J’ouvre grands les yeux sur des mondes bizarres ou merveilleux. Je ris de tes folies et tu ries des miennes aussi !
Tes cheveux volent aux vents doux, volent aux vents salés, volent aux vents de sables…
Ton sourire emporte ta valise légère, emporte le temps, nos histoires et nos caresses.
Un instant j’ouvre tes mains ; de mes yeux je colorie de bleu tes lignes de Vie. Et comme cela est beau, j’y dépose un baiser…
Le soleil s’est couché, les huit muses restent debout face aux étoiles. Comme tu me prends par la manche pour redescendre sur Terre, je sais alors qu’il en est une qui m’accompagne. Nous marchons au rythme des mots. J’accorde mon pas sur le chant des argonautes, et sur le balancement de ton épaule nue. J’imagine déjà quelles images et quelles musiques envelopperont notre épopée.
Moi héros ? serait-ce possible ? Ou Muse…mais laquelle alors ?...
Il en est une neuvième oubliée :
IX
Uranie « la céleste »
Uranie, c’est bien moi, qui frôle ton épaule gauche comme les anneaux de saturne.
Je connais le langage des arbres – qui se touchent par la terre et parlent aux galaxies par le bruissement de leurs feuilles.
J’ai troqué ma couronne d’étoiles pour un bracelet d’homme libre. J’ai ôté ma robe bleue azur enroulée sur l’iris de tes yeux.
Approchant ton corps d’ambre, une douce chaleur s’empare de tout ton être. Les lettres d’un alphabet Abjab s’enroulent ondulent et dansent autour de Nous.
Du bout des doigts, du bout des lèvres je déchiffre tes dunes.
Et ainsi
Décrochés du temps
Nous voici
Deux Fous déliés
Emportés Par le parfum de la Peau
2020
***
Pour citer ces poèmes d'amour
Camille Simon, « Muses VIII & IX », poèmes inédits sur le désir, Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événement poétique|Le Printemps des Poètes « Les femmes et le désir en poésie » sous la direction de Françoise Urban-Menninger, mis en ligne le 19 mars 2021. Url :
http://www.pandesmuses.fr/desir/cs-muses
Mise en page par Aude SIMON
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