1er concours international de poésie | Poème sélectionné sur le handicap
N°7 | Muses au masculin | Travestissements poétiques
Confessionnal
Texte & illustrations
Site officiel : www.claudeluezior.weebly.com/
Cet extrait est reproduit avec l'aimable autorisation de l'auteur
© Crédit photo : 1ère de couverture de l'ouvrage Mystères de Cathédrale
(St-Nicolas de Fribourg), éd. Bibliothèque Cantonale et Universitaire de Fribourg, 2016.
Être confessionnal, à l’heure actuelle, n’est pas une sinécure… Et je dois bien l’avouer : je suis presque au chômage. Moins de crimes, d’adultères, de trahisons ? Non : ils n’ont soi-disant plus rien à se reprocher. C’est la faute de l’autre, des étrangers, des impôts, des patrons, des employés. La société, blanche comme neige, n’avoue plus qu’un crime : celui de ne pas aimer les confessionnaux.
Fini le temps béni des courtisanes vautrées dans leurs péchés, des politiciens véreux soudainement pris de remords, des jeunes filles décrivant leur première fois, des belles-mères dégoulinantes de fiel, des maquignons, des beaux capitaines aux bataillons d’enfants naturels.
Me restent l’aumône de deux-trois grenouilles crapahutant hors d’un bénitier presqu’à sec, un smic de larcins véniels, la génuflexion d’un Alzheimer qui n’a plus que ses cent ans à déclarer. Pas de quoi fouetter un démon !
Non, ce n’est pas drôle. Et pas juste, car le Très-Haut m’interdit toute publicité. Concurrence déloyale : ces Messieurs Javel, Karcher et Savon de Marseille en font pourtant par pages pleines. Parfois, j’écarte le rideau d’un coup sec pour guigner de-ci, de-là. Tous ont le ventre bedonnant, la calvitie proprette. Ils traînent leur insouciance, le nez dans les vitraux comme dans un musée, un restant de sandwich au coin des babines. Cartes de crédit pleines mais poches vides : pas un sou pour les bougies de la Vierge ni pour le tronc de saint Antoine, pas un péché pour moi. Rien !
Claude Luezior,
Bien sûr, j’ai réclamé en Haut-Lieu. Question pénitence pour ces mécréants, Lucifer m’a signifié qu’une bonne épidémie n’était plus à la mode, qu’une guerre de cent ans était trop compliquée à organiser, qu’un tsunami en ces montagnes serait invraisemblable... Et, de toute manière, qu’il était à la retraite et que sa partie de cartes avec l’archange Michel n'était pas terminée.
Alors, que faire ? Avec mes planches, fabriquer un cercueil pour mes illusions d’un paradis sans taches ? Tailler une nouvelle barque pour Charon, lui qui en a si besoin ? Démonter ma boîte à soucis pour allumer un feu de joie ? Solder le tout, bénédiction comprise, en un seul lot, sur Internet ?
Dites-moi votre avis, vous qui êtes immaculé. Vite, venez... me le confesser !*
© CL
* Ce texte est un extrait de Claude Luezior, Mystères de Cathédrale (St-Nicolas de Fribourg), publié par la BCU, Fribourg, Suisse, 4e trim. 2016, reproduit avec l'aimable autorisation de la Bibliothèque Cantonale et Universitaire de Fribourg, 2016.
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Claude Luezior (texte et illustrations), « Confessionnal », Le Pan poétique des muses|Revue féministe, internationale & multilingue de poésie entre théories & pratiques : Événements poétiques|Concours international (édition 2017 sur les animaux, le handicap & la joie) & N°7 | Automne 2017 « Femmes, poésie & peinture » sous la direction de Maggy de Coster, mis en ligne le 6 octobre 2017. Url : http://www.pandesmuses.fr/2017/10/concours-confessionnal.html
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