Lettre n°12 | S'indigner, soutenir, lettres ouvertes, hommages
Pour que vive
la liberté de caricaturer
Dina Sahyouni
Fondatrice, directrice éditoriale & présidente
De la revue Le Pan Poétique des Muses
Parce que l'islam est une religion parmi d'autres – dans cette république laïque fondatrice des droits universels des femmes et hommes (citoyennes et citoyens) – et non pas une chasse gardée de certaines personnes qui se l'approprient à leur guise,
parce que les vrais croyantes et croyants de toutes les religions ne sont pas des bébés qu'on manipule en leur faisant croire tout et n'importe quoi, mais des personnes tolérantes capables de former leurs propres avis,
parce que les religions prêchent la miséricorde divine, valorisent le pardon en affirmant que Dieu est le seul vrai juge et qu'il est miséricordieux,
parce qu'un individu musulman qui croit en Dieu ne peut le remplacer par le culte d'une idole (comme les objets, les associations, les personnes croyantes, les imams, les guides spirituels, les théologiens),
la Une du premier novembre du journal satirique et humoristique Charlie Hebo ne doit pas être mal interprétée. Elle ne doit pas non plus devenir une source de zizanie, menaces de mort et violences parmi nous (sœurs et frères en humanité)
Dans cette revue, nous désapprouvons parfois les couvertures du périodique Charlie Hebo mais, en ces temps où la liberté d'expression peut coûter la vie aux journalistes comme à toute autre personne engagée, je ne puis en tant que directrice éditoriale qu'accorder tout mon soutien à Charlie Hebo qui, comme les autres médias, fait son travail en examinant les faits de nos sociétés et en les exposant à sa manière satirique. Mon soutien n'est qu'une petite voix cependant, chaque voix solidaire est utile.
Par ailleurs, et contrairement aux affirmations de certaines personnes, cette Une ne critique pas une religion précise mais elle caricature simplement un individu qui use de son statut de théologien pour satisfaire sa virilité. Caricaturer ; c'est poétiser autrement le réel et cette forme d'expression est essentielle à chaque personne. C'est aussi pour cette raison que j'adresse le message suivant aux personnes qui menacent et critiquent violemment ce journal :
Quand on se sent lésé par un dessin et/ou un propos publiés dans un périodique, on dépose plainte pour laisser la justice se prononcer sur l'affaire puisque c'est fort bien inutile de
- crier sur les réseaux sociaux à l'islamophobie réelle et/ou fictive
- désigner des complotistes imaginaires
- montrer du doigt des boucs émissaires
- tenter de se faire justice soi-même
- proférer des insultes et des incitations à la haine, à la violence et au meurtre
dans une démocratie où chaque personne peut ester en justice.
Vive la liberté de caricaturer.
Sur ce sujet, voir aussi :
Une sur Tariq Ramadan : Charlie Hebdo croule sous les menaces de mort
Une enquête ouverte après des menaces de mort contre « Charlie Hebdo »
Charlie Hebdo : le parquet de Paris ouvre une enquête après des menaces de mort
Avec « Charlie Hebdo », par Laurent Joffrin
***
Dina Sahyouni, « Pour que vive la liberté de caricaturer », Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Lettre n° 12, mis en ligne le 8 novembre 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/2017/11/caricaturer.html
© Tous droits réservés Retour au Sommaire ▼